descriptions (théorie des)
Cet article est extrait de l'ouvrage Larousse « Dictionnaire de la philosophie ».
Linguistique
Analyse logique et philosophique des groupes nominaux commençant par un article indéfini (descriptions indéfinies) ou par un article défini (descriptions définies).
La théorie des descriptions a été défendue par B. Russell dès 1905, puis dans de nombreux écrits(1). Russell analyse les descriptions définies et indéfinies comme des symboles incomplets, qui ne peuvent contribuer à l'expression d'une proposition que dans le contexte créé par d'autres symboles. Une description comme « le dernier président de la France » ne dénote pas un objet, contrairement à un nom propre comme « François Mitterrand ». La ressemblance entre ces deux types d'expression apparaît à Russell une pure et simple illusion grammaticale, que l'analyse logique doit éliminer. Quelle est donc la contribution sémantique d'une description, si elle ne consiste pas en un objet ? Considérons d'abord le cas des descriptions indéfinies, comme « un homme » dans la phrase « Un homme marche ». Une telle phrase doit être analysée logiquement en deux moments. Elle affirme l'existence d'un homme, et dit de cet homme qu'il marche. En utilisant les notations logiques : ∃x (Homme(x) & Marche(x)), on remarquera qu'aucun des symboles utilisés dans la forme logique de la phrase ne correspond à la description originale, qui a été éliminée de l'analyse logique. L'analyse des descriptions définies du type « le F est G » est semblable, mais comporte trois moments au lieu de deux : il existe un F ; il n'en existe qu'un seul ; ce F est G.
Cette analyse a une conséquence ontologique importante : elle permet de résoudre l'énigme des énoncés singuliers existentiels négatifs, comme « Le Père Noël n'existe pas ». Selon Russell, cet énoncé signifie qu'il n'existe pas d'unique individu nommé « Père Noël ». Il peut donc être vrai, sans pour autant que soit présupposée l'existence d'un réfèrent pour l'expression « Père Noël ». C'est sous l'influence de cette analyse des énoncés existentiels que Quine propose son critère d'engagement ontologique : pour qu'une théorie soit engagée relativement à l'existence d'entités, il ne suffit pas qu'elle désigne ces entités à l'aide de descriptions ou de noms propres ; il faut qu'elle affirme leur existence par une quantification existentielle(2).
Pascal Ludwig
Notes bibliographiques