Enfin, et appartenant bel et bien à notre temps, un dernier procès qui nous vient d'ailleurs, tout en restant de chez nous : celui de Jean-Bedel Bokassa, empereur déchu de Centrafrique, jugé à Bangui. Bokassa répondait de la mort d'une centaine d'écoliers en 1979. Son procès n'était pas que cela. C'était sa vie entière qui était en cause, son despotisme et sa mégalomanie, résultantes d'un colonialisme acharné, suivi d'une décolonisation à l'échelle d'un continent, vécue comme une rupture.

Pierre Bois

Faits divers

Toute une France s'est reconnue à travers des statistiques aux courbes agressives, chiffres noirs des années folles : au cours des dix dernières années, la grande criminalité a augmenté de 71,5 p. 100, la moyenne, de 52,65 p. 100, les vols à main armée, de 153 p. 100, tandis que la drogue poursuivait une progression sans frein : 4 060 infractions contre 412 au temps, pas si lointain, des débuts du septennat de VGE. Mais si les chiffres font peur, ils ne sont pas porteurs d'émotion comme ces faits divers qui éclairent brusquement une actualité pourtant non tamisée : les 10 assassinats de vieilles dames dans Paris pèseront lourd leur charge d'angoisse, de même que les agressions dans le RER, les violences dans le métro à la une de la presse, faisant de la France un pays membre à part entière de l'insécurité avec un niveau de malfaisance tel qu'un Français sur cinq est victime de la délinquance.

La France suit aussi, sans oser se passionner, l'affaire Villemin ou celle des sœurs Weber, extraordinaires dames indignes de Nancy soupçonnées d'avoir tué amant et mari à la tronçonneuse. Ou même encore des embuscades vécues dans le style d'un gigantisme à la Rambo du côté de Marseille : fourgon blindé détruit par mines magnétiques.

Autres temps : la France aux urnes s'est prononcée pour la lutte contre l'insécurité. Autres résultats affirmés. Cette fois, le Français en a pour son bulletin de vote. Contrôles d'identité, présence policière dans les rues, aux endroits chauds des grandes villes. Faut-il croire à la redécouverte de la peur du gendarme ? À la mi-86, l'Intérieur donne des statistiques plus optimistes ; vols avec violence à la baisse : – 3,47 p. 100, vol à main armée : – 0,44 p. 100 (17,60 p. 100 de mars à août), ce qui fait que, au marché commun du crime, la France se cantonnera à un rang malgré tout modeste, avec un taux de criminalité de 67,14 pour 1 000 habitants, contre 67,65 en RFA et 70,47 en Angleterre.

Pierre Bois

Population

La communauté des démographes, centrée sur la Division de la population des Nations unies, que dirige à New York le Français Jean-Claude Chastelland, s'est rappelée à l'attention des médias en signalant que la population mondiale franchissait la barre des 5 milliards. Est-ce en 1986 ou au début de 1987 ? La question n'a pas grand sens, puisque l'augmentation annuelle, estimée actuellement à 1,7 p. 100 par an, soit 85 millions de personnes en plus sur la planète chaque année, est inférieure à l'incertitude avec laquelle la population mondiale est elle-même estimée.

Le passage à 1 milliard date de 1830, celui des 2 milliards de 1930, de 3 milliards de 1960, de 4 milliards de 1975. La vitesse maximale de croissance de l'ordre de 2 p. 100 par an a été atteinte dans les années 1960. Il y a en ce moment un ralentissement relatif, lié à la baisse spectaculaire de la fécondité dans de nombreux pays d'Asie, mais l'accroissement absolu, continuera d'ici à l'an 2000, jusqu'à peut-être 95 millions de personnes par an.

La situation démographique de la France varie peu : 55,3 millions d'habitants au début de 1986. La croissance, 0,4 p. 100 par an, et la fécondité, 1,82 enfant par femme, sont un peu supérieures à celles des autres pays développés. En Europe, la fécondité est plutôt de l'ordre de 1,4 à 1,6 enfant par femme ; elle est même inférieure à 1,3 en Allemagne fédérale. Ce qui retient l'attention en France, c'est la baisse considérable de la nuptialité : seulement 269 000 mariages en 1985, moins de 5 pour 1 000 habitants, alors que chaque classe d'âge, dans les générations susceptibles de se marier, pourrait former plus de 400 000 couples. Le phénomène est ancien ; il remonte à 1972, mais il s'accentue chaque année davantage. La préférence croissante des jeunes gens pour la cohabitation sans mariage est manifeste. Comment faire pour que l'institution matrimoniale entérine cette évolution, tout en convainquant les jeunes générations que l'union justifie une reconnaissance sociale ?