Mais, devançant la nouvelle hausse des prix pour le 1er juillet, une forte augmentation des importations de pétrole intervient en juin.

Au fléchissement temporaire de la demande interne à l'importation, après les niveaux élevés de l'automne 1976, s'oppose, par exemple, au printemps 1977, une demande étrangère en progrès pour les biens d'équipement. L'ensemble des exportations atteint un sommet en juin : 29,7 milliards.

Ainsi, le déficit commercial se restreint. En chiffres bruts, encore de 3 milliards en janvier 1977, il tombe à 700 millions en mai et à moins de 600 millions en juin.

Mais rien n'autorise, surtout, à chanter victoire et à relâcher l'attention. La fermeté du franc, la maîtrise des coûts et des prix, par rapport aux concurrents, demeurent plus que jamais les facteurs essentiels du retour à l'équilibre, exigeant des efforts tenaces.

Et cela, dans une atmosphère où resurgissent, un peu partout dans le monde, les vieux démons du protectionnisme.

Le mouvement des capitaux français vers les USA s'accélère

Impressionnés par l'ampleur du marché américain et la redoutable efficacité de ses managers, les entrepreneurs français ont pendant longtemps hésité à franchir l'Atlantique pour s'implanter sur le sol du Nouveau Monde.

Désormais, ils débarquent en rangs serrés. Depuis deux ou trois ans, les généraux de l'industrie (Pechiney, Saint-Gobain-Pont-à-Mousson, Elf-Aquitaine, Creusot-Loire, Michelin) ont réussi à entraîner dans leur foulée toute une armée de fantassins, où voisinent les skis Rossignol, les poêles Tefal, les pelleteuses Poclain, les verres de lunettes Essilor et, bientôt toute la gamme des produits Moulinex.

Motivations

S'agit-il d'une fuite de capitaux devant le risque d'arrivée de la gauche au pouvoir ? D'un moyen de contourner la montée du protectionnisme et les fluctuations monétaires qui pèsent inévitablement sur nos exportations ? Ou tout simplement du rattrapage d'un retard pris par rapport à nos concurrents étrangers ? Toutes ces raisons sont valables à des degrés divers.

Lorsque, en 1975, la société Imétal (du groupe Rothschild) a investi 80 millions de dollars pour prendre le contrôle de Copperweld, il s'agissait, certes, d'une intéressante opportunité industrielle, mais également d'un moyen de mettre à l'abri une partie du patrimoine de la famille. En revanche, on peut estimer que Creusot-Loire, Thomson, Air liquide, Saint-Gobain ou Michelin ont eu essentiellement pour souci d'imposer outre-Atlantique des produits ou une technologie qui avaient fait leurs preuves sur le vieux continent... et ailleurs. Il leur fallait peut-être l'aiguillon du Programme commun de gouvernement pour se décider à faire le grand saut.

Et, de fait, le mouvement est bien embrayé. De quelques dizaines de millions de dollars par an au cours des années 60, le montant des investissements directs français outre-Atlantique est passé à environ 1 milliard en 1976.

Michelin a déjà englouti, à lui seul, 300 millions de dollars et compte doubler sa mise d'ici à 1980. À la fin de l'année, Saint-Gobain-Pont-à-Mousson a investi 30 millions de dollars (contre 85 millions auparavant) pour s'assurer la majorité du capital de Certain Teed, la deux cent quarante et unième entreprise américaine et la plus grosse firme parmi celles qui sont contrôlées par des capitaux français. Les frères François et Xavier Gardinier, inconnus en France il y a encore quelques années, ont réussi à rassembler 130 millions de dollars pour racheter, en 1973 puis en 1976, une mine de phosphates et une usine d'engrais azoté. « C'est l'opération la mieux montée par les Français outre-Atlantique », affirme, admirativement, un banquier français de New York.

Dérapages

Quelles leçons peut-on tirer de l'expérience des La Fayette de la pelleteuse ou des Rochambeau du pneu à carcasse radiale ? Elle est toute simple : les États-Unis sont le marché le plus complexe mais également le plus rémunérateur du monde. Quand on réussit, le succès est clair, net, sans bavures. Mais gare aux dérapages sur les routes glissantes.