Japon : population
Le Japon occupe le onzième rang mondial pour la population. Le pays est densément peuplé (plus du double de la population française), d'autant qu'à peine le quart du territoire est utilisé. En ne prenant en compte que les 80 000 km2 de plaines, cette densité s'élève à plus de 1 500 habitants au km2, notamment sur le littoral du Pacifique. La population, qui a pratiquement doublé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, a commencé à décroître en raison de la chute du taux de natalité et de la hausse de la mortalité liée au vieillissement de la population (29 % de la population a plus de 65 ans), alors que l'espérance de vie à la naissance se situe parmi les plus élevées du monde (85 ans). L'urbanisation croissante a abouti à la formation de quelques mégalopoles dont les centres sont Tokyo, Osaka, Yokohama, Nagoya. Tokyo, la capitale, dont l'agglomération s'étend sur 13 500 km2 environ, compte plus de 42 millions d'habitants, ce qui en fait la plus grande agglomération du monde. Surtout, elle est à la tête de la mégalopole de Tokaido, ruban urbanisé de plus de 500 km de longueur. Avec une faible immigration et une émigration sensible, notamment vers les États-Unis, le Japon a renoué avec un solde migratoire positif depuis le début des années 2000.
● moins de 15 ans : 12 %
● 15-65 ans : 59 %
● plus de 65 ans : 29 %
● hommes : 81 ans
● femmes : 87 ans
1. Historique du peupIement
L'archipel montre des traces de peuplement depuis 500 000 avant J.-C. La mythologie nationale fait du peuple japonais une « ethnie unique » (tan'itsu minzoku). En réalité, il mêle des apports venus d'Asie centrale par la péninsule de Corée, du bassin du Yangzi Jiang et des îles du Sud.
L'immigration coréenne est attestée jusqu'au viiie s.(En 2002, l'empereur Akihito rompt un tabou en évoquant une « parenté » entre la lignée impériale et la Corée.) Entrées par l'île de Kyushu, ces populations ont progressé vers le nord en refoulant des groupes autochtones (les Aïnous et les mystérieux Emishi) jusqu'à Hokkaido, qu'elles atteignent au xe s. mais qu'elles ne coloniseront qu'au xixe s.
L'archipel aurait compté 300 000 habitants au début de notre ère, 7,5 millions vers l'an 1000, et le double, probablement, vers 1500.
Sous les Tokugawa, la paix permet une rapide croissance démographique (1730 : 27 millions ; 1846 : 31 millions), qui explose à partir de l'ère Meiji (1900 : 44 millions ; 1940 : 72 millions). L'État encourage alors le peuplement de Hokkaido, la colonisation extérieure (Mandchourie, Corée) et l'émigration (Hawaii, Amérique du Sud).
Après la défaite de 1945, le contrôle des naissances par l'avortement est encouragé (loi eugénique de 1948). Mais la population va encore croître de 74 % en quarante-cinq ans, d'abord à cause du baby-boom de l'après-guerre (taux de natalité : 28 ‰ en 1950), puis à cause de l'allongement de l'espérance de vie. Cette vitalité démographique a été un élément majeur du développement économique.
2. Caractéristiques de la population
2.1. La répartition par âges, la natalité et la mortalité
En 2009, la part de la population âgée de moins de 15 ans représente 13 % de la population totale, soit 15 588 000 « enfants ».
Celle des 15-65 ans est de 64 %, soit 81 664 000 personnes.
Les personnes âges de plus de 65 ans représentent 23 % de la population totale soit 29 848 000 personnes ; parmi lesquelles 3 % sont âgées de plus de 85 ans soit 3 828 000 personnes dont un peu plus de 40 000 sont plus que centenaires.
Le Japon représente la situation la plus extrême d'une structure de population affectée par le vieillissement.
2.2. La fécondité et la nuptialité
Actuellement les femmes japonaises ont un taux de fécondité de 1,3, ce qui est insuffisant pour assurer le remplacement des générations ; le taux de natalité s'est effondré (13,6 ‰ en 1980, 9,5 ‰ en 2000, 9 ‰ en 2009) alors que le vieillissement très rapide commence à faire remonter la mortalité (6,2 ‰ en 1980, 7,7 ‰ en 2000, 9 ‰ en 2009). En conséquence, le solde naturel est devenu négatif depuis 2004.
3. La répartition de la population
3.1. Les moyennes et la réalité
La densité moyenne de 336 habitants par km2 est très théorique car plus des trois-quart de la population vit sur une part très restreinte du territoire, dans le « Japon de l'Endroit », la côte pacifique, dans la mégalopole japonaise, où la densité est très élevée, de l'ordre souvent de 1 600 habitants par km2. Elle s'est étendue vers Fukuoka dans les années 1950-1970 et, plus récemment, vers Sendai, dans le nord de Honshu.
3.2. La mégalopole japonaise
La mégalopole japonaise est un ruban urbain qui borde le littoral pacifique sur environ 1 300 km de Tokyo à Fukuoka et regroupe un peu plus de 70 % de la population de l'archipel.Trois très grandes agglomérations la dominent, celle de Tokyo, la plus importante du Monde, qui regroupe les préfectures de Tokyo, de Kanagawa, de Saitama et de Chiba, celle de Nagoya, réunissant les préfectures daichi, de Mie et de Gifu, et celle d'Osaka, composée des préfectures d'Osaka, de Hyogo (Kobé) et de Kyoto.
Le déséquilibre est grand entre la mégalopole et les zones marginales du nord-ouest de Honshu, « Japon de l'Envers », mais aussi avec les autres îles (Shikoku, Kyushu et Hokkaido). Les plans d'aménagement du territoire destinés à disséminer l'industrie lourde pendant la période dite de « haute croissance », de 1955 à 1973, n'ont guère réussi à renverser la situation en faveur d'un rééquilibrage. De fait, les communes qui se dépeuplent notablement, c'est à dire qui ont perdu plus de 10 % de leurs habitants entre deux recensements, représentent plus de la moitié du territoire. Un grand nombre d'entre elles ont disparu par fusion et les nouvelles entités se mobilisent pour développer leurs activités.
La construction du réseau des trains à grande vitesse, le Shinkansen, depuis 1964, a surtout permis d'intégrer l'espace mégalopolitain et de l'étendre vers le nord et le sud-ouest. Les projets high-tech des années 1980 (Technopolis, Intelligent Cities…) ont visé à abolir le handicap de l'isolement grâce aux nouvelles technologies de la communication. En pratique, ils ont surtout permis de boucher les trous qui subsistaient çà et là dans la mégalopole, et de favoriser son extension à sa périphérie.
4. Immigration et émigration
Par principe, le Japon refuse l'immigration. Il a maintenu cette politique malgré un marché du travail extrêmement tendu depuis la fin des années 1950 jusqu'à la crise des années 1990. Les Coréens, dont 2,4 millions ont été contraints de venir travailler au Japon, pendant la colonisation de leur pays (1910-1945), et auxquels les Américains ont octroyé en 1946 le droit de résidence permanente pour ceux qui le souhaitaient (environ 600 000), ont longtemps été la seule communauté étrangère significative. Une nouvelle émigration coréenne s'est développée depuis les années 1980, dont la réussite se lit dans la fréquence élevée de mariages mixtes.
En dépit des principes, le nombre des immigrés s'est accrû (1991-1996 : +18 %), notamment pour occuper les emplois « 3K » (sales, durs et dangereux), dont les Japonais ne veulent plus. En particulier, les autorités ont assoupli leur politique, en permettant, depuis 1990, aux descendants des émigrés japonais (nikkeijin) en Amérique latine (Pérou et Brésil), de venir travailler librement dans l'archipel. Si cette immigration est souvent considérée comme un retour au pays (kikoku), l'intégration est souvent difficile : leur comportement expansif, leur difficulté à parler le japonais les poussent vers des emplois de type CDD, qui ne favorise pas l'établissement de relations sociales durables. Par ailleurs, la présence de plusieurs centaines de milliers de clandestins est tolérée. Le Japon compte environ 2 millions d'immigrés légaux, les Asiatiques non coréens formant un tiers des résidents étrangers, dont des Chinois.
Environ un million de Japonais se sont expatriés après le début de l'ère Meiji (1868). Leurs descendants sont surtout nombreux aux États-Unis et en Amérique latine, notamment au Brésil (1,3 million) et au Pérou. Au cours des années 1990, une nouvelle vague d'émigration s'est peu à peu formée, au point que le Japon est aujourd'hui le seul grand pays développé dont le solde migratoire net est négatif. En 2000, les consulats japonais à l'étranger recensaient 811 712 citoyens japonais résidant hors de l'archipel (en augmentation de 10 % en cinq ans), dont 36 % aux États-Unis, et plus de 25 000 en France.
5. La société japonaise
5.1. La conception traditionnelle
Les Japonais ont une image de leur nation extrêmement prégnante. Le cœur en est le concept de kokutai (« corps national »). La race japonaise serait pure, homogène depuis la nuit des temps, et sa lignée impériale remonterait à la déesse Amaterasu. Le Japon serait, en quelque sorte, une « nation organique » (« Cent millions d'hommes, une seule pensée »), à la différence des nations occidentales, fondées, elles, sur un contrat (la loi) négocié entre des groupes divers. La nation et l'État se confondraient ainsi dans un « État-famille », que la démocratie représentative dénaturerait. Il en résulterait une supériorité multiforme : des vertus personnelles et civiques (zèle, frugalité, patience, consensualité, respect, obéissance) et une éthique qui transcende le matérialisme. Mais sa différence exposerait sans cesse le Japon aux agressions du monde extérieur, contre lequel il doit protéger son kokutai..
Cette idéologie a été mise à mal par la défaite de 1945, la démocratisation et l'ouverture sur le monde, mais elle nourrit encore une abondante littérature (le nihonjinron) et imprègne certains aspects des mentalités.
La société japonaise se caractérise par la structuration de très nombreux champs d'activité en groupes de type semi-familial, hiérarchiques et autoritaires, mais aussi très conviviaux. L'individu y est parfois qualifié de « contextuel », dans la mesure où il apparaît secondaire par rapport aux obligations qui découlent de son appartenance à ces groupes. On qualifie ceux-ci de « verticaux », par opposition aux groupes « horizontaux » (classes sociales), qui prédomineraient en Occident. Ils ont conféré au Japon une très forte capacité de mobilisation et d'organisation, pour la guerre comme pour la paix.
5.2. L'évolution des années 1980-1990
Depuis les années 1980 les défauts de ce modèle sont de plus en plus apparents: étouffement de l'initiative personnelle et de la créativité, faible notion du bien public, confiscation de la décision, gérontocratie. Le système des valeurs traditionnellesse se délite et les conduites se rappochent de celles de l'Occident : montée du célibat et du divorce notamment. Les critiques se font plus violentes contre la « société corsetée » (kanri shakai) et ses gardiens, l'Administration.
L'importance des réseaux (nettowaku) symbolise l'évolution vers un modèle social fondé sur des appartenances librements consenties, de même que la multiplication des jeunes attachés à un mode de vie précaire. On observe également d'importants changements dans la vie des femmes, notamment du point de vue professionnel.
Parallèlement la confiance dans les élites politiques a été fortement entamée durant la crise des années 1990.
Pour en savoir plus, voir les articles géographie physique du Japon et activités économiques du Japon.