Quant aux radicaux de Ricardo Balbin et Rau Alfonsin, ils se retrouvent avec les péronistes au sein de l'Heure du peuple, créée en novembre 1970, tandis que le Mouvement d'intégration et de développement (MID) d'Arturo Frondizi rejoint les mêmes péronistes dans le cadre d'un Front civique de libération nationale préconisé par Peron. Deux autres partis de moindre importance, la Nueva Fuerza, de droite, et le Front de la gauche populaire (FIP), se mettent également sur les rangs.

Face à cette démocratisation, restent les militaires, qui n'apprécient pas la politique de fuite en avant du président Lanusse et ne sont guère enclins à abandonner le pouvoir sans réagir à des forces populaires dont le contrôle pourrait bien leur échapper.

Eva Peron

Étrange destin que celui d'Eva Peron : petite fille de la Pampa, comédienne sans talent, elle devient première dame de l'Argentine. Mieux : un mythe national, une idole vénérée comme une sainte, la madone des descamisados. Elle exerce un pouvoir personnel démesuré, qui tient à la fois d'une sorte d'envoûtement et d'une habileté consommée à diriger ses œuvres sans désintéressement excessif.

Elle meurt à 33 ans, emportée par une leucémie. C'était le 26 juillet 1952 ; le Congrès l'avait proclamée chef spirituel de la nation.

Après la chute de Peron, en septembre 1955, le nouveau régime tente de mettre un terme au culte voué à Eva, notamment en faisant disparaître sa dépouille. On ignora toujours le lieu exact où elle avait été transportée, quelque part en Italie. C'est le président Aramburu (assassiné par un mouvement péroniste en 1970 !) qui, avec l'accord, semble-t-il, du Vatican, avait réalisé le transfert. Une lettre confiée à un notaire par l'ancien président, et ouverte après sa mort, révéla le secret.

Le 3 septembre 1971, la dépouille mortelle d'Eva Peron est remise à son époux par les soins de l'ambassadeur argentin en Espagne. La cérémonie se déroule à Madrid dans une atmosphère insolite, entourée d'une extrême discrétion.

Inflation

Le pays se trouve déjà confronté, depuis de nombreux mois, à une situation économique alarmante. Hausse des prix (34,7 % en 1971), inflation devenue incontrôlable, balance des paiements largement déficitaire (chute des exportations, de viande et de céréales notamment), hémorragie de devises, dévaluations en cascade (au mois de mars 1972, la septième en douze mois atteint 60 %), accroissement sensible de la dette extérieure. Ce sombre tableau explique, pour une part, la politique gouvernementale d'ouverture et les prudentes hésitations de l'opposition.

Devant cette situation, le gouvernement choisit de bloquer les prix, de limiter fortement les importations (surtaxe de 15 %) et de solliciter un crédit de près d'un milliard de dollars auprès des organismes internationaux et des banques privées américaines, européennes et japonaises. En novembre 1971 est signé un pacte préférentiel avec la Communauté économique européenne ; enfin, la visite de Maurice Schumann, en mars 1972, vient raviver des liens de coopération entre la France et l'Argentine.

Solidarité andine. Cette visite entre d'ailleurs dans le cadre d'une politique extérieure d'indépendance qui n'a pas pour seule motivation d'être un dérivatif aux graves problèmes internes. Les visites que se rendent le président argentin et le président chilien Salvador Allende, en juillet puis en octobre 1971, ainsi que les voyages du général au Pérou, en Équateur, en Colombie, au Venezuela et au Brésil, illustrent la doctrine de Buenos Aires, hostile aux frontières idéologiques — mais aussi à toute suprématie du Brésil — et visant au contraire à susciter une solidarité nouvelle entre les pays andins.

Barbade

240 000. 557.
Économie. PNB (68) 438. Énerg. (*69) : 668. C.E. (68) : 34 %.
Transports. (*69) : 17 400 + 5 000.
Information. (67) : 2 quotidiens ; tirage global : 69 000. (69) : *57 000. (69) : *15 000. (66) : 5 800 fauteuils ; fréquentation : 1,2 M. (69) : 26 075.
Santé. (68) : 121. Mté inf. (69) : 41,8.
Éducation. (66). Prim. : 40 712. Sec. et techn. : 27 798. Sup. : 373.
Institutions. État indépendant le 30 novembre 1966. Constitution de 1966. Gouverneur général représentant la Couronne britannique : sir Winston Scott. Premier ministre : Errol Walton Barrow. Aux élections du 9 septembre 1971, le parti démocrate travailliste conserve la majorité.

Bolivie

5 060 000. 5. 2,6 %.
Économie. PNB (69) 190. Production (69) : G 140 ; A *112. Énerg. (*69) : 218. C.E. (69) : 20 %.
Transports. (68) : 249 M pass./km, 316 M t/km. (*69) : 17 700 + 23 700. (*69) : 106 380 000 pass./km.
Information. (69) : 17 quotidiens ; tirage global : 165 000. (68) : *1 350 000. (64) : 66 000 fauteuils ; fréquentation : 3,2 M. (69) : 37 551.
Santé. (67) : 1 702.
Éducation. (68). Prim. : 612 629. Sec. et techn. : 124 869. Sup. : 13 312.
Institutions. République présidentielle. Constitution de 1947. Président de la République : colonel Hugo Banzer Suarez, auteur du coup d'État militaire qui renverse, le 22 août 1971, le général Juan José Torrès Gonzales.

187e coup d'État

On avait parlé un peu vite — et peut-être imprudemment — de premier soviet de l'Amérique latine, à propos de cette assemblée populaire sans existence constitutionnelle, mais représentative, jusque dans ses contradictions, de la gauche bolivienne. Des excès de langage, des initiatives voyantes en direction de Cuba, des projets de cogestion ouvrière et de milices armées : rien ne manquait pour effrayer les bourgeois et alimenter le farouche anticommunisme d'une fraction de l'armée. Une fois de plus à La Paz des rumeurs de complot couraient sur le Prado.