Printemps 1970, les deux festivals de Pâques : Salzbourg et Royan.
Wagner à Salzbourg, nouvelle présentation du Crépuscule des dieux terminant le cycle du Ring que Karajan a entrepris depuis quatre ans. Même succès de celui-ci non seulement comme chef d'orchestre, mais aussi comme metteur en scène dans les décors qu'il a inspirés à Günther Schneider-Siemssen et les costumes de Georges Wakhevitch. Distribution où continuent de briller les noms habituels de G. Janowitz, Z. Kelemen, K. Ridderbusch, Thomas Stewart, etc.
Trente œuvres nouvelles
À Royan, trente œuvres nouvelles, dont la moitié sont des créations mondiales, les autres étant des premières auditions françaises. Se détachent de l'ensemble : Anillos, de l'Espagnol Cristobal Halffter, pièce d'une grande et brillante élégance orchestrale ; les très ingénieuses Variations baroques, du compositeur-chef d'orchestre américain Lukas Foss ; le Concerto milieu divin du Français Jean-Étienne Marie, pour deux orchestres, deux chefs et bande magnétique ; enfin, la Cérémonie, pour trois chanteurs et trois orchestres placés au milieu du public, d'un autre Français, Paul Mefano, qui confirme ici ses exceptionnels dons de visionnaire délirant. À côté de ces quatre favoris, le succès est aussi allé aux Quatorze Stations, chemin de croix pour percussions de Marius Constant ; à Archipel IV, pour piano, d'André Boucourechliev ; à Cette étoile enseigne à s'incliner, pour orchestre et bande magnétique, de Gilbert Amy ; et à deux œuvres pour orgue, Modulos V, de Luis de Pablo, et Organum XI, de Darasse.
Les théâtres lyriques nationaux
La crise des théâtres lyriques nationaux est à son comble à la rentrée d'octobre 1969. Grèves, menaces de fermeture, perspective de grandes réformes, le climat se détériore. L'ancien état-major est décapité par Edmond Michelet, qui met sur orbite une nouvelle équipe.
René Nicoly succède à Georges Auric comme administrateur général de la Réunion des théâtres lyriques nationaux (Opéra et Opéra-comique de Paris) ; directeur de la musique, Georges Prêtre ; conseiller artistique, Maurice Le Roux ; directeur pour la danse, Roland Petit (démissionnaire en juin), remplacé par Claude Bessy ; directeur de la scène, P.-Émile Deiber. La responsabilité artistique de l'Opéra-comique est confiée à J. Giraudeau.
Le Bolchoï à Paris
La troupe du Bolchoï de Moscou s'est installée à l'Opéra de Paris du 22 décembre 1969 au 25 janvier 1970. Plus de trente représentations successives, c'est la plus grosse exportation du premier théâtre lyrique de l'URSS en dehors des pays socialistes. Cinq opéras au programme, ouvrages les plus représentatifs de l'histoire musicale russe : Boris Godounov et la Khovantchina de Moussorgski, Eugène Onéguine et la Dame de pique de Tchaïkovski, le Prince Igor de Borodine. Succès matériel incontestable qu'un dimanche de grève du personnel de l'Opéra n'a pas entamé. Les places s'arrachaient à leur prix déjà très élevé (120 F le fauteuil d'orchestre) ou à des tarifs de marché noir. On est venu de province et même de l'étranger. Mais l'enthousiasme fut, en général, plus vif au bureau de location qu'au moment de la chute du rideau.
Associations symphoniques et Orchestre de Paris
L'Orchestre de Paris donne une lumière nouvelle sur la vie symphonique française. Né en novembre 1967, il bénéficie d'une situation privilégiée, sur le plan artistique comme sur le plan financier.
L'envol de l'Orchestre de Paris et ses trois premières saisons de croisières ont produit les remous attendus : effets de prestige réussis sur le plan international, mais il rejette dans l'ombre les autres formations françaises. Cependant, en juin, Herbert von Karajan, conseiller musical, annonce qu'il ne renouvellera pas son contrat.
Le rayonnement de l'Orchestre de Paris a, en outre, donné à l'État l'envie de se concurrencer lui-même en créant de grands orchestres régionaux venant relever le niveau souvent faible des anciens orchestres municipaux. C'est ainsi que l'Orchestre susceptible de régner sur la région Rhône-Alpes-Forez a été constitué à Lyon, et un autre doit être créé dans le Val de Loire.
La musique à l'ORTF : un effort constamment renouvelé
L'activité musicale de la Radio continue d'être multiple et généralement très vivante. Néanmoins, c'est davantage dans les émissions musicales de principe culturel que dans les concerts radiophoniques qu'elle est la plus intéressante. Pour deux au moins des quatre grands orchestres de l'ORTF, une certaine routine semble s'être installée au cours des mois passés. Il y a à cela des raisons administratives et psychologiques faciles a déceler.