continent
(latin continens terra, terre continue)
Division traditionnelle des terres émergées.
Géographie
Le terme « continent » a pris le pas sur l’expression « partie du monde » pour désigner les grandes divisions des terres émergées : l’Afrique, l’Amérique, l’Asie, l’Europe et l’Océanie. Ces continents sont cinq en français (d’où les cinq anneaux du drapeau olympique), mais ils peuvent, ailleurs, être six, avec l’Antarctique, ou sept si l'on prend en compte deux Amériques. Le mot « continent » est apparu au xviie s. à partir de l’expression « terre continente », terre en continu. En français, en particulier à l’école, on a longtemps distingué deux continents, l’Ancien Monde et le Nouveau Monde, et cinq parties du Monde, nuance aujourd’hui très peu utilisée.
Reprenant les divisions de l’Antiquité grecque (Hérodote fait allusion, pour les critiquer, aux trois parties du monde), les savants du Moyen Âge européen, Isidore de Séville en particulier, considèrent les terres habitées comme formées de trois parties : l’Asie, l’Europe et l’Afrique. La vision chrétienne du monde devait, en effet, correspondre à une lecture littérale du texte de la Genèse (livre IX) qui évoque le repeuplement de la Terre, après le Déluge, par les trois fils de Noé, qui, partis, avec leurs familles, chacun dans une direction différente, ont engendré tous les peuples.
À la fin du Moyen Âge, les trois Rois Mages furent associés aux trois parties du monde ; c’est pour cela que le troisième roi est noir. Le découpage fut laïcisé au xvie s. lorsqu’une quatrième partie, l’Amérique, s’ajouta aux trois premières. Au xviiie s., dans le contexte des Lumières où l’on s’est efforcé de classer tout les éléments du réel, les quatre continents ont servi de premier niveau à l’organisation encyclopédique des lieux. Il fallut donc rattacher tous les points de la Terre à l’une des parties et en tracer des limites précises. C’est ainsi, pour des raisons géopolitiques que Diderot choisit la limite de l’Oural comme ligne de partage entre l’Asie et l’Europe.
Néanmoins, les lieux les plus lointains restaient difficiles à classer et on inventa, en 1812, un curieux continent, « l’Océanie ». Les cinq continents sont devenus, dès le xixe s. un cadre pédagogique appris très tôt à l’école et le cadre de toutes nos statistiques mondiales. L’oubli de l’origine du découpage aide à considérer ces objets géographiques comme des faits de nature, de très grandes îles.
Toute une iconographie européenne, qui s’est multipliée à partir du xvie s., représente les parties du monde comme des femmes, l’une d’entre elles, l’Europe, ayant le pas sur les trois (puis les quatre) autres. La gestation très lente du découpage des terres émergées et ses différentes représentations symboliques a permis l’oubli de leur dimension conventionnelle. En fait, les sociétés européennes ont pu ainsi affirmer leur particularité et découper le monde à partir de leur territoire. L’Asie et l’Afrique ne sont que les portions de l’Ancien Monde qui ne sont pas européennes. Tant que l’Occident s’imposait sans conteste aux autres sociétés, une telle vision a pu passer pour naturelle. Aujourd’hui, ce découpage est de plus en plus difficile à considérer autrement que comme une convention.
Géologie
Structure
Continents proprement dits et plates-formes continentales forment la partie épaisse de la croûte terrestre (lithosphère) : celle-ci a en effet une épaisseur de 35 à 40 km en général, alors qu'elle a souvent moins de 5 km au fond des océans. Cette épaisseur est d'ailleurs très variable selon les lieux : elle se réduit à 20 km à certains endroits, mais peut aller jusqu'à 80-90 km sous les grandes chaînes de montagnes.
Les reliefs continentaux ont des caractères très différents de ceux des reliefs sous-marins. Les altitudes les plus extrêmes sont inférieures de près de deux mille mètres aux profondeurs océaniques maximales ; de plus, l'altitude moyenne des terres émergées est voisine de 850 m, alors que la profondeur moyenne des océans est de 3 800 m.
En fait, les continents eux-mêmes sont des fragments de la croûte terrestre, laquelle est formée de plaques juxtaposées, d'épaisseur variable. On compte douze plaques principales, dont les plaques nord-américaine, sud-américaine, eurasiatique, africaine, indo-australienne et antarctique, sans compter nombre de petites plaques et même de microplaques dans quelques zones complexes comme les grandes chaînes de montagnes.
Sur les continents proprement dits, quatre éléments essentiels dominent selon un arrangement variable : les boucliers, les bassins sédimentaires, les montagnes anciennes et les chaînes récentes.
Les boucliers sont de vastes étendues planes ou ondulées, formées de roches très anciennes (granites, gneiss), longuement usées par l'érosion. C'est le cas du Bouclier canadien et du Groenland, du Bouclier brésilien, du Bouclier scandinave et du Bouclier africain.
Les grands bassins sédimentaires sont aussi de vastes étendues aux horizons calmes, formées de roches sédimentaires (calcaires, grès, argiles), avec un relief de plaine ou de plateau. C'est le cas des Grandes Plaines d'Amérique du Nord et de la grande plaine nord-européenne.
Les montagnes anciennes sont beaucoup moins étendues ; elles ont été longuement usées. C'est le cas des Appalaches (Am »rique du Nord) et de l'Oural (Eurasie).
Les chaînes récentes sont plutôt périphériques car elles occupent la bordure des plaques ; ici, les plissements prédominent et les altitudes peuvent être fortes. C'est le cas pour les grandes montagnes qui bordent l'Amérique, de l'Alaska (Amérique du Nord) à la Terre de Feu (Amérique du Sud), mais aussi de l'Himalaya (Asie) et des chaînes alpines (Europe).
Formation
Les continents résultent de longs et incessants bouleversements géologiques. L'étude de la variation des aires continentales au cours des temps géologiques, fondée sur les résultats des explorations scientifiques les plus récentes, a permis d'élaborer une théorie de la tectonique des plaques qui vérifie les hypothèses d’Alfred Wegener (géophysicien allemand du début du xxe s.) sur la dérive des continents.
La formation des continents est assurément ancienne, mais les spécialistes de l'histoire de la Terre ne s'entendent ni sur la date ni sur les mécanismes de cette formation. Pour les uns, la croûte terrestre initiale s'est formée il y a quelque 4 milliards d'années (c'est un peu plus que l'âge des roches les plus anciennes découvertes dans les boucliers précambriens). Pour d'autres, la croûte initiale a été formée de petits fragments qui se sont étendus peu à peu par divers processus liés à l'activité tectonique. D'autres encore font intervenir le rôle des grosses météorites qui ont bombardé la Terre pendant 600 millions d'années au début de son histoire.
Les continents n'ont pas cessé de bouger, car les plaques se déplacent sous l'action des mouvements de convection qui se produisent dans le manteau légèrement visqueux qui est sous-jacent. Les déplacements peuvent paraître lents (2 à 15 cm par an selon les lieux) mais, à l'échelle des temps géologiques, ils finissent par avoir des effets considérables. Il y a 200 millions d'années environ, il n'existait qu'un seul très grand continent, la Pangée ; celui-ci s'est divisé il y a 180 millions d'années, donnant naissance à la Laurasie et au Gondwana ; à leur tour, ces deux vastes ensembles se sont fragmentés pour former les continents actuels.
Par ailleurs, il pourrait subsister plusieurs fragments de continents préhistoriques noyés par des roches volcaniques et difficilement identifiables. L'un de ces « micro-continents », baptisé Mauritia, a été découvert en 2013 sous l'île de La Réunion et l'île Maurice.