Le 3 mars, la commission nationale de pharmacovigilance décide d'informer largement les médecins, généralistes et spécialistes, les pharmaciens et tous les personnels de santé. On apprend en même temps que quatre cas de cancers vaginaux chez des fillettes ont déjà été traités à l'Institut Gustave-Roussy, et tous guéris. Il semble que le fait que les gynécologues français aient souvent associé une autre hormone féminine, la progestérone, au traitement par le DES, ait limité les effets cancérogènes de ce dernier. La commission rappelle cependant que les jeunes femmes qui ont été imprégnées par le distilbène durant leur vie fœtale peuvent avoir des grossesses difficiles ; chez les garçons, on observe fréquemment la cryptorchidie (testicules non descendus).

Michel Rouzé

La chimie du cerveau

Le septième congrès mondial de psychiatrie a réuni en Autriche du 10 au 16 juillet, six mille spécialistes de tous pays, à l'exception de l'URSS et de ses satellites, dont les gouvernements ont choisi la tactique de l'absence face à la réprobation croissante soulevée par les internements de dissidents dans des hôpitaux psychiatriques.

Si l'opinion publique a surtout été sensible à cette dimension politique de la réunion de Vienne, aux yeux des psychiatres, son caractère le plus marquant réside dans le progrès des conceptions organiques et génétiques des maladies mentales, au détriment des conceptions psychodynamiques et particulièrement de la psychanalyse. Les recherches récentes n'ont cessé en effet de mettre en évidence, dans de nombreuses affections psychiatriques, l'excès, le déficit ou le mauvais métabolisme des diverses substances (hormones ou neurotransmetteurs) qui jouent un rôle essentiel dans le fonctionnement du cerveau.

Biochimie génétique

Parmi les exemples les plus frappants, on peut citer l'insuffisance, chez les malades dépressifs, de la TRH, hormone sécrétée par l'hypophyse et qu'on trouve également dans certains neurones cérébraux ; ou encore l'excès, chez des schizophrènes, d'un médiateur chimique, la dopamine. Un produit de dégradation de la sérotonine (autre médiateur) a été trouvé déficitaire chez nombre d'auteurs de tentatives de suicide, ainsi du reste que chez des auteurs d'actions criminelles contre leurs proches.

En même temps qu'elle se tourne vers la biochimie, la recherche psychiatrique s'efforce de mieux définir les composantes génétiques de maladies telles que la psychose maniaco-dépressive. Celle-ci serait liée à un gène du chromosome X, ce qui expliquerait qu'elle soit plus fréquente chez les femmes, dont la 23e paire chromosomique est de formule XX : une étude des caractéristiques génétiques et des antécédents familiaux permettrait de détecter les individus à risques et d'instaurer à temps un traitement préventif au lithium, susceptible d'empêcher l'éclosion du mal. Une autre voie du diagnostic préventif de certaines maladies mentales (dont des formes de schizophrénie) pourrait être la recherche d'anomalies dans la vascularisation du cerveau. Cette recherche sait aujourd'hui recourir à des techniques non traumatisantes, telle la caméra à positrons, qui suit de l'extérieur le trajet de molécules marquées au carbure radioactif et permet d'établir une carte de la circulation cérébrale.

Quelques spécialistes s'inquiètent cependant des excès d'une tendance réductionniste qui, rapportant la genèse des maladies mentales aux seuls facteurs biochimiques, génétiques ou anatomiques, privilégierait la chimiothérapie en négligeant l'histoire personnelle du malade, les chocs affectifs qu'il a pu subir et le rôle d'un environnement social pathogène. Dans le privé, ils font remarquer que le congrès de Vienne a été en grande partie financé par l'industrie pharmaceutique, dont le chiffre d'affaires mondial, pour les seuls médicaments psychotropes, dépasse largement les 3 milliards de dollars par an.

Michel Rouzé

En bref

Alcoolisme. En vingt ans la production de bière a triplé en Amérique latine, quintuplé en Afrique et sextuplé en Asie. Un congrès international contre la propagation de l'alcoolisme s'est réuni en avril à Paris. Dans les pays industrialisés, la France est seule à enregistrer une légère diminution, tout en gardant le record mondial de consommation d'alcool : plus de 18 l d'alcool pur par an et par habitant.