Au festival, britannique celui-là, de Glyndebourne, une représentation particulièrement extraordinaire de l'Eugène Onéguine de Tchaïkovski met en valeur l'interprétation simplement sublime de la cantatrice suédoise Elisabeth Söderström dans le rôle de Tatiana. On y déterre aussi, avec une curiosité assez perverse, une partition oubliée de Donizetti, Anna Bolena, dont l'écriture vocale de haute virtuosité ne peut faire oublier la vertigineuse indigence : ce répertoire survit difficilement et ne se sauve même pas par un charme désuet.

À Aix-en-Provence, on reprend Pelléas et Mélisande dans les admirables décors de Jacques Dupont, les plus beaux et les mieux adaptés que l'on ait jamais vus pour cet ouvrage. L'Orchestre de Paris assurait cette année ses services à tous les opéras du festival d'Aix. C'est la raison pour laquelle on entend enfin une véritable interprétation symphonique de la partie orchestrale du chef-d'œuvre de Debussy, partie généralement sacrifiée, sinon défigurée.

Le premier oratorio

Sous la direction de Serge Baudo, l'orchestre est ainsi devenu un personnage supplémentaire et omniprésent dont la voix baigne le chant, créant pour lui un espace à trois dimensions, l'ouvrage devenant presque une vaste symphonie avec chant. Les traditions sont ainsi quelque peu bouleversées, mais quel gain de somptuosité sonore !

Henri Gui donnait une interprétation convenable de Pelléas, et Nicole Menut une interprétation insuffisante de Mélisande : la compétition reste ouverte, et on cherche toujours le couple idéal.

Enfin, une nouvelle présentation des Noces de Figaro dans des décors et costumes de Pierre Clayette, qui a adopté un parti excellent : conservant le caractère baroque, il enlève l'œuvre de son traditionnel cadre viennois pour la situer avec une grâce infiniment poétique dans un cadre architectural aixois. Représentation satisfaisante en son ensemble, mais non exaltante, sous la direction sérieuse de Georges Semkow, avec cependant une révélation, celle d'une des meilleures Suzanne jamais entendues, la cantatrice anglaise Elisabeth Robson.

Le festival de Salzbourg, toujours un peu routinier, est dominé par deux événements. Une nouvelle présentation de Don Giovanni, sous la direction et dans une mise en scène de Herbert von Karajan, spectacle d'un luxe visuel inouï et d'une qualité dramatique très impressionnante, réunit, en outre, une distribution absolument unique, avec Nicolai Ghiaurov, Gundula Janowitz, Teresa Zylis-Gara, Mirella Freni, Geraint Evans, Alfredo Kraus et Martti Talvela, une réunion que l'on ne rencontre pas tous les trente ans.

C'est ensuite une résurrection du premier oratorio de l'histoire, La rappresentazione di Anima e di Corpo, drame moral et sacré d'Emilio de Cavalieri, présenté dans une superbe mise en scène baroque de H. Graf, et qui mérite de demeurer au répertoire de Salzbourg.

La rencontre

Dans la Drôme, à Saint-Donat, non loin du palais légendaire du facteur Cheval et de la ville natale de Berlioz, le festival maintenant annuel et prospère consacré à J.-S. Bach et à ses contemporains affermit encore sa position.

Sous la direction artistique de la grande organiste française Marie-Claire Alain, il se développe, attirant les meilleurs ensembles vocaux et instrumentaux spécialisés dans ce répertoire actuellement en Europe. Le festival 1968 est marqué par une sensible amélioration de l'orgue indispensable à une pareille rencontre : on a maintenant affaire à un bel instrument de style classique et de caractère nordique, dû au maître organier strasbourgeois C. Schwenkedel.

Le concours Olivier-Messiaen

Le troisième concours international de piano Olivier-Messiaen s'est déroulé, dans le cadre du festival de Royan, avec un programme comportant, comme à l'ordinaire, des œuvres modernes, de Debussy à Bartók, Messiaen, Boulez.

Un premier prix à l'unanimité a été attribué à lu jeune pianiste française Catherine Collard, fille de l'accompagnateur André Collard, et élève d'Yvonne Lefébure et d'Yvonne Loriod.

Le deuxième prix n'a pas été donné.