La société néerlandaise Akzo-Enka produit aussi une fibre aramide sous le nom d'Arenka ou de Twaron et dispute à Du Pont de Nemours la propriété industrielle de ce type de matériau. Les deux firmes se sont lancées, cette année, dans un duel pour accroître leur production respective dans leurs unités de Richmond, en Virginie, et de Londonderry, en Irlande, pour Du Pont et la nouvelle unité d'Akzo installée à Emmen, en Allemagne fédérale.

De leur côté, les Japonais Asahi, Mitsui et Toray commencent à produire cette fibre aramide qui devrait envahir de nombreux secteurs industriels : pour la prochaine décennie, le marché mondial est estimé à 50 000 tonnes par an, soit un milliard de dollars de chiffre d'affaires, alors que la consommation européenne est actuellement de l'ordre de 3 000 tonnes. On peut donc s'attendre à de grandes manœuvres autour de cette « fibre jaune » promise à un bel avenir.

Les matières plastiques, qui ont connu, ces trente dernières années, les développements les plus décisifs, représentent aujourd'hui la plus grande famille de matériaux de synthèse : leur croissance moyenne restera de l'ordre de 5 p. 100 jusqu'à la fin du siècle.

Les experts d'Innovation 128 estiment qu'on ne devrait pas voir apparaître de nouveaux polymères de très grande consommation au cours de la prochaine décennie. L'évolution marquante sera surtout due à l'amélioration des polymères connus par le jeu de formulations, associations, alliages et renforcements. On peut prévoir les évolutions suivantes : une diffusion plus large de l'usage des thermoplastiques techniques ou techno-polymères spéciaux ; le développement des polymères stables à hautes températures ; l'utilisation de pseudo-alliages obtenus par mélange de deux polymères compatibles ; une croissance de l'emploi des films complexes se prêtant à réaliser des fonctions de barrière ou permettant de doser la perméabilité, notamment pour des applications dans l'emballage ; l'accroissement de l'emploi des composites pour des structures rigides ; l'introduction des thermoplastiques élastomères pour combler le vide existant entre caoutchouc et plastiques.

Notons le cas particulier des polymères à cristaux liquides dont les molécules sont susceptibles de s'auto-orienter les unes par rapport aux autres. On peut ainsi les comparer aux composites, la partie orientée jouant le rôle du renfort. Leurs principales propriétés sont : une bonne tenue en température 300 à 350 °C, associée à une excellente stabilité dimensionnelle et une grande résistance au choc. Parmi les premiers matériaux de ce type, figurent le Vectra de Celanese et l'Ultrax de BASF.

Il existe enfin toute une gamme de matériaux plastiques aux propriétés particulières : solubles dans l'eau (alcool polyvinyle) ou absorbeurs, certains poly-acrylamides stockent jusqu'à 400 fois leur volume d'eau : les applications sont intéressantes en agriculture. Les polymères piézoélectriques servent à réaliser des membranes de haut-parleurs ou de capteurs tactiles pour la robotique (peau artificielle du Laas-Toulouse) et les plastiques conducteurs sont réalisés à partir de films enrichis selon des techniques analogues à celles que l'on emploie pour le dopage du silicium en microélectronique. Ils sont appelés à de fructueux développements en affichage optoélectronique, stockage d'énergie électrique ou protection électromagnétique des systèmes électroniques...

Des alliages ultralégers

Les alliages de polymères sont enfin à l'origine d'une nouvelle famille de plastiques techniques à hautes performances ; cette technique d'association de matériaux existants est plus facile à mettre en œuvre que la création de molécules nouvelles. Voici quelques années, on ne connaissait que le Noryl, alliage de polyphénylène oxyde (PPO) et de polystyrène (PS), élaboré par General Electric Plastics. La palette s'est considérablement enrichie avec des mélanges ABS + PA (acrylonitryle-butadiène-styrène + polyamide), comme le Triax de Monsanto et le Prevex de Borg Warner. Notons aussi le Luranyl et l'Ultranyl (PPO + PS) de BASF... On améliore ainsi la tenue en température de l'ABS, qui peut résister à plus de 200 °C, et l'on obtient un meilleur comportement vis-à-vis du vieillissement ou des agressions chimiques. De tels matériaux intéressent les constructeurs d'automobiles pour mouler des pare-chocs (Daimler-Benz, Ford, Opel), des jupes ou des grilles de calandres (Peugeot 205 et 309), des enjoliveurs de roues ou d'ailes (Nissan), sans oublier les fabricants de matériels informatiques qui ont besoin de structures résistantes au choc et à l'élévation thermique.