Dijon (21000)

Philippe de Champaigne, le Bon Pasteur
Philippe de Champaigne, le Bon Pasteur

Chef-lieu de la Région Bourgogne – Franche-Comté et du département de la Côte-d'Or, à 310 km au S.-E. de Paris, au confluent du Suzon et de l'Ouche, sur le canal de Bourgogne.

  • Population : 160 186 hab. (recensement de 2018)
  • Nom des habitants : Dijonnais
  • Population pour l'agglomération : 238 329 hab. (recensement de 2009)

GÉOGRAPHIE

Dijon a un rôle de capitale que lui a légué l'histoire, dans une zone privilégiée d'échanges et de rencontres, lieu naturel de communication entre la Méditerranée et la mer du Nord, entre l'Europe orientale et l'Atlantique. La ville bénéficie de la mise en place de voies de communication rapides (voies ferrées, liaisons routières et autoroutières). La ville est toutefois excentrée dans la Région Bourgogne, espace qui dépend, pour sa moitié ouest, de Paris et, pour le S.-E., de Lyon. Dijon est établie au point de contact de deux zones de relief très contrastées : à l'O., le plateau bourguignon (600 m d'altitude), à l'E., la plaine d'effondrement de la Saône (170 à 250 m). Les vallées de l'Ouche et du Suzon ont coupé l'intérieur du plateau, favorisant la vie de relation. Les conditions de site ont influencé le développement de la ville, mais c'est l'histoire qui a créé sa prospérité. Capitale des ducs de Bourgogne, elle connut dès le xiiie s., une activité commerciale et artistique intense, qui ne fut pas interrompue par le passage de la Bourgogne à la France au xvie s. Le développement urbain marqué par ce passé s'est fait sous la forme radiale jusqu'au xixe s. Le xxe s. a vu s'accélérer le processus d'urbanisation : développement en taches d'huile qui a favorisé la construction d'auréoles successives et concentriques. Dijon commande une agglomération aux fonctions multiples : administrative, commerciale (foires), universitaire, judiciaire (cour d'appel), religieuse (archevêché), touristique et industrielle (constructions mécaniques et électriques, industries alimentaires et chimiques, optique). Base de la 2e escadre de chasse, rattachée à la Force aérienne tactique. 1re région aérienne.

L'HISTOIRE DE DIJON

1. L'époque gallo-romaine

Le site a été très tôt utilisé. Mais, à l'époque gallo-romaine, Dijon n'était qu'une ville de second ordre de la tribu des Lingons et s'appelait Divio. Placée non loin de la frontière de la Germanie, la ville fut fortifiée par l'empereur Aurélien en 273, après les invasions du iiie siècle.

2. Le Moyen Âge

Après la chute de l'Empire romain, elle fit partie du royaume des Burgondes (→ Bourgogne). Elle fut saccagée en 737 par les Sarrasins, puis en 888 par les envahisseurs normands.

C'est le roi de France Robert II le Pieux qui, en 1015, la racheta à son seigneur, l'évêque de Langres, et la réunit au duché de Bourgogne, qui, à partir de 1032, devint l'apanage des princes de la famille capétienne. Jusqu'au xie siècle, toute la vie demeura concentrée dans l'étroit périmètre du castrum gallo-romain, qui se reconnaît encore au tracé des rues du quartier au sud du palais des ducs de Bourgogne. Au xiie siècle, la ville commença à prendre de l'importance à cause d'une grande foire qui s'y tenait et de l'octroi d'une commune par le duc de Bourgogne Hugues III, en 1187.

3. Résidence des « grands-ducs d'Occident »

En 1361, à la mort du duc Philippe de Rouvres, elle fut réunie à la Couronne sous Jean le Bon, mais pour peu de temps, puisque le duché fut aussitôt donné à un fils du roi, Philippe le Hardi, qui fut le premier des quatre grands princes Valois, ducs de Bourgogne. Lui et ses successeurs, Jean sans Peur, Philippe le Bon et Charles le Téméraire, méritèrent le nom prestigieux de « grands-ducs d'Occident ». Leur règne marqua l'apogée de Dijon, qui devint la résidence des ducs et la capitale d'une des plus brillantes cours du temps.

4. Du xve au xixe siècle

La Bourgogne retourna à la couronne de France à la mort du Téméraire (1477). Malgré les protestations des états, Louis XI ne laissa pas échapper une aussi belle province. Il confirma les privilèges du parlement et fixa ce dernier à Dijon. L'annexion à la France ne ruina pas la prospérité de Dijon, qui devint un centre judiciaire, le siège d'un parlement. En 1513, la ville, défendue par Louis de La Trémoille (1460-1523), soutint un siège contre 30 000 Suisses et Allemands.

Durant les guerres de Religion, Dijon prit parti pour la Ligue, mais les massacres de la Saint-Barthélemy lui furent heureusement épargnés grâce à la sagesse et à l'humanité du lieutenant du roi, Léonor Chabot de Charny, et du président du parlement, Pierre Jeannin.

Mayenne essaya de s'y maintenir après l'abjuration d'Henri IV, mais les bourgeois ouvrirent leurs portes au roi en 1595.

Le xviiie siècle fut une époque brillante pour la ville. Les états généraux de Bourgogne s'y réunissaient tous les trois ans ; les écoles, l'académie et les salons de Dijon rivalisaient alors avec ceux de la capitale.

Au xixe siècle, le chemin de fer contribua beaucoup à la prospérité de la ville, qui, défendue par Garibaldi, eut à souffrir de l'invasion de 1870.

Pour en savoir plus, voir l'article Bourgogne.

DIJON, VILLE D'ART

Le premier grand établissement chrétien fut l'abbaye bénédictine de Saint-Bénigne, fondée vers 525. Elle connut un vif éclat grâce à l'abbé Guillaume de Volpiano, qui la réforma et en fit reconstruire l'église de 1001 à 1016, contribuant ainsi à la floraison du « premier art roman » en Bourgogne. La partie la plus originale de l'édifice était, au chevet, une rotonde à trois étages, conçue pour abriter le tombeau de saint Bénigne et comportant un double collatéral annulaire à voûtes soutenues par des colonnes. Depuis la Révolution, il ne reste plus que l'étage inférieur de la rotonde, aux chapiteaux d'un style puissant.

L'art roman est représenté à Dijon par l'église Saint-Philibert, voûtée d'arêtes à l'exemple de Vézelay, mais offrant une élévation intérieure à trois étages qui la rattache au type clunisien. Dans le deuxième quart du xiie s., l'abbatiale de Saint-Bénigne fut reconstruite, à l'exception de la rotonde. Le portail occidental à statues-colonnes, dont le musée archéologique a recueilli des fragments, montrait avant la Révolution une magnifique page de sculpture.

Dijon possède un exemple parfait du style gothique bourguignon avec l'église Notre-Dame, du deuxième quart du xiiie s. La savante répartition des poussées lui permet d'allier la légèreté à la solidité. On note l'absence de déambulatoire et, dans l'élévation intérieure, une particularité d'origine champenoise : l'existence d'une galerie de circulation devant les fenêtres hautes. Les portails sont précédés d'un porche profond que surmontent, en façade, deux étages d'arcades soulignés par des frises où des rinceaux sculptés alternent avec des figures grotesques en saillie (aujourd'hui refaites). C'est sur le modèle simplifié de Notre-Dame que l'abbatiale de Saint-Bénigne, aujourd'hui cathédrale, fut reconstruite une nouvelle fois à partir de 1280, en commençant par le chœur ; la nef, du xive s., n'est pas exempte de sécheresse. L'ancien dortoir des moines, affecté aujourd'hui au musée archéologique, est une belle construction du xiiie s. à trois nefs voûtées. Dijon a perdu peu après la Révolution un chef-d'œuvre de l'art gothique, la Sainte Chapelle du palais des ducs (xiiie-xvie s.). L'architecture civile du xiiie s. offre l'hôtel Aubriot, avec sa façade à décor d'arcatures.

La Bourgogne connut une période de splendeur avec les ducs de la maison de Valois, à la fin du xive s. et pendant la majeure partie du xve s. Dijon fut alors un foyer d'art international, où des artistes venus des Pays-Bas jouèrent un rôle de premier plan. Deux grandes entreprises résument cette activité. Remontant aux ducs capétiens, le palais ducal fit l'objet d'une reconstruction dont témoignent encore la tour dite « de Bar », les étages supérieurs de la grande tour, les cuisines voûtées et la grande salle, dite « des Gardes ». L'ensemble, augmenté à partir de la fin du xviie s., abrite aujourd'hui le musée des Beaux-Arts et l'hôtel de ville. La chartreuse de Champmol, dont il ne subsiste que des fragments, illustrait encore plus brillamment le génie artistique de la Bourgogne ducale. Philippe le Hardi la fonda en 1383, aux portes de la ville, et voulut en faire la nécropole des ducs de la maison de Valois. Il commanda son propre tombeau à Jean de Marville, qui mourut dès 1389 et fut alors remplacé par un sculpteur néerlandais dont la puissante personnalité allait dominer l'école bourguignonne, Claus Sluter. Celui-ci se fit aider par son neveu Claus de Werve, qui acheva l'ouvrage en 1411. Ce qu'il offre de plus remarquable est le cortège des pleurants, représenté d'une manière réaliste sous une sorte de galerie de cloître autour du sarcophage (aujourd'hui au musée des Beaux-Arts).

Le portail de l'église de la chartreuse avait été commencé en 1386 par Drouet de Dammartin (?-1413) et Jean de Marville. Sluter le continua, en lui donnant plus d'ampleur, et l'acheva en 1401. On trouve dans les statues qui le composent la veine réaliste et la puissance plastique qui triomphent, pénétrées d'un souffle dramatique, dans les sculptures du célèbre « puits de Moïse », auquel Sluter travailla de 1395 environ à 1406. Ce monument, surmonté d'un grand calvaire, s'élevait au centre du cloître de la chartreuse. On voit encore en place le piédestal, avec ses six statues de prophètes, d'une vie intense, et les anges qui supportent l'entablement.

C'est en Flandre que furent exécutés les deux retables commandés en 1390 par Philippe le Hardi pour la chartreuse de Champmol (aujourd'hui au musée des Beaux-Arts). Leurs sculptures de bois doré sont l'œuvre de Jacques de Baerze. L'un des retables représente des histoires tirées de la vie des saints, l'autre des épisodes du Nouveau Testament. Les volets du second sont ornés de scènes peintes à Ypres par Melchior Broederlam dans les dernières années du xive s. et ayant pour sujets l'Annonciation, la Visitation, la Présentation au Temple, la Fuite en Égypte ; mêlant un réalisme discret à l'élégance linéaire du style gothique international, ces scènes comptent parmi les premiers chefs-d'œuvre de l'école flamande. De nombreux peintres, souvent venus du Nord, furent au service des ducs : Jean de Beaumetz (?-1396), Jean Malouel (vers 1370-1419), Henri Bellechose (?-1445), Jacques Coene, Jacquemart de Hesdin, etc. ; leur tâche comprenait l'enluminure des manuscrits aussi bien que la polychromie des statues. Ils formaient une sorte d'atelier international où se croisaient les influences flamande, parisienne et siennoise. On en peut juger par quelques panneaux, notamment le Martyre de saint Denis, peint pour Champmol de 1398 à 1416 par Malouel et Bellechose, aujourd'hui au musée du Louvre avec une grande et une petite Pietà, l'une et l'autre de forme ronde. Avec la Sainte Chapelle et l'église de Champmol a disparu leur parure de vitraux, datant de la même époque.

À côté des grandes fondations ducales, Dijon offre un spécimen précieux de l'architecture privée du xve s., l'hôtel Chambellan. On en remarque surtout l'escalier, dont la voûte, en forme de palmier, retombe au centre sur une statue de jardinier.

Après le rattachement de la Bourgogne au royaume, la Renaissance ne tarda pas à s'implanter dans la ville. Elle y a laissé un témoignage capital, la façade de l'église Saint-Michel, et plus précisément ses trois portails du deuxième quart du xvie s., très profonds et surmontés de voûtes à caissons dont les riches sculptures rivalisent avec celles des vantaux (les tours sont du xviie s.). Mais la place de l'architecture civile n'est pas moins importante. De 1592 date la chambre Dorée du parlement (aujourd'hui palais de justice), avec son plafond sculpté par Antoine Gailley. La Grande Salle, de 1572, est fermée par une harmonieuse façade à pignon, ouvrage d'Hugues Brouhée. La clôture de la chapelle, de 1583, et la porte de la salle des Archives (aujourd'hui au musée des Beaux-Arts) sont de l'invention d'Hugues Sambin, l'artiste le plus célèbre de la Renaissance bourguignonne, auteur d'un recueil gravé, le Traité de la diversité des termes (1572), et créateur d'un style exubérant qui charge de figures et de gras ornements le mobilier comme l'architecture. On reconnaît ce style, à défaut de la production personnelle de Sambin, dans le riche décor sculpté de la maison Milsand et de la maison dite « des Caryatides ».

Au xviie et au xviiie s., la prospérité de Dijon a favorisé l'épanouissement des arts. Il ne faut pas négliger la part de l'inspiration religieuse. Parmi les communautés qui contribuèrent à l'activité artistique, on note surtout les Bernardins, dont l'église ronde à coupole (aujourd'hui sous le vocable de sainte Anne) fut élevée dans les premières années du xviiie s. par le père Louis Philippe Quentin (vers 1600-1636), dont le style dénote l'influence du Caravage, pratiqua honorablement la peinture religieuse, Jean Dubois (1625-1694) la sculpture à sujets sacrés ou profanes.

C'est cependant à l'architecture civile que revient la première place. On voit encore en grand nombre les beaux hôtels élevés pendant cette période pour la noblesse de robe dijonnaise : ainsi, au début du xviie s., l'hôtel d'Étienne Bouhier (aujourd'hui de Vogüé), fidèle encore au style de la Renaissance ; vers le milieu du xviie s., l'hôtel Lantin (aujourd'hui musée Magnin) ou l'hôtel de Thianges, qui est dû à Pierre Le Muet (1591-1609), originaire de la ville ; à la fin du siècle, l'hôtel Legouz, avec sa fastueuse cour en hémicycle ; au milieu du xviiie s., l'hôtel de Lantenay (aujourd'hui préfecture), œuvre de Nicolas Lenoir ; à la fin du même siècle, l'hôtel de Dampierre. Le goût néoclassique inspira aussi, aux portes de Dijon, le château de Montmuzard, dessiné par l'architecte Charles de Wailly, mais inachevé.

Le Logis du roi et les états de Bourgogne s'installèrent en 1674 dans l'ancien palais ducal, que les princes de Condé, gouverneurs de la province, agrandirent et rajeunirent à partir de 1682, d'abord sous la direction théorique de Jules Hardouin-Mansart et celle, effective, de son collaborateur Martin de Noinville. Les travaux commencèrent avec la salle des États et la façade rhabillant, du côté de la cour, le bâtiment de l'ancienne grande salle des Ducs. Devant le palais fut aménagé, de 1686 à 1692, le bel ensemble en hémicycle de la place Royale (aujourd'hui place de la Libération). En 1733, Jacques Gabriel éleva le magnifique escalier rectiligne qui donne accès à la salle des États. Divers agrandissements intervinrent sous le règne de Louis XVI. L'aile orientale de la cour abrite notamment la salle dite « des Statues », témoignage du goût néoclassique. La peinture du plafond, une allégorie à la gloire de la Bourgogne, est de Prud'hon. Les statues à l'antique sont dues à des sculpteurs qui avaient fréquenté l'académie de dessin fondée en 1765 par le peintre François Devosge (1732-1811), rivale de celle de Paris. C'est dans cette académie que se formèrent le délicat pastelliste Claude Hoin (1750-1817), le sculpteur Rude, etc.

Si l'architecture, au xixe s., n'a rien produit de notable, la peinture du même temps compte deux maîtres du réalisme, Félix Trutat (1824-1848) et Alphonse Legros (1837-1911), l'un et l'autre représentés au musée des Beaux-Arts.

LES MUSÉES DE DIJON

Le musée des Beaux-arts (musée classé, dans l'ancien palais des États de Bourgogne), créé en 1781, s'est enrichi de biens confisqués pendant la Révolution puis d'envois de l'État, d'acquisitions, de legs et de dons. De la chartreuse de Champmol proviennent le tombeau de Philippe le Hardi (fin xive-début xve s.) et celui de Jean sans Peur et Marguerite de Bavière (xve s.), ainsi que les deux retables sculptés du Flamand J. de Baerze (dont l'un comporte des scènes peintes par Melchior Broederlam ; fin du xive s.). Les primitifs flamands Nativité du Maître de Flémalle), suisses, rhénans (Konrad Witz, Schongauer) et italiens (Lorenzetti, Daddi) sont bien représentés, et plus généralement, les écoles italienne Portrait de femme de Lotto ; Titien, Véronèse, le Tintoret, Tiepolo, etc.), flamande (Rubens), hollandaise (Hals) et française (Philippe de Champaigne, Nattier, Prud'hon, les impressionnistes). La donation Granville (1969), 1974 et 1986 a doté le musée d'œuvres romantiques et réalistes, et surtout de tableaux contemporains (Staël, Vieira da Silva, Lapicque, Messagier, Hajdu, etc.). Plusieurs salles sont consacrées à la sculpture (Sluter, Rude, Carpeaux, Pompon) ; un cabinet de dessins ainsi qu'un ensemble de meubles et d'objets d'art complètent les collections.

Le musée Magnin (hôtel Lantin), musée national, légué à l'État en 1939 par le fondateur, comprend de nombreux tableaux français (Vignon, Le Sueur, La Hire ; petits maîtres des xviiie et xixe s.), nordiques et italiens, ainsi que des dessins (Poussin, David, etc.).

Le musée archéologique (bâtiment abbatial de Saint-Bénigne), musée contrôlé, conserve des collections d'objets préhistoriques, protohistoriques, gallo-romains, du Moyen Âge et de la Renaissance.

On peut encore citer le musée de la Vie bourguignonne Perrin de Puycousin, installé dans l'ancien couvent des Bernardines, et le musée d'art sacré contigu, le musée Rude (moulages), et le muséum d'histoire naturelle.