Parmi ceux-ci, le Prozac, sorti en France en 1989, est aujourd'hui l'antidépresseur à la mode (20 % du marché). Outre un lancement commercial particulièrement efficace, il a, selon ses adeptes, des atouts indéniables : prescrit pour les dépressions d'intensité moyenne, il est en général mieux toléré que d'autres pilules de ce type et ne provoque pas d'accoutumance. Le succès du Prozac est tel que les spécialistes se sont penchés sur une dérive qui conduirait à le prescrire dès qu'une situation s'avère un tant soit peu douloureuse pour le patient. Les risques d'un déséquilibre de la personnalité peuvent alors surgir, d'autant plus inquiétants qu'un médicament qui semble anodin se prend plus facilement. Le plus sage serait peut-être de former ceux qui prescrivent cette « pilule du bonheur ».
L'ouvrage du professeur Édouard Zarifian Des paradis plein la tête, aux éditions Odile Jacob, analyse intelligemment les causes et conséquences de cette surconsommation chronique de médicaments psychotropes.
Les bonnes manières en hausse
La prolifération des manuels de savoir-vivre publiés cette année dans l'édition n'est sans doute pas un hasard. Loin des poussiéreux ouvrages qui s'étendaient sur la façon de découper un homard ou celle de recevoir à sa table un ecclésiastique, ces traités des bonnes manières revus et corrigés s'attachent plutôt à nous réapprendre les relations harmonieuses en communauté, le respect envers les autres, la politesse et une foule de petites vérités qui facilitent les rapports humains ; bref, tout ce qui, autrefois, était une évidence. Au lieu de ne répondre qu'à une angoisse de classe sociale, le savoir-vivre « moderne » voudrait renouer avec un lien convivial souvent distendu. Mais, si les temps ont changé, les traditions ont la vie dure, et ces livres ne se sont pas encore complètement débarrassés d'une morale de classe qui n'a rien à voir avec la morale universelle.
La japanimation, une nouvelle religion
Après les dessins animés, mis à la mode en France par Dorothée, et les jeux vidéo, la bande dessinée nippone fait fureur dans la jeune génération. Les mangas, bandes dessinées en noir et blanc d'un format poche, s'ajoutent aux rami-cards, images de la taille d'une carte à jouer à l'effigie des héros d'une manga ou d'un dan (dessin animé), pour compléter la panoplie des « otakus » : avec leurs boutiques spécialisées, leurs serveurs et leurs grands rendez-vous, ces fans de l'univers nippon s'enferment (au propre comme au figuré) dans un univers virtuel. Il y a autant d'otakus que de supports, manga-otaku, computer-otaku, animé-otaku, etc. Avec le sens du commerce qui les caractérise, les Japonais exploitent chaque personnage-culte de dessin animé et bande dessinée sur plusieurs supports : jouets, vêtements, musique... jusqu'à ce que l'idolâtrie s'épuise et qu'un nouveau personnage entre en scène. Ainsi, les objets des boutiques spécialisées (4 à Paris, vente par correspondance en province) se renouvellent constamment pour assouvir la passion des otakus.
Aude de Tocqueville