De son côté, la puissante Confédération générale du travail LO réclame 11,3 %, tout en reconnaissant que la situation économique est préoccupante. Fin mars, le gouvernement tente de faciliter le déroulement des négociations en présentant une série de mesures qu'il s'engage à prendre si les augmentations de salaires n'excèdent pas 2,5 % : blocage des prix et des loyers, allégement de l'impôt sur le revenu, création d'un fonds d'investissement industriel alimenté par le prélèvement obligatoire de 25 % des bénéfices réalisés par les entreprises durant l'année 1980.

Au lieu de les faciliter, ce plan aura finalement compliqué les discussions paritaires, car le syndicat y voit une atteinte au « droit de libre négociation ». Le règlement du conflit intervient finalement le 11 mai, non sans suspense. En effet, après avoir rejeté les ultimes propositions de la commission de conciliation, le patronat revient sur sa décision « à la demande pressante du gouvernement ». Aux termes des accords signés entre les employeurs et les syndicats, les salaires sont relevés de 6,8 % dans le secteur privé à partir du 15 avril et de 7,3 % dans le secteur public. Les grèves et lock-out les plus importants depuis 1909 auront coûté au moins deux milliards de couronnes à la Suède. Faut-il tirer un trait sur le fameux modèle ? La question est vivement débattue dans les semaines suivant la signature des nouveaux accords, et les avis sont partagés.

Les syndicats estiment que non : ces événements ont montré que le gouvernement ne pouvait imposer sa loi aux partenaires sociaux et que le différend a été réglé par des médiateurs, conformément aux usages.

Les employeurs, pour leur part, qui ont dû céder, souhaiteraient une meilleure coordination de la politique économique du gouvernement et de la politique des salaires. Autrement dit, des contacts plus étroits et plus fréquents entre pouvoirs publics, opposition et organisations professionnelles.

Une chose est sûre cependant : le consensus social, relativement aisé à atteindre dans les années 50 et 60, au temps où la Suède connaissait une forte croissance, est devenu plus problématique au fur et à mesure de l'aggravation rapide de la situation économique à laquelle le gouvernement de coalition bourgeois doit faire face.

Sans passion

Les principaux bénéficiaires des élections législatives du 16 septembre 1979 sont les conservateurs de Gösta Bohman, qui gagnent 18 sièges et deviennent la deuxième formation politique après les sociaux-démocrates, pour qui le résultat de cette consultation est une profonde déception. Battus en 1976, après avoir gouverné pendant quarante-quatre ans (Journal de l'année 1976-77), ils semblaient persuadés que la « parenthèse bourgeoise » ne durerait pas plus d'une législature, d'autant plus que les trois partis non socialistes étaient incapables de présenter un programme commun.

La campagne électorale ne passionne guère l'opinion. L'issue du scrutin est, comme prévu, très serrée : 175 sièges pour les partis bourgeois, 174 pour les sociaux-démocrates et les communistes qui, libérés de leur aile orthodoxe, réalisent leur meilleur score depuis trente ans. L'écart entre les deux blocs est de moins de 30 000 voix.

Le Premier ministre sortant, Ola Ullsten, chef du cabinet libéral minoritaire depuis octobre 1978, présente sa démission, et c'est curieusement le grand vaincu des législatives, le centriste Thorbjörn Fälldin (qui vient de perdre le quart de son électorat) qui lui succède à la tête d'un gouvernement tripartite de centre droit. Il s'agit en fait de la même coalition qui était tombée deux ans plus tôt sur la question de l'énergie nucléaire (Journal de l'année 1978-79).

Référendum

L'atome fait l'objet d'un référendum le 23 mars 1980. Les Suédois, qui ne discutent toujours que d'une chose à la fois, se passionnent pendant trois mois sur les avantages et les inconvénients des centrales ; ils oublient l'intervention militaire soviétique en Afghanistan et les difficiles négociations salariales.

Les trois options soumises au vote correspondent à trois orientations de la politique énergétique suédoise, mais aucune ne prévoit une extension du programme électronucléaire au-delà des douze réacteurs prévus dans la loi de 1975, et dont six sont déjà en service. Les deux lignes favorables à l'atome et à un démantèlement des centrales étalé sur vingt-cinq ans (défendues par les conservateurs, les sociaux-démocrates et les libéraux) recueillent 58 % des suffrages tandis que l'option 3, qui préconisait un abandon de l'énergie atomique en dix ans, totalise 38,6 % des voix.