Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Testament (Ancien et Nouveau) (suite)

Le monothéisme. En réaction contre la tentation syncrétiste des Israélites aux prises avec les cultes idolâtres de Canaan, les prophètes se posent en champion du monothéisme. Israël reconnaissait bien que Yahvé était le plus puissant des dieux et réclamait un culte exclusif, mais il acceptait aussi l’idée que d’autres peuples pouvaient avoir d’autres dieux, dont il n’était pas inutile, en certaines circonstances, de s’assurer les faveurs. Dans l’optique du message prophétique, Yahvé seul est Dieu. Maître de l’histoire, il dirige les destinées de tous les peuples. Il ne laisse pas de place aux autres dieux, et sa transcendance est fortement exprimée au chapitre vi d’Isaïe : « Saint, saint, saint est le Seigneur. »

• La doctrine de l’Alliance. Point fondamental du credo israélite, rappelé avec vigueur dans le Pentateuque et les écrits historiques, la doctrine de l’Alliance est un des grands thèmes de la prédication des prophètes. Dieu a choisi Israël pour en faire son peuple. Yahvé est un vigneron qui met tous ses soins à son vignoble : le vignoble est le peuple élu. Ce symbole de la vigne, cher à Isaïe (v), sera repris par Jérémie et Ézéchiel ; il trouvera un écho dans les Évangiles avec la parabole des vignerons homicides (Matthieu, xxi). Yahvé est le berger qui conduit son troupeau, le père qui aime son enfant, l’époux qui s’attache à son épouse. L’Évangile parlera du Bon Pasteur (Matthieu, xviii, et Jean, x). La doctrine de l’Alliance, notion juridique, passe sur le plan de la vie et du cœur.

• Les impératifs moraux. Les manquements répétés d’Israël à la loi divine sont une atteinte à la sainteté transcendante de Yahvé (Isaïe), à sa justice (Amos), à son amour (Osée). Jérémie vit dans la hantise du péché. Le grand jugement du jour de Yahvé sera le châtiment qu’appelle ce débordement du mal. Le péché collectif du peuple entraîne une sanction collective. Pourtant, l’idée de rétribution individuelle et de responsabilité personnelle qui apparaîtra clairement dans le judaïsme post-exilien commence à se faire jour. « En ces jours-là on ne dira plus : les pères ont mangé des raisins verts et les fils en ont les dents agacées » (Ézéchiel, xviii). Dans le même sens, la conception de la religion et du culte s’affine. Jérémie (xxxi) met l’accent sur la religion intérieure, celle du cœur. Pour lutter contre cette religion du rite, Isaïe et Michée réaffirment constamment l’importance des dispositions intérieures. Le culte « en esprit et en vérité » qu’enseignera Jésus à la Samaritaine est au bout du chemin tracé par les prophètes.

• Les temps nouveaux et le Messie. Dans la vision prophétique, les promesses divines se réaliseront progressivement dans l’histoire en attendant leur accomplissement final. La conception du temps dans la perspective des prophètes n’est pas cyclique, comme dans la pensée grecque, mais linéaire, c’est-à-dire qu’il tend vers un terme : l’histoire s’achemine vers un but, une fin dernière qui fait l’objet de l’espérance d’Israël. L’évocation de ce terme ultime constitue l’eschatologie (du grec ta eskhata, les choses dernières). Les infidélités du peuple ne peuvent empêcher l’accomplissement du plan divin. Le châtiment qui atteint Israël n’a pas un but répressif, mais purificateur. Dans le développement de l’histoire, après chaque épreuve, un « reste survivra » (Isaïe, iv), qui sera pour chaque époque le germe nouveau d’un peuple à qui l’avenir est promis. Ce sera une ère de bonheur dans une Terre sainte retrouvée, où se réalisera le règne de Yahvé non seulement en Israël, mais sur toutes les nations du monde. L’établissement et le gouvernement du royaume de Yahvé seront assurés par l’Oint de Yahvé, en hébreu Messie. Celui-ci sera de la lignée de David (Isaïe, xi, 1). On l’appellera « l’Emmanuel », c’est-à-dire Dieu avec nous (Isaïe, vii, 14). L’idée messianique survivra à tous les désastres de l’histoire d’Israël et sera l’élément moteur qui animera l’espérance nationale. Le christianisme verra en Jésus le Messie attendu qui réalise en sa personne et en son œuvre les oracles prophétiques.


Les livres sapientiaux

Au déclin du prophétisme s’annonce la littérature de sagesse. Elle n’est pas spécifique au peuple hébreu. En Égypte, en Mésopotamie, en Phénicie, on a compose des fables, des maximes, des proverbes, des sentences ou des poèmes moraux. Cette tradition sapientielle s’acclimata en Israël au temps de Salomon. Cependant, la littérature de sagesse n’était guère représentée que par quelques florilèges de sentences.

Mais au ve s. apparaît une importante collection, le livre des Proverbes, manuel de l’art de vivre à l’usage de ceux qui veulent avoir une vie heureuse. Toutefois, cette sagesse n’est pas purement séculière. La crainte de Dieu, c’est-à-dire la religion, est la source de la véritable sagesse (i, 7).

Vers la même époque, le livre de Job, chef-d’œuvre de poésie orientale, pose un problème qui tourmente encore bien des esprits : il y a des justes qui sont malheureux et des méchants qui sont heureux. Comment le concilier avec la justice et la toute-puissance de Dieu ? Le livre ne résout pas l’irritant problème du mal. Il est une invitation à la foi héroïque : on ne justifie pas Dieu, on s’incline devant lui, alors même qu’on est écrasé par un mystère que la raison ne peut éclairer.

Au iiie s., Job trouve une suite dans l’œuvre d’un sage qui se dissimule sous le pseudonyme de Qohelet, en grec l’Ecclésiaste, c’est-à-dire le Prédicateur. Le point de départ de sa réflexion n’est pas le problème du mal, mais le sentiment qu’il a de la vanité des choses humaines : « Vanité des vanités, tout est vanité » (i, 2). La vie est décevante, gloire, amour, richesse, justice, sagesse même ; tout mène à la mort et y trouve sa fin. Mais l’Ecclésiaste est un croyant. Et, s’il est déconcerté par le tour que Dieu donne aux affaires des hommes, il considère que Dieu n’a pas de comptes à rendre et qu’il faut accepter comme venant de lui la vie telle qu’elle est. Tout cela fait partie du mystère de Dieu.