Il s'agit pourtant d'une des pierres de touche du système éducatif : la qualité de l'enseignement dépend avant tout de la manière dont sont formés (ou ne sont pas formés) les maîtres. Préparée de longue date, une réforme des concours qui vise à introduire une meilleure préparation concrète au métier d'enseignant (formation pédagogique) fait l'objet de nombreuses critiques. Après avoir annoncé qu'elle entrerait en vigueur en 1972, le ministre décide finalement de la reporter d'un an et de la remettre sur le chantier.

La création projetée d'instituts de formation des maîtres recrutant leurs élèves deux ans après le baccalauréat, mais pas au-delà, a suscité des réactions hostiles. Les présidents d'universités craignent que leurs étudiants du deuxième cycle perdent tout espoir de trouver des débouchés, au moins virtuels. L'agitation que ce projet commence à susciter dans certaines facultés des lettres a fini par persuader le ministre que sa réforme risque de provoquer plus de problèmes qu'elle n'en réglera, faute d'une concertation suffisante. En attendant, les enseignants continueront à être recrutés par concours (CAPES et agrégation) ou sans formation (maîtres auxiliaires).

Les écoles normales

La rénovation des écoles normales d'instituteurs s'est poursuivie. Commencée en 1968, elle s'est traduite par la suppression progressive des classes préparatoires au baccalauréat, les places ainsi libérées devant servir à accueillir, pour des stages de longue durée, des instituteurs remplaçants recrutés sans aucune formation pédagogique.

D'autre part, la période de formation professionnelle des instituteurs (après le baccalauréat) a été progressivement allongée. À partir de 1970-71, elle est de deux ans. Au cours de la deuxième année, les futurs instituteurs prennent la direction d'une classe, dont le maître titulaire peut ainsi bénéficier de stages de recyclage à l'école normale du département.

Toutefois, la mise en place de ces réformes, qui doivent aboutir à donner à une plus grande proportion d'instituteurs une véritable formation (en 1970-71 un instituteur sur cinq enseignait sans avoir reçu aucune formation), a été plus lente que prévu.

Obstacles psychologiques : de nombreux élèves des écoles normales n'ont pas accepté la disparition des classes « pré-bac » et l'obligation qui leur est faite désormais de suivre des études au lycée.

Obstacles financiers : l'organisation de stages pour les instituteurs déjà en fonction nécessite l'engagement de frais importants et le versement d'indemnités (notamment de déplacement) que l'insuffisance du budget n'a pas permis de couvrir entièrement.

Des dispositions ont encore été prises visant à rendre moins sévère le régime intérieur des écoles normales d'instituteurs : l'obligation faite aux normaliennes d'être célibataires a été levée.

La maternelle

Un enfant sur deux âgé de trois ans a suivi, en 1971-72, l'enseignement de l'école maternelle. Au total, plus de 1 800 000 enfants de deux à six ans ont fréquenté ce qu'on appelle aussi, et peut-être à tort, le « préscolaire ».

Pourquoi ce développement incessant de la proportion d'enfants de tous les milieux ainsi scolarisés avant le début de l'obligation scolaire ? manque de garderies ? développement du travail féminin ?

Des enquêtes très précises réalisées dans certains quartiers de Paris démontrent que si tant de parents inscrivent leurs enfants dans les maternelles, c'est par volonté de leur donner dès leur plus jeune âge « des chances pour la vie ». Les psychologues sont unanimes : la maternelle est un facteur déterminant dans le développement intellectuel, affectif et social de l'enfant. On assiste donc à ce phénomène relativement nouveau d'une forte poussée de la demande en éducation à laquelle l'État ne peut pas toujours répondre.

L'école à deux ans

L'évolution des esprits est très rapide. Des associations, créées en 1970, mettent déjà à leur programme la revendication de l'obligation scolaire à deux ans, étant entendu que cette obligation s'applique à l'État, dont on attend qu'il fournisse les locaux et les maîtresses adaptées en nombre suffisant. Ce n'est malheureusement pas encore le cas.