Ce mouvement, comme le précédent, est inconnu de tous les milieux policiers ou politiques.
Coup de théâtre, le 14 juin : Hector Aristy, un ami de la famille qui, depuis le début de l'affaire, s'est institué médiateur entre les ravisseurs et la famille Revelli, est arrêté puis inculpé.
Piétinement
La personnalité d'Aristy est assez trouble : d'origine dominicaine, il fut pour les uns un authentique résistant à la politique de Trujillo, pour d'autres un opportuniste, un aventurier international. Chassé du Chili par Allende, il est accusé par les mouvements révolutionnaires de ce pays d'être à la solde de la CIA. Il était, à Paris, attaché à une société d'export-import, l'IFATCO, en qualité de conseiller économique.
Plusieurs contradictions dans ses déclarations ont amené la police à le placer au premier rang des suspects. Dans les derniers jours de juin, le mystère s'épaissit encore, bien qu'on apprenne qu'une partie de la rançon a été déposée dans des banques en Suisse. L'enquête chemine visiblement avec difficulté ; les interrogatoires d'Aristy, du fils de la victime, et des interpellations à Gênes, en Italie, n'apportent aucune lumière nouvelle.
Soudainement, la nouvelle éclate : le P-DG de Fiat-France, L. Revelli-Beaumont est relâché par ses ravisseurs ; 90 jours exactement après son enlèvement.
Audacieux cambriolages de banques à Nice et à Paris
Stupeur suivie d'accablement pour le directeur de la banque de la Société Générale de Nice, le lundi 20 juillet 1976, lorsqu'il entre dans la salle des coffres : un vrai chantier, des reliefs de repas, des photos pornographiques épinglées aux murs, et, détail plus grave, 317 coffres béants... vides !
Lui qui, quelques jours plus tôt, avait distribué à ses clients un tract ainsi rédigé : « Partez en vacances sans soucis, louez un coffre à la Société Générale. »
Film
Estimation approximative du vol : 50 millions de F. Très vite, la police s'active et reconstitue le film des opérations. Une dizaine de gangsters ont participé au casse. Ils ont percé la cloison de la salle des coffres, après avoir creusé un tunnel de huit mètres à partir de la canalisation des égouts d'une rue voisine. Ils n'ont pas lésiné sur le matériel : chalumeaux, bouteilles d'oxygène, équipement électrique, pinces en tous genres, pelles, pioches, et même, summum de la technique, une lance thermique, le tout représentant une tonne de charge ! Et puis des vivres en abondance : de quoi pique-niquer confortablement pendant plusieurs jours. Une fois dans la place, ils ont travaillé méthodiquement, ne prenant dans les coffres que ce qui était facilement négociable.
Électriciens, soudeurs, égoutiers, maçons ont d'abord accompli en sous-sol un rallye de deux semaines pour arriver à pied d'œuvre. Le matériel a été transporté en camionnette, puis halé sur un canot pneumatique. Le plus dur a été le creusement d'une galerie de huit mètres (dont on ne retrouvera même pas les déblais) et, enfin, le percement d'un épais mur de béton. L'évacuation du butin n'est pas non plus chose aisée. Mais, pour laisser tout de même un « bon souvenir », les visiteurs affichent sur le mur une feuille où l'on peut lire : « sans armes, ni violence, ni haine ».
Dans les minutes qui suivent le premier communiqué de presse, c'est l'affolement des clients de la Société Générale qui viennent aux nouvelles. La direction s'efforce de mettre de l'ordre et de calmer les esprits, mais comment établir un bilan des valeurs disparues quand on ignore ce que contenaient réellement les coffres ? Il faudra se baser sur les déclarations sur l'honneur, et parfois réticentes, des clients. Une prime d'un million de F est offerte à qui permettra de retrouver les voleurs. Mais les enquêteurs manquent d'indices, et, quinze jours après le fric-frac, aucune piste ne se dessine.
Moins d'un mois après l'aventure niçoise, l'agence parisienne de l'île de la Cité reçoit à son tour la visite des égoutiers. Ils choisissent d'opérer pendant le long week-end du 15 août. Même technique, même matériel également acheminé par les égouts. Des bruits sourds ont intrigué des voisins, mais les policiers venus sur place n'ont rien trouvé d'anormal... Cette fois, la direction de la banque ne précise pas le montant des sommes et valeurs prélevées.