À l'opposé de ces soubresauts, M6 a largement confirmé son image de « petite chaîne qui monte ». Après avoir enregistré des pertes significatives de 1987 à 1992, la chaîne dégage 300 millions de bénéfices en 1994 en valorisant sa stratégie propre, basée sur le refus de confrontation avec TF1 et France 2. En diffusant des programmes coûteux, M6 bénéficie de la disparition de La Cinq, atteignant une audience moyenne de 12 % et une part de marché publicitaire de 14,9 %. En conséquence, M6 introduit 9 % de son capital sur le second marché de la Bourse le 28 septembre.

Presse écrite

La grande glissade

Dépôt de bilan, liquidation judiciaire, arrêt des suppléments gratuits, nouvelles formules, autant de signes derrière lesquels se cache de plus en plus mal la crise récurrente de la presse écrite qui, à quelques exceptions près, se porte mal.

Ni le renouvellement de la maquette, ni la baisse du prix de 6 à 4 francs, pas plus que le retour de Dominique Jamet n'auront pu sauver le Quotidien de Philippe Tesson, dont le dernier numéro est paru le 5 juillet. Malgré l'arrivée du GAN, un partenaire solide, l'augmentation de capital nécessaire à la relance du journal n'a pu être bouclée. Et, si la baisse du prix a fait gagner 10 000 lecteurs, il en a manqué 20 000 de plus afin d'atteindre le point d'équilibre des 60 000 lecteurs.

La situation du groupe Hersant ne semble guère confortable, avec un endettement estimé à 4 milliards de francs. Devant un tel gouffre, le Crédit Lyonnais, guère mieux loti, a retiré son soutien à Robert Hersant en juin. Face à l'urgence de la situation, le patron a repris son empire en main, se séparant de son bras droit Philippe Villin et annonçant la suppression des suppléments gratuits de France-Soir. En effet, si le Figaro se porte correctement, l'autre grand quotidien du groupe n'en finit pas de s'effondrer, perdant 12 % de lecteurs en deux ans et affichant pour l'année 1994 des pertes de plus de 100 millions de francs. Il est cependant évident que, à quelques mois des élections présidentielles, Robert Hersant, réélu au parlement de Strasbourg, trouvera de quoi boucler ses fins de mois auprès de banquiers amis de la majorité. À terme toutefois, certains qui connaîtraient le dossier économique du groupe affirment sans ambages que « cela finira devant le tribunal de commerce ».

Si les hebdomadaires traversent également une passe difficile, le Point et l'Express, propriété d'une filiale d'Alcatel, la Générale occidentale, dirigée par François Sampermans, tirent assez bien leur épingle du jeu. Avec une nouvelle maquette et un prix abaissé de 20 à 15 francs, le Point gagne 30 % sur ses ventes de 1993 (300 000 exemplaires), tandis que l'Express affiche une diffusion de 435 000 exemplaires en 1993. L'annonce, fin septembre, de l'arrivée de Christine Ockrent à la direction de la rédaction de l'Express fait donc l'effet d'une bombe, d'autant qu'elle s'accompagne du départ de l'équipe de Yann de L'Écotais, en place depuis 1987, laquelle est loin d'avoir démérité. En fait, l'objectif de ce changement à la tête de l'hebdomadaire vise à introduire la Générale occidentale dans le monde de l'audiovisuel, sur le câble, la radio et les chaînes thématiques. Un univers familier à Christine Ockrent.