Église maronite
Église catholique de tradition syriaque, issue de l'ancien patriarcat d'Antioche.
Depuis le xie siècle, son principal foyer et son centre institutionnel (patriarcat maronite d'Antioche et de tout l'Orient) se sont établis dans la montagne libanaise. Le nombre de ses fidèles peut être ajourd'hui estimé à 3 500 000, résidant au Liban (environ 1 000 000) et se répartissant à travers le monde, notamment au Brésil, en Argentine et aux États-Unis.
1. L'histoire
1.1. Des origines jusqu'aux croisades
L'Église maronite tire son nom du monastère établi sur la tombe de l'ascète saint Maron (mort v. 410), dans la région d'Apamée-sur-l'Oronte (Syrie centrale). Cet important monastère devient au vie siècle le principal foyer de la fidélité aux décisions du concile de Chalcédoine et de la lutte contre les monophysites (→ monophysisme). Une lettre au pape Hormisdas, en 517, fait état du massacre de 350 moines.
Il semble que, durant la longue vacance du patriarcat orthodoxe (chalcédonien) d'Antioche (609-742), les chrétiens attachés à l'orthodoxie définie à Chalcédoine mais répugnant à l'adoption des usages byzantins (melkites) aient pris l'habitude de considérer comme leur chef légitime le supérieur du monastère de Saint-Maron. Par fidélité aux usages ancestraux, et sans doute aussi à la christologie définie dans des documents promulgués sous Héraclius (→ Ecthèse de 638) à la veille de l'invasion arabe mais condamnés par la suite (681) comme entachés de monothélisme, les maronites se constituent en patriarcat autonome au cours de la première moitié du viiie siècle (témoignage de Denys de Tell-Mahré conservé dans la Chronique de Michel le Syrien, v. 1190).
1.2. Le rapprochement avec l'Église de Rome (xiie-xve siècles)
Hormis quelques rares documents, les maronites n'émergent dans l'Histoire qu'au temps des croisades. Ils sont alors regroupés en majorité dans les montagnes et les gorges profondes du nord du Liban (→ Qadicha), à Chypre et dans les régions d'Alep et d'Antioche, entretenant de bons rapports avec les Francs. C'est alors qu'ils proclament leur communion dans la foi avec l'Église de Rome (v. 1180) et reconnaissent la juridiction suprême du pape. Leur patriarche Jérémie al-Amsiti (mort en 1230) prendra part au quatrième concile du Latran (1215), où ses droits sont officialisés, mais le titre de « patriarche d'Antioche » ne sera reconnu définitivement qu'à partir du pape Paul V (1608).
En 1440, le patriarche Jean al-Jaji établit la résidence patriarcale au monastère de Qonnubin (Dayr Qannubin) dans la gorge de la Qadicha, au-dessous de Diman. En 1900, celle-ci deviendrala résidence estivale, le siège patriarcal ayant été transféré au xixe siècle à Bkerké, à une quinzaine de kilomètres au nord de Beyrouth.
1.3. La période mamelouke (1291-1517)
Interrompues pendant la période d'occupation par les Mamelouks, les relations avec l'Occident se multiplient au cours du xvie siècle, notamment par l'intermédiaire des Franciscains, puis des Jésuites (légation de Giambattista Eliano et Tomaso Raggio, 1578-1579).
1.4. La période ottomane (1517-1918)
À l’époque de l'hégémonie ottomane, les patriarches et évêques maronites s’allient aux émirs Banu Maan et Chihab (→ Chihab Bachir II qui gouvernent le pays et se répandent dans tout le Liban. Ainsi, en1584, durant le règne de l'émir druze Fakhr al-Din II, le pape Grégoire XIII ouvre le Collège maronite de Rome, qui formera désormais l'élite du clergé maronite jusqu'à la création du séminaire inter-rituel de Ghazir (1845, transféré à Beyrouth en 1875 et devenu l'université Saint-Joseph).
Un synode, dit « synode du Mont-Liban », tenu au monastère de Loyze (Lùwayze) sous la présidence de Giuseppe Simone Assemani, légat du Saint-Siège (30 septembre-2 octobre 1736), donne enfin à l'Église maronite l'organisation qu'elle a gardée jusqu'à nos jours.
Avec les Druzes, et en dépit des persécutions dont ils sont l'objet de la part de ces derniers entre 1840 et 1860, les maronites jouent un rôle important dans la constitution d'une nation libanaise reconnue par les puissances en 1861. Depuis l'indépendance (1943), le président de la république du Liban a toujours été choisi parmi les maronites.
Pour en savoir plus, voir l'article Liban : histoire.
2. Les institutions
2.1. Organisation ecclésiastique
L'Église maronite est dirigée par un patriarche élu par le synode des évêques. Jusqu'en 1736, ceux-ci gouvernaient collégialement l'ensemble de la communauté. Depuis lors, la plupart d'entre eux sont, comme dans les autres Églises traditionnelles, à la tête d'éparchies (diocèses), actuellement au nombre de vingt-sept dans treize pays. Le clergé compte une proportion non négligeable de prêtres mariés, notamment dans les villages de la montagne ; il est néanmoins recruté de plus en plus parmi les séminaristes qui s'engagent à demeurer dans le célibat.
2.2. Le monachisme
Seule de toutes les Églises chrétiennes, l'Église maronite doit son origine à l'influence prédominante des moines. Néanmoins, ce monachisme a gardé jusqu'à la fin du xviie siècle une structure très fruste. C'est sous l'influence directe des ordres religieux latins, et notamment des Jésuites (→ Compagnie de Jésus), que se constituèrent dans les dernières années du xviie siècle deux congrégations monastiques observant la règle dite « de saint Antoine » (compilation éditée en 1646) : la congrégation libanaise (approuvée en 1700, réformée en 1732) et la congrégation de Saint-Isaïe (1703). La première se divisa en 1757 pour donner naissance à la congrégation des Antonins alépins, approuvée en 1770. Depuis 1951, l'ordre libanais maronite a créé l'université du Saint-Esprit à Kaslik, près de Djouniyé, pour promouvoir l'étude des traditions théologiques et liturgiques syriaques.
Pour en savoir plus, voir l'article monachisme.
2.3. Doctrine
Fermement attachée à la tradition des anciens conciles et en particulier à la christologie de Chalcédoine, l'Église maronite n'a jamais été en situation d'élaborer une théologie propre. Surtout depuis le concile de Trente, l'influence de la théologie romaine a été prédominante.
2.4. Liturgie
Sur le plan liturgique, en revanche, l'Église maronite a mieux réussi à sauvegarder son originalité. Elle constitue une branche du rite syro-antiochien qui a intégré des formulaires et des usages de la tradition mésopotamienne (chaldéenne) et semble avoir conservé de très anciens éléments venus des communautés syriennes araméennes. L'influence latinisante des derniers siècles n'a guère atteint que les formes extérieures (notamment les vêtements) et certains détails du rituel ; un travail de longue haleine est actuellement entrepris en vue de rendre à cette liturgie sa forme originelle. La langue liturgique officielle demeure le syriaque, mais, depuis plusieurs siècles déjà, il est fait un large usage de l'arabe.
Pour en savoir plus, voir l'article Églises orientales.