Journal de l'année Édition 1999 1999Éd. 1999

Une seule année... Chaque mois apporte un autre rebondissement : le procès de Paula Jones, une ancienne fonctionnaire de l'Arkansas qui réclamait à Bill Clinton des indemnités pour harcèlement sexuel, se solde par un non-lieu, mais le président préfère payer ; Hillary Clinton accuse Kenneth Starr de participer à un complot d'extrême droite contre son mari ; le procureur révèle qu'il détient des messages laissés par le président sur le répondeur de Monica Lewinsky.

Succès et tragédies

Pourtant, l'histoire du monde en 1998 ne se résume pas à l'unique saga du « Monicagate ». Chaque continent a son lot de succès et de tragédies, qui ne sont imputables en rien aux aventures de Bill Clinton.

Par exemple, en Afrique : au Congo, Laurent-Désiré Kabila n'a pas le temps de jouir de sa victoire sur Mobutu un an plus tôt. Ses alliés tutsis du Rwanda et de l'Ouganda se font trop encombrants. Mais, lorsqu'il tente de les renvoyer, ces « armées amies » organisent la rébellion dans les provinces orientales du pays. En août, Kabila appelle au secours d'autres voisins : notamment l'Angola et le Zimbabwe, qui ne veulent pas qu'un démembrement de l'immense Congo se fasse à leurs dépens. La rébellion est liquidée, mais il faudra encore un sommet à Paris pour arracher un cessez-le-feu. Sur le continent noir, il y a aussi d'heureux événements. Le 8 juin, le général Sani Abacha, sanglant tyran du Nigeria, décède brutalement, frappé par une crise cardiaque. Son successeur, le chef d'état-major Abdulsalam Abubakar. promet d'instaurer la démocratie.

Même constat après l'enquête de l'Assemblée nationale sur le génocide du Rwanda. Elle permet de découvrir des vérités qui, à l'avenir, devraient éviter à la France de tragiques erreurs. La mission d'information créée le 3 mars, sous l'impulsion de Paul Quilès, clôt ses travaux par la remise d'un rapport, en décembre, qui absout Paris de complicité directe dans les massacres. Mais le document souligne que, selon le témoignage de Jean-Christophe Mitterrand, un temps chargé par son père de la cellule africaine de l'Élysée, la France a péché par « ignorance et suffisance ».

L'Algérie, elle, continue de souffrir, broyée dans l'engrenage du cycle infernal terrorisme-répression. Le 25 juin, le chanteur Lounès Matoub, qui symbolisait l'identité kabyle, est assassiné par un commando se réclamant de l'intégrisme. Mais beaucoup de ses amis accusent le pouvoir, qui craint les aspirations des Kabyles à l'autonomie. Ils soulignent la coïncidence de l'entrée en vigueur de la loi sur la généralisation de la langue arabe, le 5 juillet, une semaine après l'assassinat de Lounès Matoub.

La sauvagerie n'est pas propre au tiers monde. Avant que l'accord de paix ne soit accepté en Ulster, il a fallu deux tragédies. Le 12 juin, trois enfants catholiques sont brûlés vifs quand un groupe de protestants met le feu à leur maison. Le 15 août, la voiture piégée que font sauter des terroristes catholiques fait 28 morts et 220 blessés dans la petite ville d'Omagh. Rien ne va plus en Russie. Le 20 mars, Boris Eltsine révoque son Premier ministre Viktor Tchernomyrdine, le vice-président ministre Anatoli Tchoubaïs et le ministre de l'Intérieur Anatoli Kouliakov. Ayant à peine dépassé la trentaine, le nouveau Premier ministre, Sergueï Kirienko, annonce qu'il va enfin appliquer les réformes économiques souvent proclamées, jamais instaurées.

Kirienko ne tient que six mois. Partie d'Asie, en 1997, la crise financière a contaminé la Russie. Le gouvernement se résigne à la dévaluation du rouble, le 17 août. Quatre jours après, le rouble a perdu 29 % de sa nouvelle valeur. Le 23, Eltsine fait revenir Tchernomyrdine. La Douma lui refuse la confiance. Eltsine appelle le ministre des Affaires étrangères Primakov. Mais cet homme qui, serviteur de tous les caciques soviétiques depuis Khrouchtchev, prétend réussir la synthèse de l'économie étatique et du libre jeu du marché, n'avait pas encore convaincu les Russes en décembre. D'autres vedettes passent à la trappe : patron de l'Indonésie depuis trente-trois ans, le général-président Suharto est chassé du pouvoir le 21 mai, victime lui aussi de la crise financière. En Allemagne, Helmut Kohl est battu aux élections le 27 septembre. Après quatre mandats, le héros de la réunification allemande doit céder la place à Gerhard Schröder. La longue parenthèse des démocrates chrétiens se referme. Les sociaux-démocrates, qui reviennent avec les Verts, représentent une nouvelle Allemagne : celle qui, en janvier 2000, deviendra la « République de Berlin ».