Charles V le Sage
(Vincennes 1338-Nogent-sur-Marne 1380), roi de France (1364-1380), fils du roi Jean II le Bon et de Bonne de Luxembourg.
1. L'apprentissage politique
1.1. Le premier Dauphin
Premier prince français apanagiste du Dauphiné du Viennois, donc premier héritier de la Couronne à porter le titre de « dauphin royal », Charles épouse Jeanne de Bourbon en 1350. Investi du duché de Normandie en 1355, il est compromis dans une conspiration par le roi de Navarre. Après la bataille de Poitiers (19 septembre 1356), où il combat et où son père est vaincu et pris par les Anglais, Charles exerce la direction du royaume (1356).
1.2. Surmonter les périls
La pénurie du Trésor, les intrigues de Charles le Mauvais, roi de Navarre, la misère des paysans, les exigences du roi d'Angleterre, tout rend sa tâche des plus malaisées. Les états généraux, convoqués, prétendent imposer un conseil de régence. Dissous aussitôt, ils sont, en raison de la situation financière, appelés de nouveau l'année suivante (1357), et Charles doit admettre en principe leurs dures conditions pour obtenir de l'argent.
Le prévôt des marchands de Paris, Étienne Marcel, dont les partisans sont renforcés de ceux de Charles le Mauvais, croit alors pouvoir achever la mise en tutelle de la monarchie en faisant assassiner aux côtés du dauphin, le 22 février 1358, deux de ses conseillers, les maréchaux de Champagne et de Normandie. Humilié, Charles quitte la capitale, rassemble des troupes et revient en force à Paris le 2 août 1358, deux jours après l'assassinat d'Étienne Marcel.
Entre-temps, les paysans se sont révoltés : c'est la Jacquerie, qui sévit en Picardie, en Île-de-France et en Champagne, mais que la noblesse réprime promptement. Les troubles sont apaisés à l'intérieur, mais la guerre anglaise se poursuit : Jean II a accepté les préliminaires de Londres (1359), véritable capitulation qui produit en France un sursaut de patriotisme et une résistance, obligeant Édouard III à accorder des conditions plus avantageuses (préliminaires de Brétigny et traité de Calais, 1360). Jean II rentre en France. Mais en 1364, pour des raisons complexes, le roi retourne se constituer prisonnier à Londres, où il meurt bientôt (8 avril 1364).
2. La restauration de la puissance royale
Charles, sacré roi à 26 ans, a acquis une solide expérience. Avec l'aide de Du Guesclin victorieux des troupes de Charles le Mauvais à Cocherel (1364), il impose la paix au roi de Navarre, se débarrasse des Grandes Compagnies, envoyées en Espagne pour soutenir Henri de Trastamare contre Pierre le Cruel, et passe à l'offensive contre les Anglais.
En 1380, ceux-ci n'occuperont plus en France que Calais, Bordeaux, Bayonne, Cherbourg et Brest. Charles avait dû, en avril 1365, reconnaître Jean IV de Montfort comme seul duc de Bretagne (→ traité de Guérande). Mais, en Flandre, la présence française avait été rétablie par le mariage de Marguerite de Flandre avec le frère du roi Philippe le Hardi.
3. Prince lettré et grand bâtisseur
Aidé par des savants (Raoul de Presles, Nicole d'Oresme, Philippe de Mézières), des juristes (Jean et Guillaume de Dormans, Pierre d'Orgemont), et des nobles (Bureau de La Rivière, Jean de Vienne, Bertrand du Guesclin), Charles V réorganise le gouvernement royal, en particulier sur le plan des finances pour soutenir l'effort de guerre.
À Paris, qu'il a repris vigoureusement en main, il termine la construction d'une nouvelle enceinte, achève celle du donjon de Vincennes (→ château de Vincennes), installe la résidence royale à l'hôtel St-Paul et la « librairie » du roi (future → Bibliothèque nationale) au Louvre. Ce grand souverain, d'apparence chétive, est parvenu, en moins de dix ans, à rejeter presque totalement les Anglais hors de France et à devenir l'un des arbitres de l'Occident, mais, en mourant le 16 septembre 1380, il laisse à son jeune fils un royaume miné à l'intérieur par de puissantes forces de dissociation.
Pour en savoir plus, voir les articles guerre de Cent Ans, Valois.