libre arbitre
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Du latin liberum arbitrium, « libre jugement », traduction du grec to autexousion, « maîtrise de soi ».
Philosophie Antique
Capacité qu'a la volonté de se déterminer sans contrainte.
Tertullien est le premier à traduire par « libre arbitre » le grec autexousios(1), employé cinq fois seulement par Épictète pour caractériser l'absence de contrainte extérieure(2). Mais l'expression « libre arbitre » a une connotation supplémentaire, non seulement l'absence de contrainte, mais aussi le jugement d'un arbitre.
C'est saint Augustin qui développe véritablement la notion. Dieu a donné à l'homme le libre arbitre de la volonté pour qu'il en fasse bon usage, c'est-à-dire pour qu'il ait une volonté bonne et qu'il soit vertueux. Mais, puisque la volonté est libre, l'homme peut mal agir et tomber dans le péché(3) : ainsi l'homme, et non Dieu, est responsable du mal. Saint Augustin avait voulu par cette doctrine combattre le manichéisme, qui voyait dans le mal une substance. Toutefois Pelage l'interpréta en faisant de l'homme le responsable du mal, mais aussi du bien, et donc l'artisan de son propre salut. Saint Augustin se défendit de cette conséquence : selon lui, l'homme est responsable de sa chute, mais il ne peut se relever sans la grâce de Dieu(4).
Jean-Baptiste Gourinat
Notes bibliographiques
→ augustinisme, déterminisme, prohairesis, stoïcisme, volonté
Philosophie de la Renaissance
La conception humaniste de l'homme en souligne les capacités productives, la position centrale dans l'univers et sa supériorité sur les autres créatures par sa liberté de vouloir et surtout d'agir. Dans cette perspective, la nécessité, l'ordre naturel ou le destin astrologique, peut être combattue par une conduite héroïque : une résistance pugnace et des actions finalisées au sein de la communauté politique. L'industria, la capacité organisatrice et productrice de l'homme, liée à la liberté du choix, devient la qualité éthique principale, avec la prudence, plus traditionnelle, pour accommoder les conditions de l'existence qui ne dépendent pas de l'homme. C'est cette conception active que défendent autant un architecte comme L. A. Alberti(1) qu'un homme politique comme L. Bruni(2) : Machiavel déclare même que la vertu, la ténacité, le projet et l'action peuvent rivaliser avec la fortuna, qui est la chance, le hasard mais aussi l'opportunité. Cependant d'autres auteurs soulignent la dépendance de l'homme à l'égard du fatum, du destin, interprété sous les espèces de la Providence chrétienne. Toutefois, ils ne manquent pas de sauvegarder, autant que faire se peut, la liberté humaine. Sur cette voie se meuvent L. Valla(3) et P. Pomponazzi(4), en distinguant la prescience divine et le libre arbitre de l'homme : la première étant un acte de pure intelligence et non de volonté, le second un acte de volonté, une libre décision. Connaître le futur ne signifie pas le rendre nécessaire.
Sur le plan théologique, Erasme(5), dans Diatriba de libero arbitrio (1524) cherche à concilier la conception humaniste de la dignité humaine avec la grâce divine. La liberté est la volonté par laquelle l'homme cherche le salut, ou se détourne de son chemin. La prière, le mérite, les promesses et les punitions divines dont témoignent les Ecritures Saintes n'auraient pas de sens si l'homme n'était pas libre. Le salut dépend ainsi de la liberté de l'homme, soutenue et aidée par la grâce : Dieu en est la cause principale, la liberté humaine la cause secondaire.
Fosca Mariani Zini
Notes bibliographiques
- 1 ↑ Alberti, L. B., Opere volgari, éd. C. Grayson, Bari, 1960-1973.
- 2 ↑ Bruni, L., Opere letterarie e politiche, éd. P. Viti, Turin, 1996.
- 3 ↑ Valla, L., De libero arbitrio, éd. M. Anfossi ; trad. fr. J. Chomarat, Dialogue sur le libre-arbitre, Paris, 1983.
- 4 ↑ Pomponazzi, V., Libri quinque de fato, de libero arbitrio et de praedistinatione, éd. R. Lemay, Lugano, 1957.
- 5 ↑ Erasme, Opera Omnia, éd. J. Leclerc, Leyde, 1703-1706 (=Hildesheim, 1961-1962).
→ action, aristotélisme, cause, éthique
Philosophie Générale, Philosophie Moderne
Liberté d'indifférence, capacité de choisir pure de toute inclination.
→ liberté