Les syndicats ouvriers et patronaux qui gèrent les Caisses souhaitent également conserver l'autonomie de la Sécurité sociale, mais réclament les moyens d'assurer son équilibre financier : le poids des cotisations prélevées sur les salaires a atteint une limite qui ne peut plus être dépassée, mais il est possible, en revanche, de budgétiser les charges indues.
Assiette
À plusieurs reprises, le gouvernement s'est engagé à rechercher les moyens de calculer différemment les charges supportées par les entreprises employant beaucoup de main-d'œuvre et ainsi soumises à de plus lourdes cotisations. Le rapport Granger, rédigé en 1975, avait suggéré d'élargir l'assiette des cotisations à d'autres éléments d'exploitation de l'entreprise, comme la valeur ajoutée.
En fait, le gouvernement veut conserver l'assiette salariale, mais la corriger par un mécanisme permettant de mieux proportionner les prélèvements sur les entreprises à leurs charges de salaires. Progressivement devraient donc être effacées les disparités qui existent entre les branches par un système tendant à rapprocher le poids des cotisations d'une moyenne nationale (fixée à 23-24 % de la masse salariale de l'entreprise).
Solidarité nationale
C'est la solution qui est la plus régulièrement invoquée. C'est celle qui est la plus difficile à mettre en pratique. Elle suppose la compensation généralisée de toutes les charges au sein d'un régime unique de prévoyance ; celui-ci doit voir le jour le 1er janvier 1978 et assurer une protection sociale minimale à tous les Français.
La Sécurité sociale, en effet, est une véritable tour de Babel. À côté d'un régime dit général, regroupant aujourd'hui 14 millions de salariés, se sont maintenus ou créés depuis trente ans des régimes spéciaux de salariés (EGF, fonctionnaires, marins, RATP, etc.) (Journal de l'année 1967-68) ou des régimes de non-salariés, qui n'arrivent plus à équilibrer leurs charges et vivotent.
Les salariés assurés du régime général ne sont pas hostiles à l'institution d'un système unique de Sécurité sociale à vocation universelle. C'était déjà l'ambition des pères de la Sécurité sociale en 1946. Mais ils estiment aussi que cette compensation généralisée des charges entre tous les régimes existants est impossible aujourd'hui en l'absence d'une répartition équitable de l'effort contributif entre toutes les catégories socioprofessionnelles.
À prestations égales, disent-ils, cotisations égales... On en est loin, comme l'ont montré les conclusions du rapport Grégoire.
Une réforme complète de la Sécurité sociale se heurte ainsi à la multiplicité des régimes d'assurance, à l'autonomie et aux avantages acquis par chacun depuis trente ans. Chacun dit oui à la solidarité nationale, mais en comptant sur le voisin pour la payer.