Journal de l'année Édition 1985 1985Éd. 1985

De leur côté, les indépendantistes corses du FNLC ont revendiqué plusieurs « nuits bleues » : dix-sept attentats par explosifs en Corse-du-Sud dans la nuit du 17 au 18 juin ; six explosions à Lyon dans la nuit du 3 au 4 octobre et neuf explosions à Marseille et Toulon dans la nuit du 10 au 11 octobre.

Pierre Mangetout

Euthanasie : le droit de choisir

Faut-il refuser la mort à des malades incurables ou des vieillards handicapés, victimes de grandes souffrances ? Ce débat sur l'euthanasie a resurgi dans plusieurs pays, en 1984, avant de faire l'objet, à Nice, du cinquième Congrès international des associations pour le droit de mourir.

Les médecins distinguent l'euthanasie « active » de l'euthanasie « passive ». La première suppose une intervention spécifique (piqûres, pilules) pour mettre fin aux jours de quelqu'un, alors que la seconde consiste, soit à soulager la souffrance en administrant de fortes doses de morphine qui peuvent hâter le décès, soit à mettre fin aux procédés de réanimation, soit encore à ne pas dispenser de soins.

Un pavé dans la mare

Un jésuite français, le père Patrick Vespieren, accuse en janvier certains services hospitaliers d'utiliser systématiquement des mélanges de drogues qui plongent le malade dans l'inconscience et accélèrent le processus de la mort. Ces « cocktails lytiques », affirmait-il, sont devenus la médication habituelle des derniers jours de la vie. La société française serait « sur la pente de l'euthanasie ».

Aux États-Unis, la Cour suprême de Californie déclare le 19 janvier irrecevable la demande d'une infirme motrice cérébrale de 26 ans, Elizabeth Bouvia. Celle-ci voulait « mourir de faim sous surveillance médicale », avec des médicaments analgésiques pour ne pas souffrir. Quelques jours plus tard, un juge de Los Angeles donne raison à des médecins hospitaliers qui ont attaché les mains d'un malade pour l'empêcher de débrancher son poumon artificiel : Laurence Weddington, âgé de 70 ans, atteint notamment d'un cancer pulmonaire, réclame le droit de mourir.

Prises de position sur l'euthanasie

Le projecteur se braque sur l'Allemagne fédérale en avril. Un chirurgien bavarois, le professeur Julius Hacketal, apparaît à la télévision en promettant du cyanure à une patiente ayant déjà subi treize interventions chirurgicales. Une information pour meurtre est aussitôt ouverte, et l'affaire fait grand bruit.

En France, à la veille du congrès de Nice, en septembre, cinq médecins français publient un appel en faveur de l'aide aux mourants. Un plaidoyer pour l'euthanasie ? Nullement, répliquent les intéressés. L'euthanasie n'est qu'un petit aspect de la question. Notre objectif est d'attirer l'attention des médecins sur les besoins des mourants et de faire savoir que des médecins sont prêts à les « accompagner » au moment de mourir. Les propos restaient suffisamment ambigus pour attiser le débat.

Deux médecins se partagent la vedette du congrès de Nice quelques jours plus tard. L'un, peu connu, le docteur Pierre Admiraal (Pays-Bas), décrit en détail les moyens employés dans son service pour donner la mort à certains patients ou pour les aider à le faire eux-mêmes. L'autre, très célèbre, le professeur Christian Barnard (Afrique du Sud), pionnier des greffes du cœur, se prononce en faveur de l'euthanasie : en entrant à l'hôpital, chaque malade gravement atteint devrait signer un document laissant une liberté d'initiative à son médecin.

Cette dernière position est désapprouvée par les associations pour le droit de mourir qui se sont constituées dans un certain nombre de pays. Selon elles, le malade ou le vieillard doit pouvoir décider lui-même, en toute liberté, du moment de sa mort. Et s'il est en état d'inconscience, on doit tenir compte du testament de vie ou testament biologique qu'il aura rédigé au préalable. Aux États-Unis, diverses lois ont été adoptées dans ce sens, mais les médecins les appliquent à leur guise : il y a toujours moyen de contester la validité de tels testaments.

Le débat ne se limite pas à cette question du pouvoir médical. En effet un très grand nombre de praticiens et de moralistes pensent que l'euthanasie, « active » ou « passive », est une solution de facilité inacceptable. N'existe-t-il pas aujourd'hui des moyens efficaces de combattre la douleur et d'aider psychologiquement le vieillard ou le malade, sans lui donner la mort ? L'exemple le plus souvent cité est celui de l'hospice Saint Christofer, à Londres, où l'on utilise de puissants antalgiques et d'autres techniques pour soulager la souffrance, en assurant le confort du malade et ses relations avec l'entourage.