Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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François Xavier (saint) (suite)

Bien loin de se laisser arrêter par des observations pessimistes, l’on dit plus communément que l’erreur de François Xavier fut de n’avoir pas voulu se restreindre. C’est oublier que François Xavier, partant pour les Indes orientales, avait un mandat très précis : le pape Paul III, par un bref du 27 juillet 1540, l’avait promu nonce ; le roi de Portugal l’avait chargé d’inspecter, du point de vue religieux, la situation du domaine du padroado, ou droit de patronage portugais. Il avait donc le devoir de rendre compte à ses chefs pour tout l’ensemble et non pas de se limiter à une seule région.

On a dit encore qu’il manquait par trop d’informations sur les peuples qu’il abordait. Il suffit de consulter les volumes d’enquête du père Schurhammer pour constater que ses ignorances n’étaient pas plus grandes que celles de ses contemporains les mieux informés. Souvent, au contraire, il devança les meilleurs auteurs du temps en corrigeant leurs méprises, par exemple à propos du bouddhisme japonais, qu’il crut d’abord plus proche du christianisme.

« Mais, insiste-t-on, son œuvre ne fut qu’un feu de paille. Il a passé comme un météore, un éclair, entre deux éclipses. » C’est oublier que l’on est en droit de distinguer chez lui deux temps et, pour ainsi dire, deux manières : la première chez les populations autochtones de l’Inde et de l’Indonésie, chez lesquelles il s’est borné à améliorer les traditions de ses prédécesseurs, par exemple pour l’enseignement catéchétique des Doctrines portugaises alors employées en Europe. Mais, dans sa seconde manière, quand il aborda le Japon, il inaugura en Extrême-Orient une voie d’approche culturelle très semblable à celle qu’employèrent les premiers Franciscains et Dominicains en Amérique latine.

Antérieurement au concile de Trente, que François Xavier ne put connaître, il employa donc une méthode d’accès aux civilisations non occidentales qui devait par la suite se révéler féconde.

H. B.-M.

 A. Brou, Saint François Xavier (Beauchesne, 1922 ; nouv. éd., 1932). / S. Francisci Xaverii aliaque eius scripta (Éd. critique par G. Schurhammer et I. Wicki, in Monumenta historica Soc. Iesu) [Rome, 1944]. / X. Léon-Dufour, Saint François Xavier, itinéraire mystique de l’apôtre (la Colombe, 1953). / G. Schurhammer, Franz Xaver : Sein Leben und seine Zeit (Rome, 1955-1971 ; 4 vol.). / J. Van Laer et L. Sterkens, Dans le sillage de François Xavier (Elsevier, 1960).

François Ier

(Cognac 1494 - Rambouillet 1547), roi de France de 1515 à 1547.


Il était le fils de Charles d’Angoulème, comte d’Orléans (1460-1496), un Valois arrière-petit-fils du roi de France Charles V, et de Louise de Savoie (1476-1531), nièce d’Anne et Pierre de Beaujeu. C’est cette mère, devenue veuve en 1496, qui veilla à son éducation et qui, très tôt, nourrit pour lui les plus hautes ambitions : en 1498, la disparition de Charles VIII, qui mourait sans enfants, fit de son fils l’héritier du royaume, le nouveau roi Louis XII n’ayant pas de fils.

Fidèle à la tradition des Capétiens, Louis XII, soucieux de la réunion définitive de la Bretagne à la Couronne, fit épouser au jeune prince sa fille Claude, qu’il avait eue de sa seconde épouse, la duchesse Anne (1514). Le 1er janvier 1515, l’époux de Claude de France devint le roi François Ier.


L’héritage italien et la lutte contre Charles Quint

Ce roi de vingt ans ne pensait qu’à reconquérir son « héritage », le Milanais, perdu en 1513 par Louis XII à la bataille de Novare. Après avoir institué sa mère régente du royaume, François passe les Alpes et, grâce à l’artillerie du grand maître Galiot de Genouillac, il écrasa les Suisses à Marignan (13 sept. 1515). Le pape Léon X fit aussitôt volte-face et se soumit. Le Milanais demeurait à la France ; on crut les guerres d’Italie terminées et la paix rétablie en Europe pour longtemps. C’était compter sans l’apparition d’un nouveau problème, celui de l’élection impériale.

Si Charles de Habsbourg était élu empereur, sa puissance serait énorme, puisqu’il régnait déjà en Espagne, à Naples, en Franche-Comté, aux Pays-Bas, en Amérique. Il fallait donc empêcher à tout prix son élection, et François Ier se porta candidat. On assista à une véritable surenchère de la part des deux compétiteurs pour acheter les votes des électeurs. Le roi de France, qui était riche, paya comptant ; Charles, qui était pauvre, se contenta de lettres de change tirées sur les banquiers augsbourgeois, les Fugger*, mais payables « après » l’élection : il fut cependant élu.

Pour la France, l’élection de Charles Quint* signifiait l’encerclement et l’étouffement progressif. Aussi les guerres d’Italie, jusque-là limitées géographiquement et politiquement, allaient prendre les proportions d’un vaste conflit où toute l’Europe se trouverait engagée. Chacun des adversaires se chercha des alliés, et Henri VIII* d’Angleterre, malgré l’entrevue du « Camp du Drap d’or », près de Calais (7-24 juin 1520), soutint d’abord Charles Quint.

La guerre s’engagea en 1521, et la France perdit bientôt Tournai et le Milanais. Charles Quint réclamait la Bourgogne, en laissant paraître ce qui fut toujours l’objet de son plus ardent désir : la reconstitution du domaine bourguignon. À partir de 1523, la situation devint critique, les Anglais envahissant le Nord de la France, et le connétable de Bourbon, la Provence ; le désastre de Pavie, le 24 février 1525, où le roi fut fait prisonnier, faillit tout perdre. L’habileté politique de Louise de Savoie et du chancelier de France Antoine Duprat (1463-1535) sauva la situation, d’autant plus que le roi d’Angleterre et le pape — soucieux d’équilibre européen — s’inquiétaient de la puissance du Habsbourg.

Aussi fut-il facile à François Ier, libéré en 1526 après avoir signé à Madrid un traité catastrophique mais avec l’intention de n’en tenir aucun compte, d’abord de le faire casser par le Parlement, puis de susciter à l’empereur des ennemis sur ses frontières de l’est. L’alliance avec le Turc, dans cette perspective, reprend sa juste place : elle n’est qu’un chaînon d’une vaste alliance orientale qui cherche à grouper Pologne, Transylvanie, Hongrie, c’est-à-dire à constituer une barrière allant de la Baltique à la mer Noire. En 1529, à la paix des Dames, à Cambrai, le roi de France recueille le fruit de sa politique : s’il renonce à l’Italie, il conserve la Bourgogne.