Les nouvelles orientations de la PAC
Avec la mondialisation des économies, la libéralisation des échanges commerciaux et l'impératif de la loi du marché, les données du problème agricole français ont changé, qu'il s'agisse du rôle des exportations de produits alimentaires ou de la politique de l'environnement et du réaménagement rural.
Face à l'offensive américaine à caractère libre-échangiste, la Communauté européenne, dans son projet de réforme de 1997 de la politique agricole commune (PAC), défendait une stratégie fondée systématiquement sur la baisse des prix et la recherche d'une meilleure compétitivité sur le marché mondial. L'idée sous-tendant cette stratégie était d'éviter que les exportations de produits agricoles – principal atout de l'agriculture française – ne baissent. De son côté, le gouvernement français est parti d'un autre point de vue : dans son projet de loi agricole du 10 juin 1998, il vise en effet à organiser « la triple fonction des agriculteurs d'aujourd'hui, économique, sociale et environnementale, et aussi à limiter la concentration des exploitations au profit des agriculteurs les plus productifs ou les plus aisés ». Il s'est ainsi fixé des objectifs qui, sans être en opposition avec le projet communautaire, le complètent, en prenant en compte d'autres réalités.
Le 16 juillet 1997, la Commission européenne présentait les grandes orientations de la réforme de la politique agricole commune préconisée pour 1999. Cette réforme, qui s'inscrit dans la même logique que celle de 1992, vise à intégrer dans les meilleures conditions l'agriculture européenne aux marchés mondiaux. À cet effet, la Commission propose, notamment, d'introduire dans le dispositif européen de nouvelles doses de baisse des prix garantis afin de rapprocher ces prix du niveau des cours mondiaux. De son côté, le gouvernement français veut mettre en place « une gestion contractuelle » de la politique agricole et des financements qui y sont liés. Il entend également s'occuper de la mise en valeur du monde rural, soit par des activités agricoles proprement dites, soit par des actions en faveur de la qualité des produits, de l'environnement – par exemple, le paysage – ou du patrimoine.
Une vocation exportatrice
Dès 1992, date de la première réforme de la PAC, la Commission de Bruxelles s'est engagée dans une politique cherchant à consolider la position des produits agricoles européens dans le commerce international. En effet, dans un arrière-plan de libéralisation des échanges et de très vives pressions américaines pour garder ou conquérir des parts du marché mondial des produits agricoles, l'Europe doit se rapprocher du niveau des cours internationaux et, par conséquent, baisser les prix garantis payés aux agriculteurs. Bruxelles a donc décidé une baisse de 35 % du prix garanti des céréales, une diminution compensée par des aides à l'hectare. Alors que les agriculteurs redoutaient une dégradation de leurs revenus, les deux objectifs avoués de cette réforme – baisse des cours des matières premières agricoles et lutte contre les excédents agricoles, notamment par l'introduction de la jachère obligatoire – ont été plus que remplis. Cependant, si les revenus des agriculteurs de l'Union européenne se sont sensiblement accrus, il n'en demeure pas moins que des disparités de revenus importantes persistent selon les productions – la réforme a essentiellement profité aux grandes cultures et a pénalisé les producteurs de viande bovine ; la répartition inéquitable des primes a favorisé la course à l'agrandissement des exploitations – plus 25 % entre 1993 et 1997 pour les exploitations céréalières en France. De plus, les terres libérées à la vente, souvent faute de successeurs, sont rachetées par les proches voisins, ce qui contribue également à cette « course » à l'expansion des exploitations. Enfin, Bruxelles a mis en place un arsenal de soutiens directs destiné à prévenir une chute grave de revenus de certaines catégories de producteurs (subventions à la vache allaitante, à l'hectare de tournesol ou de maïs irrigué).