Seule inconnue : l'impact que peut avoir dans les républiques soviétiques le retour des cercueils plombés des soldats tombés sous les coups de la résistance afghane. Même si, cinq ans après ce que les officiels afghans appellent « la deuxième phase de la révolution », personne ne s'attend à ce que les résistants l'emportent militairement, assurer l'ordre à Kaboul est devenu un cauchemar pour Moscou.

Thierry Dussard

Chine

Les séductions du modèle occidental

Quand les historiens se pencheront sur la Chine de l'année 1984 (l'année du Rat, ou de l'Abondance), ils diront : « Ce fut l'année où les Chinois furent saisis d'une frénésie de la réussite. Le système de responsabilité mis en place cinq ans auparavant par le numéro un chinois, Deng Xiaoping, les avait débarrassés de nombreuses contraintes du collectivisme ; le nouveau slogan enrichissez-vous leur avait rendu leur goût d'entreprendre. »

1984, c'est aussi l'année d'une offensive tous azimuts en direction de l'Occident. Car, comme l'affirme Deng Xiaoping : « Ce n'est pas derrière les portes fermées que nous réaliserons la modernisation de notre pays. »

Des paysans très enrichis

À l'aube de l'année 1984, le modèle soviétique a vécu. Le système de responsabilité permet aux paysans de vendre au marché libre la part de leur production qui excède le quota qu'ils se sont engagés à livrer à l'État. À la fin du mois de juillet, le nombre de produits soumis à un quota d'achat par l'État passe de 21 à 12. Parmi ces produits, le riz, le blé, le mais, les produits oléagineux et le coton. Un certain nombre de denrées, comme la viande de bœuf et de mouton, les œufs et la laine, sont désormais librement commercialisées.

Des parcelles de terre sont louées aux familles pour un minimum de quinze ans, et pour les cultiver, les paysans ont le droit d'engager autant d'ouvriers agricoles qu'ils le souhaitent. La terre reste cependant la propriété de l'État.

Le mot d'ordre gouvernemental « un enfant par famille » n'est pas suivi.

Beaucoup de paysans pauvres tuent leurs nouveau-nés de sexe féminin. Les autorités luttent énergiquement contre ce phénomène, véritable fléau national qui se perpétue depuis des millénaires. Les Chinois ont toujours préféré avoir des fils plutôt que des filles, parce que les garçons travaillent dans les champs et prennent soin de leurs parents dans leurs vieux jours. Les filles, elles, s'en vont vivre chez les parents de leurs maris.

Par ailleurs, les autorités décident de construire davantage de maisons de retraite pour les vieux qui n'ont pas d'enfants. En 1984, pour une population rurale d'environ 800 millions d'habitants, le pays ne compte que 11 000 maisons de retraite, dans lesquelles vivent 147 000 pensionnaires.

Pour lutter contre le chômage à la campagne, le Comité central du parti communiste donne le feu vert au développement des « activités subsidiaires », c'est-à-dire celles qui ne concernent pas la culture de céréales. Une grande partie de la main-d'œuvre paysanne, que la mécanisation a réduite au chômage, s'occupe ainsi à élever de la volaille, à fabriquer des pièces détachées pour les tracteurs ou se spécialise dans les transports.

Dans les régions fertiles, les paysans enrichis grâce à la nouvelle politique économique achètent des ordinateurs, des ULM et des appareils de télévision. Selon la presse chinoise, certains paysans disposent d'un revenu annuel de 100 000 yuans (environ 400 000 F). En 1978, avant la mise en place du système de responsabilité, 33,3 % des paysans avaient un revenu annuel inférieur à 100 yuans (400 F).

Lutte contre la bureaucratie

La frénésie de la réussite gagne les villes, car le système de responsabilité dans les entreprises signifie que les ouvriers ou les employés qui travaillent « avec ardeur » sont augmentés, et que les Chinois qui fondent leurs propres entreprises et qui réussissent s'enrichissent. Conformément aux directives du Premier ministre, Zhao Ziyang, dans son rapport adopté au mois de mai par l'Assemblée nationale populaire (le Parlement chinois), les directeurs d'usine peuvent non seulement fixer les salaires en fonction du rendement des travailleurs, mais aussi en fonction des bons ou mauvais résultats de leurs entreprises. Ils ont également le droit de licencier le personnel.