panarabisme
Idéologie affirmant la nécessité d'unir le monde arabe et qui a donné naissance, après la Seconde Guerre mondiale, à des mouvements politiques et à une éphémère République arabe unie (1958-1961) dominée par l'Égypte de Nasser.
1. Le sentiment unitaire des Arabes
Avant même la prédication de Mahomet, les Arabes ont toujours eu conscience d'appartenir à un peuple uni par des généalogies fictives rattachant les tribus les unes aux autres et l'existence d'une langue commune. Le caractère sacré de l'arabe, qui est la langue du Coran, a renforcé ce sentiment d'unité, malgré la présence constante dans le monde arabe de minorités chrétiennes et juives.
2. Naissance du sentiment national arabe
En 1517 est proclamé le califat ottoman d'Istanbul (le seul des cinq califats musulmans à ne pas avoir été détenu par des Arabes, mais par des Turcs). Pendant des siècles, les Arabes se sentent humiliés de voir un sultan ottoman exercer la fonction religieuse et politique de calife. À la fin du xixe s. toutefois, le prestige du sultan Abdülhamid II, qui se proposait de défendre la grandeur de l'islam, était réel parmi les Arabes. C'est la décadence de l'Empire ottoman, dominé par les Turcs, qui est à l'origine de la naissance du sentiment national arabe.
Pour en savoir plus, voir l'article califat.
3. L'appel d'Abd al-Rahman al-Kawakibi à un califat arabe
Le désir de former un État national, fondé sur l'appartenance à la communauté arabe, apparaît au début du xxe s., alors que l'Empire ottoman se révèle incapable de résister à la domination occidentale. En 1902, Abd al-Rahman al-Kawakibi, réformateur religieux et politique syrien (1849-1902), exalte dans La Mecque, mère des cités (1902) la supériorité des Arabes sur les Turcs et appelle à la création d'un califat arabe établi à La Mecque afin de s'opposer à la domination occidentale.
4. Frustrations et radicalisations
La Première Guerre mondiale entraîne la disparition de l'Empire ottoman, mais aussi l'échec de la tentative de créer un royaume arabe. Le chérif de La Mecque, Husayn ibn Ali, se proclame en 1916 roi des Arabes, mais les Alliés – en dépit de leurs promesses – se partagent les territoires arabes sous contrôle ottoman. De surcroît, par la déclaration Balfour du 2 novembre 1917, les Britanniques acceptent l'idée de créer en Palestine un foyer national juif. D'où les frustrations expliquant l'apparition d'un sentiment d'appartenance au monde arabe, notamment dans une Égypte sous domination britannique.
5. Création de la Ligue arabe
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le Royaume-Uni tente de regagner l'appui des Arabes, parfois sensibles à la propagande de l'Axe, et soutient la création, en 1945, de la Ligue arabe.
6. Émergence du panarabisme
En 1947, le chrétien syrien Michel Aflak crée le parti Baath (« résurrection » en arabe), transformé en 1953 en parti de la Résurrection arabe et socialiste, qui se propose de fonder une nation arabe et laïque. L'héritage culturel de l'islam est revendiqué au nom de l'arabité.
Quelque temps après, le coup d'État mené en 1952 par les Officiers libres égyptiens bouleverse le monde arabe, de plus en plus hostile à la présence des puissances coloniales dans la région.
L'idée de créer un État arabe au Proche- et au Moyen-Orient mobilise les foules dans le contexte de la décolonisation.
7. Apogée et échec du panarabisme
En 1954, Nasser devient le maître effectif de l'Égypte. Il défend la cause de l'indépendance de l'Algérie. Il nationalise en 1956 le canal de Suez et triomphe de l'alliance franco-britannique. Son prestige dans le monde arabe, dont il devient l'homme fort, est immense. Grâce au soutien du parti Baath, influent en Syrie, le raïs (le « chef » en arabe) proclame en 1958 la création de la République arabe unie (RAU), qui comprend l'Égypte, la Syrie et bientôt le Yémen. En 1961, la Syrie recouvre son indépendance, suivie par le Yémen ; l'échec de cette tentative marque la fin du panarabisme.
Après 1961, le panarabisme n'est plus qu'un élément du discours politique nassérien. Revendiqué un temps par le jeune colonel Kadhafi, le panarabisme s'efface bientôt devant l'islamisme, qui séduit davantage une partie du monde musulman.
Pour en savoir plus, voir les articles Gamal Abdel Nasser, Orient arabe.