Luc Montagnier

Médecin français (Chabris 1932-Neuilly-sur-Seine 2022).

Son intérêt pour la science s'éveille dès sa jeunesse grâce aux expériences que son père, comptable, effectue le dimanche dans le laboratoire de fortune qu'il a installé au sous-sol de la maison familiale. Licencié ès sciences en 1955, après des études universitaires à Poitiers, puis à Paris, il devient assistant à la Faculté des sciences de Paris et enseigne la physiologie à la Sorbonne. Docteur en médecine, il entre au C.N.R.S. en 1960 et part en Angleterre poursuivre ses recherches. Jusqu'en 1963, au laboratoire du Medical Research Council à Carshalton, dans la banlieue de Londres, il travaille sur les virus à ARN (c'est-à-dire dont le patrimoine génétique est constitué d'ARN), découvrant notamment leur mode de réplication. Il rejoint ensuite l'Institut de virologie de Glasgow, en Écosse, où il met au point une nouvelle technique de culture des cellules cancéreuses. De retour en France en 1965, il dirige pendant sept ans le laboratoire de l'Institut du radium (l'actuel Institut Curie), à Orsay. En 1972, il crée, à l'Institut Pasteur, dans le nouveau département de virologie, une unité d'oncologie virale, qu'il dirigera jusqu'à sa retraite. En 1974, il est nommé directeur de recherche au C.N.R.S. Convaincu que certains cancers ont une origine virale, il cherche à vérifier si les rétrovirus ne seraient pas une cause de cancer. Ses travaux le conduisent à isoler l'ARN-messager de l'interféron et à cloner des gènes de cette protéine qui stimule le système immunitaire. Cependant, malgré les grands espoirs que suscite alors l'interféron pour la mise au point de médicaments anticancéreux, il s'avérera que celui-ci ne permet de combattre efficacement que quelques tumeurs.

Pour répondre à une demande de cliniciens de l'Assistance publique des Hôpitaux de Paris, Luc Montagnier s'engage, avec son équipe, en janvier 1983, dans des recherches visant à isoler un nouveau virus, à partir d'une biopsie ganglionnaire d'un patient atteint de lymphadénopathie généralisée. L'essentiel des travaux est réalisé par Françoise Barré-Sinoussi et Jean-Claude Chermann. Ces recherches aboutissent à la publication, le 20 mai 1983, dans la revue américaine Science, d'une première description du virus. Celui-ci, appelé LAV (Lymphadenopathy Associated Virus) par ses découvreurs, sera renommé VIH–1 (virus de l'immundodéficience humaine) après avoir été identifié comme l'agent du sida. De cette découverte découlera la description de la séquence du virus, par des biologistes de l'Institut Pasteur, et la mise au point de tests de dépistage, qui seront commercialisés en 1985. Une autre souche du virus, VIH-2, qui se rencontre essentiellement en Afrique, sera identifiée en 1986.

En 1983, une équipe de scientifiques américains dirigée par Robert Gallo travaille également à l'identification du virus ; en s'attribuant la paternité de la découverte et en obtenant un brevet pour les tests de dépistage du virus, elle déclenche une longue polémique entre la France et les États-Unis avec, à la clé, des enjeux commerciaux importants .Cette controverse prend fin en 1987 avec la signature d'un accord aux termes duquel Luc Montagnier et Robert Gallo acceptent d'être reconnus comme codécouvreurs du virus et les gouvernements français et américain acceptent de partager les bénéfices issus des tests de dépistage (versés majoritairement à à une fondation pour la recherche sur le sida).

Bénéficiant désormais d'une renommée internationale, Luc Montagnier poursuit ses activités à l'Institut Pasteur, s'efforçant notamment de mettre au point des médicaments contre le sida. En 1990, il postule que la présence d'un mycoplasme est indispensable pour tuer le VIH. Cette hypothèse, controversée, fait toujours l'objet de recherches.

En 1997, atteint par la limite d'âge, Luc Montagnier quitte à regret la France et part poursuivre momentanément ses recherches aux États-Unis, provoquant une vive polémique sur la « fuite des cerveaux ». Il s'attire des inimitiés par l'activité personnelle qu'il développe en marge des institutions officielles (notamment la promotion de régimes alimentaires censés combattre des maladies dégénératives) et par ses critiques de l'organisation de la recherche en France.

Créateur en 1993 de la Fondation mondiale « Recherche et prévention sida » (qu'il préside toujours), élu en 1996 à l'Académie des sciences, il est lauréat en 2008 du prix Nobel de physiologie ou médecine, qu'il partage avec Françoise Barré-Sinoussi (1/4 du prix chacun) et l'Allemand Harald zur Hausen (1/2 du prix)

  • 1983 Le Français L. Montagnier identifie le virus du sida.