Aménagement du territoire

La décentralisation et le rôle pilote des grandes entreprises

La politique de décentralisation industrielle s'appuie à la fois sur les grandes entreprises et sur les entreprises moyennes, ces dernières constituant en quelque sorte l'infanterie de la décentralisation. Cette situation est particulièrement sensible dans le domaine de la mécanique et de l'électronique. Compte tenu du marché du travail et de la main-d'œuvre formée disponible, c'est d'entreprises moyennes créant 500 ou 600 emplois qu'ont besoin la plupart des régions françaises.

Pour que ces décentralisations se réalisent, il est indispensable que les grandes entreprises participent elles-mêmes au mouvement. Elles seules peuvent contribuer à résoudre les problèmes d'emploi quand ils prennent des proportions importantes, comme dans le Nord, en Bretagne ou en Lorraine. Leur présence dans une région permet la venue ou la création d'entreprises moins importantes qui jouent le rôle de sous-traitants. Enfin, l'équilibre national que l'aménagement du territoire essaie de réaliser impose la création de points d'appui, de pôles de développement industriel, à travers tout le pays.

En pleine extension

Quelques grandes entreprises remplissent un rôle pilote qui mérite d'être souligné. Sans rendre compte d'une manière exhaustive des grandes décentralisations, certains exemples témoignent néanmoins de l'ampleur du mouvement.

Il est particulièrement important dans l'automobile.

– Renault, qui avait installé une unité avant guerre au Mans, a construit depuis dix ans des unités à Cléon, Flins, Le Havre-Sandouville, une fonderie très moderne à Lorient, une usine de caoutchouc industriel à Nantes ; en collaboration avec Peugeot, il vient de décider l'implantation d'une très importante unité à Douvrin-La Bassée, près de Lille. La SAVIEM a créé des unités à Caen et à Annonay (Ardèche), et assuré dans des conditions remarquables la reconversion de l'arsenal de Limoges.

– Citroën, en obtenant l'autorisation de quitter le quai de Javel pour se réinstaller au nord de Paris, s'est engagé à créer de nouveaux emplois en province. L'implantation d'une usine de boîtes de vitesses à Metz s'inscrit dans le cadre de cet accord. Auparavant. Citroën avait construit des unités à Rennes et à Caen. L'usine Berliet, à Bourg-en-Bresse, prend maintenant des proportions importantes.

– SIMCA, après avoir créé une usine de pièces détachées à La Rochelle, va installer une importante unité de production à Valenciennes.

– Peugeot, outre sa participation à la création de l'usine de Douvrin-La Bassée, a déjà monté une usine en pleine extension à Mulhouse.

De nouvelles créations

Les efforts réalisés par l'industrie du caoutchouc méritent également d'être signalés. Michelin a installé de nouvelles usines à Troyes, Lorient, Golbey (Vosges) et Bordeaux. Il s'apprête à de nouvelles créations à Cholet et à Montceau-les-Mines. Kleber-Colombes a résolu le problème posé par le départ des bases américaines à Tout, et Hutchinson a fait de même à Châtellerault.

Dans l'électronique, il faut mentionner les efforts de la CSF, qui, à Dijon, a installé toute une série d'unités, appelée la « nébuleuse CSF de Dijon ». La CSF a créé des usines à Grenoble et à Brest, ainsi qu'une usine travaillant pour la défense nationale sur la Côte d'Azur.

Bull, s'il a connu l'échec à Vendôme, a installé des usines importantes à Belfort et à Angers. Thomson-Houston continue d'assurer l'extension de ses usines de Nevers et de Tours.

Enfin, des entreprises comme la Compagnie des compteurs poursuivent leur effort de décentralisation. Elle est présente à Poitiers, Châteauroux, Vierzon et Reims.

Dans les années et même les mois à venir, le secteur tertiaire, qui jusqu'ici était resté réticent, devrait se lancer à son tour dans la décentralisation.

Alsace

L'attribution du prix 1968 de l'Expansion régionale au Comité pour l'économie bas-rhinoise souligne l'effort accompli par le département pour favoriser de nouvelles implantations. Les plus spectaculaires auront été l'inauguration de l'usine de la General Motors, qui, au printemps 1969, employait 2 300 personnes, et l'installation à Fergesheim du groupe pharmaceutique international Eli Lilly France, dont la production atteint déjà 6 milliards de gélules par an.