Commerce extérieur

La pause économique tempère le déséquilibre

Le commerce international retrouve nettement vigueur, en 1976, situation qui tranche sur la phase déprimée de 1975. D'une année à l'autre, les échanges mondiaux progressent de 11 % en volume et de 12 % en valeur, franchissant la barre des 1 000 milliards de dollars. Et il est à noter que l'expansion de la production mondiale est quasiment moitié moins forte que la reprise des échanges.

Dans cette ambiance de croissance élevée, le commerce extérieur français se ressaisit, lui aussi. Il reste que l'année 1976 se solde finalement, dans ce domaine, par un record tristement négatif : la balance commerciale fait ressortir un déficit de 20,9 milliards de F. On mesure mieux la détérioration spectaculaire en se reportant aux résultats de 1975, année au cours de laquelle avait été enregistré un excédent de 6,8 milliards de F. Un tel déséquilibre du compte marchandises pèse dangereusement sur la balance des paiements courants, qui s'établit à – 29 milliards de F.

Calculées en termes FOB, c'est-à-dire valeur de la marchandise au point de sortie du pays exportateur, les importations totales françaises (293,6 milliards) s'accroissent à un rythme de 33,2 %, soit près du double de celui des exportations globales (272,7 milliards), qui s'inscrit à 20 % par rapport à 1975. En volume, dans un système de prix identique, la poussée des achats se chiffre à environ + 21 %, et celle des ventes à + 10 %. Le taux de couverture des importations par les exportations chute de 103,1 à 92,9 %, retrouvant à peu de chose près le niveau de 1974.

Envolée

Les importations s'accélèrent au fil des mois, mais d'une manière plus marquée dès la fin du 1er semestre, tandis que la cadence des exportations a alors plutôt tendance à s'infléchir.

Les causes de cette évolution, on les trouve dans une stimulation de l'activité intérieure et de la demande, dans une reconstitution des stocks. Le développement économique, sans doute plus rapide et plus précoce que dans d'autres pays voisins, provoque cette envolée des importations.

Le phénomène est, cependant, amplifié par l'augmentation des prix internationaux des matières premières importées : de 1975 à 1976, l'indice d'ensemble reflète une hausse de 43,5 % sur la base des cotations en livres sterling et en dollars, et de 39,6 % sur celle des prix transposés en francs français. Cela est spécialement sensible pour une denrée tropicale, le café, dont les prix moyens à l'importation triplent de fin 1975 à fin 1976.

La dégradation des termes de l'échange, due à la dépréciation du franc, accentue le déséquilibre au deuxième semestre. Se trouve renchéri le coût des importations.

On assiste également à une montée des achats de pétrole brut : les approvisionnements de l'année dépassent 122 millions de tonnes (+ 14,3 % sur 1975), soit une dépense d'un peu plus de 55 milliards de F (+ 32,5 %). La note pétrolière s'alourdit d'autant qu'entre janvier et décembre le prix à la tonne s'élève progressivement de 426 à 472 F. Outre un accroissement des stocks à titre de précaution, des importations supplémentaires d'énergie sont nécessaires pour pallier la baisse de régime des centrales hydroélectriques consécutive à la sécheresse de 1976.

Cette même sécheresse a, bien entendu, des effets négatifs sur le courant des exportations agricoles, en même temps qu'elle provoque une hausse des importations pour compenser la diminution des récoltes.

En septembre, dans l'attente d'une réévaluation de la monnaie allemande, des mouvements spéculatifs d'achats outre-Rhin provoquent un gonflement des importations. Celles-ci dépassent alors 26 milliards et ne cesseront ensuite de croître pour aboutir au-delà de 29 milliards en décembre.

Enfin, la fermeté de la demande des particuliers pousse, d'une façon singulière, les importations de biens de consommation (automobiles, textiles, etc.). Dans ce secteur, se renforce la pénétration des fournisseurs étrangers sur le marché intérieur, et le partage du marché évolue donc au détriment des industries françaises qui, soit à cause d'une certaine saturation de leurs capacités de production, soit par manque de compétitivité des prix ou de dynamisme, ne peuvent faire suffisamment face, sur le terrain même de l'Hexagone, à la concurrence plus vive venue de l'extérieur. Les importations de produits à des prix considérés comme « anormalement bas » de tel ou tel pays d'Asie (pour des textiles, par exemple) n'expliquent pas, à elles seules, une telle situation.

Sensibilité

Tous ces facteurs conjugués font qu'en 1976 la France parvient presque, à un souffle, à quelque 400 millions de dollars près, à la hauteur du Japon, troisième importateur mondial. La fragilité de l'équilibre extérieur, tenant à la sensibilité des importations aux variations de la demande intérieure, est mise, une fois de plus, en relief.