Dans cette optique, le gouvernement prévoit aussi de mettre en place un conseil scientifique composé de personnalités françaises et étrangères, un peu sur le modèle du Club de Rome des années 1970. Ce conseil pourrait prendre la forme d'une fondation.

La décentralisation

Cette année, les collectivités locales ont continué à prendre une importance croissante aussi bien dans l'économie que dans la vie politique française en général. Crise des lycées, mise en œuvre du revenu minimum d'insertion (RMI), construction de routes ici, fermeture (par Air France et pour des raisons financières impérieuses) de liaisons aériennes là : les Régions, les départements ou les villes sont souvent en première ligne.

Il est vrai que l'État tend de plus en plus à se « désengager » d'actions qui étaient traditionnellement les siennes et à se tourner vers les collectivités locales pour qu'elles prennent le relais. Un exemple : la décision prise par le gouvernement, à l'automne, de construire une cinquième école d'ingénieurs à Nantes implique, pour les collectivités concernées (ville, département de Loire-Atlantique, Région des Pays de la Loire), un effort financier considérable de quelque 250 millions de francs.

Sollicitées de plus en plus fréquemment, les collectivités ont vu, cette année encore, leur budget augmenter fortement. Globalement, les dépenses auront progressé de 10,2 %, soit (en tenant compte de l'inflation) de 7,5 % en volume, c'est-à-dire trois fois plus que l'économie française en général. Les recettes fiscales ont progressé du même ordre de grandeur et même de 13,3 % pour les rentrées de taxe professionnelle payée par les entreprises, illustrant de ce fait la bonne santé relative de l'économie.

Au chapitre toujours sensible de la fiscalité, on remarquera que ce sont les impôts régionaux qui progressent le plus vite, puisque le produit des quatre taxes directes (taxe professionnelle, foncier bâti, foncier non bâti et taxe d'habitation) a fait, en 1990, un bond de 20,2 % dans les Régions, de 9,5 % dans les départements et de 9,4 % dans les communes.

Auprès du ministre de l'Intérieur Pierre Joxe, un nouveau ministre a pris en charge le dossier des collectivités territoriales. Il s'agit de Philippe Marchand, avocat, député socialiste de Charente-Maritime, qui a aussi dans ses attributions la sécurité civile. Le 17 juillet, il a remplacé Jean-Michel Baylet, nommé ministre délégué au Tourisme.

Quelques réformes fondamentales

Pour donner un sens concret à la politique de la ville dont a été chargé Michel Delebarre, nommé ministre d'État le 21 décembre, et pour introduire plus de justice entre villes riches et villes pauvres, le gouvernement a préparé des dispositions financières et fiscales contenues dans un projet de loi sur la péréquation intercommunale. Il s'articule en deux volets.

Le premier organise une modification des critères d'attribution aux communes de la DGF (dotation globale de fonctionnement) versée chaque année par l'État et qui représente une somme de 66,6 milliards de francs en 1990. Sur cette enveloppe, 400 millions en 1991 et 1 milliard en 1993 seront affectés à une « dotation de solidarité urbaine » pour les communes les moins fortunées et celles qui ont sur leur territoire de nombreux logements sociaux.

Le second, propre à l'Île-de-France, prévoit de prélever une « dîme » sur les impôts locaux des 50 villes les plus riches de la région pour en redistribuer le produit aux 120 plus déshéritées.

Le cumul de ces deux dispositifs aboutit à priver la seule ville de Paris de quelque 500 millions de francs. Jacques Chirac et la majorité des maires des Hauts-de-Seine (un département bien pourvu) n'ont pas tardé à réagir et à considérer le projet gouvernemental − présenté comme une manifestation de solidarité − comme une véritable déclaration de guerre...

Au plan législatif, plusieurs textes auront marqué l'année écoulée. Le 30 juillet a été publiée une loi relative à la révision générale des évaluations des immeubles qui servent à établir les bases des impôts directs locaux. Il s'agit d'une réforme et d'une mise à jour indispensables, dans le cadre de la recherche de la vérité des prix. En effet, la dernière révision remonte à 1961 pour l'impôt sur le foncier non bâti et à 1970 pour le foncier bâti. Or, la valeur locative des immeubles est une des références clefs de la fiscalité locale et des dotations et transferts que l'État verse à ces collectivités. Il était donc urgent de mettre ces bases en adéquation avec la réalité du marché locatif. Ces révisions représentent un travail de bénédictin qui s'étalera jusqu'à fin 1992. Les services du ministère ne pourront passer au peigne fin les 37 millions de locaux et les 97 millions de parcelles. On tiendra donc compte du classement existant chaque fois qu'il apparaîtra satisfaisant. Mais, pour les locaux professionnels, l'évaluation sera entièrement revue. De même, les logements sociaux actuellement surtaxés − car ce sont des constructions récentes pourvues d'éléments de confort pourtant normaux (baignoires, vide-ordures...) − feront l'objet d'une reclassification séparée.