Robert Schumann
Compositeur allemand (Zwickau 1810-Endenich, près de Bonn, 1856).
Interprète des états sublimes de l'âme et du cœur, tels que les exaltait le romantisme, Robert Schumann vécut sur le seul plan de l'intériorité et fit de son œuvre une longue confession. Épris de la poésie qu'apportent le rêve et la fantaisie, il pratiqua aussi le lied avec bonheur.
Une jeunesse tourmentée
Dernier d'une famille de cinq enfants, Robert Schumann est élevé dans un milieu cultivé : son père est libraire, sa mère, pianiste. Dès l'âge de 9 ans, il se prend de passion pour la musique et, à 12 ans, il fonde un orchestre de collégiens. L'adolescent partage ensuite les tourments du romantisme, tant à travers ses lectures (Jean Paul) que ses expériences, lors du suicide de sa sœur et de la mort de son père (1826), puis de son amour impossible pour une femme mariée. À Leipzig, où sa mère l'envoie faire son droit, il rencontre Friedrich Wieck (1785-1873), éminent professeur de piano qui décèle aussitôt ses aptitudes.
Le choix de la musique
Né pour la poésie plus que pour la musique, Schumann se décide en faveur de la seconde en 1830. Il cherche alors à perfectionner sa formation théorique et pianistique. Il va jusqu'à se faire ligaturer le majeur de la main droite, dans l'intention de donner plus de force aux phalanges des autres doigts. Bientôt paralysé de la main, il prend conscience qu'il ne sera jamais virtuose et sombre dans la névrose. En 1834, il regagne Leipzig, où il se lance corps et âme dans la critique musicale, au sein de l'influente revue Neue Zeitschrift für Musik qu'il a fondée, et dans la composition, en n'écrivant pratiquement que pour le piano : Carnaval (1835), Études symphoniques (1837), Danses des compagnons de David (id.), Huit Novelettes (1838). À celle qui deviendra la femme de sa vie, Clara Wieck (1819-1896), la fille de son professeur de piano, il dédie trois sonates (1835, 1836, 1838), ainsi que les recueils Fantaisie (1838), Scènes d'enfants (id.) et Kreisleriana (id.), toutes œuvres qui font triompher la passion romantique.
Une fièvre de la composition
Parti pour Vienne en 1839, Schumann est saisi par la fièvre de la composition (Arabeske, Blumenstücke, Humoreske, Nachtstücke, Carnaval de Vienne). Tout à son bonheur d'avoir pu épouser Clara, qu'il courtise de plusieurs années, en 1840, il s'épanche dans une extraordinaire floraison de lieder : plus de 130 (sur un total de 246), dont font partie les deux somptueux cycles intitulés l'Amour et la vie d'une femme (d'après Chamisso) et les Amours du poète (d'après Heine). En 1841, Schumann aborde la composition orchestrale (symphonie n° 1, dite « le Printemps », Fantaisie [qui deviendra en 1845 le célèbre Concerto pour piano en la mineur]), puis, en 1842, la musique de chambre (3 quatuors pour cordes, quatuor avec piano, quintette en mi bémol) et, en 1843, l'oratorio (le Paradis et la Péri).
La carrière itinérante
En proie aux difficultés matérielles, Schumann entreprend en 1843 une tournée de concerts en Russie, où Clara, talentueuse pianiste, interprète avec succès plusieurs de ses morceaux. Il fait à Leipzig un retour douloureux, car son état psychique ne cesse de se détériorer et sa fierté est bafouée lorsqu'on lui préfère le Danois Niels Gade (1817-1890) pour remplacer Mendelssohn-Bartholdy à la tête de l'orchestre symphonique de la ville (Gewandhaus). Il décide alors de partir pour Dresde, où il s'installe en 1844. Il y compose plusieurs fugues et sa symphonie n° 2. Comme tous les romantiques, il veut aussi s'imposer dans le domaine de l'opéra ; il entreprend donc Genoveva, dont la création n'aura lieu qu'en 1850. De l'époque de Dresde datent aussi de nombreux lieder, de nouvelles pièces pour piano (Album pour la jeunesse, 1848 ; Scènes de la forêt, 1849), la musique de scène pour Manfred, drame poétique de lord Byron (1848-1849), et une grande œuvre chorale, Requiem pour Mignon (1849).
La folie destructrice
Froissé par l'accueil fait à son opéra, Schumann accepte un poste de chef d'orchestre à Düsseldorf – qui se révélera ne pas lui convenir. Sa frénésie créatrice le reprend : en 1950 se succèdent notamment les six Lieder sur des textes de Lenau, le Concerto pour violoncelle et la symphonie n° 3, dite « Rhénane », puis, en 1851, la version définitive de la symphonie n° 4, des ouvertures, des pièces pour piano, deux sonates pour piano et violon. Malgré le repos que lui impose Clara, il travaille encore beaucoup au cours des années 1852 (le Pèlerinage de la rose, Messe en ut mineur, dite Missa sacra, Requiem) et 1853 (Concerto pour violon, Fantaisie pour violon et orchestre, Contes de fées pour clarinette, alto et piano, Chants de l'aube pour piano).
Schumann se résigne cependant à l'épuisement de ses forces et à la maladie mentale qui va avoir raison de lui. Le 27 février 1854, peu après avoir eu la visite du jeune Brahms, qu'il aime comme un fils, il se jette dans le Rhin. Sauvé de justesse de la noyade, il est interné à l'asile d'Endenich, où il finira ses jours dans d'atroces souffrances physiques et morales. Clara reste seule avec sept enfants, quatre filles et trois garçons. Jusqu'à sa mort, elle se produira en concert pour imposer au monde l'œuvre de son mari. Un autre oratorio, les Scènes de Faust, dont la composition s'est échelonnée entre 1844 et 1853, ne sera créé qu'en 1862.
Principales œuvres de Schumann
Œuvres pour voix et orchestre
Le Paradis et la Péri, opus 50 (1841-1843). Scènes du Faust de Goethe (1844-1853). Geneviève, opéra, opus 81 (1847-1850). Manfred, musique de scène, opus 115 (1848-1849). Requiem de Mignon, opus 98 b (1849). Messe, opus 147 (1852).
Œuvres symphoniques
Symphonie en si bémol majeur, opus 38 (1841). Ouverture, scherzo et finale, opus 52 (1841). Symphonie en ré mineur, opus 120 (1841-1851). Concerto en la mineur, opus 54, pour piano et orchestre (1841-1845). Symphonie en ut majeur, opus 61 (1845-1846). Concertstück, opus 92, pour piano et orchestre (1849). Symphonie en mi bémol majeur « rhénane », opus 97 (1850). Concerto en la mineur, opus 129, pour violoncelle et orchestre (1850). Introduction et allegro, opus 134, pour piano et orchestre (1853). Concerto en ré mineur, pour violon et orchestre (1853).
Musique de chambre
Quatuor à cordes en la mineur, opus 41 (1842). Quatuor à corde en fa majeur, opus 41 (1842). Quatuor à cordes en la majeur, opus 41 (1842). Quintette en mi bémol majeur, opus 44, pour piano et cordes (1842). Quatuor en mi bémol majeur, opus 47, pour piano et cordes (1842). Trio en ré mineur, opus 63 (1847). Trio en fa majeur, opus 80 (1847). Phantasiestücke, opus 73, pour clarinette et piano (1849). Sonate en la mineur, opus 105, pour piano et violon (1851). Trio en sol mineur, opus 110 (1851). Märchenbilder, opus 113, pour alto et piano (1851). Sonate en ré mineur, opus 121, pour piano et violon (1851). Märchenerzählungen, opus 132, pour clarinette, alto et piano (1853). Sonate en la mineur, pour piano et violon (1853).
Piano
Papillons, opus 2 (1829-1832). Toccata, opus 7 (1830-1832). Thème sur le nom Abegg varié, opus 1 (1830). 6 intermezzi opus 4 (1832). Impromptus opus 5 (1833). Sonate en fa dièse mineur, opus 11 (1833-1835). Sonate en sol mineur, opus 22 (1833-1838). Carnaval, opus 9 (1834-1835). Études symphoniques, opus 13 (1834-1837). Sonate en fa mineur, opus 14 (1836). Fantaisie, opus 17 (1836). Davidsbundlertänze, opus 6 (1837). Phantasiestücke, opus 12 (1837). Kinderscenen, opus 15 (1838). Kreisleriana, opus 16 (1838). Arabesque, opus 18 (1839). Novellettes, opus 21 (1838). Nachtstücke, opus 23 (1839). Carnaval de Vienne, opus 26 (1839). Trois Romances, opus 28 (1839). Andante et variations, opus 46, pour deux pianos (1843). Études canoniques, opus 56, pour piano pédalier (1845). Album pour la jeunesse, opus 68 (1848). Bilder aus Osten, opus 66, pour piano à quatre mains (1848). Waldscenen, opus 82 (1848-1849). Fantasiestücke, opus 111 (1851). Gesänge der Frühe, opus 133 (1853).Thème et variations en mi bémol majeur Geisterthema (1854).
Lieder (cycles et recueils)
14 lieder (divers poètes) [1827-1829]. Liederkreis, opus 24 (H. Heine) [1840]. Myrthen, opus 25 (divers poètes) [1840]. Zwölf Gedichte, opus 35 (J. Kerner) [1840]. Liederkreis, opus 39 (J. von Eichendorff) [1840]. Frauenliebe und Leben, opus 42 (A. von Chamisso) [1840]. Dichterliebe, opus 48 (Heine) [1840]. Romanzen und Balladen, opus 45, 49, 53 et 64 (divers poètes) [1840] et [1841-1847]. Lieder und Gesänge aus Wilhelm Meister, opus 98a (Goethe) [1849]. Sechs Gedichte und Requiem, opus 90 (N. Lenau) [1850]. Gedichte der Königin Maria Stuart, opus 135 (1852).Divers duos, ensembles vocaux et chœurs.
Orgue
Six Fugues sur le nom de Bach, opus 60 (1845).
Citations
« Ce que je suis réellement, je ne le sais pas moi-même. Si je suis poète – car nul ne peut le devenir –, la destinée en décidera un jour. »
Propos de jeunesse de Robert Schumann.
« Si je puis vivre mon génie, il me conduira à l'art, et, je le crois, sur le bon chemin. »
Phrase d'une lettre de Robert Schumann adressée à sa mère, le 30 juillet 1830, au moment où il fit le choix d'être musicien.
« Ma musique n'est pas une besogne de manœuvre ; le métier n'y a point de part ; mais elle a coûté à mon cœur plus qu'on ne saurait imaginer. »
Robert Schumann.
Clara Schumann
Sa femme, Clara, née Wieck (Leipzig 1819-Francfort-sur-le-Main 1896), pianiste, se consacra à l'interprétation des œuvres de Beethoven, Chopin, Liszt, Schumann. Elle a composé des pièces pour piano et surtout de remarquables lieder.