Buenos Aires
Capitale de l'Argentine, sur le Río de la Plata.
- Population : 2 890 151 hab. (recensement de 2010)
- Nom des habitants : Buenos-Airiens
- Population pour l'agglomération : 15 024 000 hab. (estimation pour 2014)
Après un premier établissement sans lendemain, en 1536, les Espagnols installèrent en 1580 un poste fortifié pour surveiller le débouché des fleuves Paraná et Uruguay. La ville et le port vivotèrent durant toute l'époque coloniale, faute d'arrière-pays exploitable. Ce n'est qu'en 1776 qu'est créée la vice-royauté de la Plata, dont la capitale est fixée à Buenos Aires, qui assure sa suprématie lorsque l'Argentine devient indépendante (1816). Dans la seconde moitié du xixe s., la mise en valeur progressive de la Pampa et l'immigration européenne qui déferle sur le port font de Buenos Aires une ville-champignon, où se concentrent la plupart des échanges de l'Argentine, intégrée à l'économie mondiale. La population, qui n'atteignait pas 30 000 habitants au moment de l'indépendance, passe de 270 000 en 1880 à 900 000 en 1900 et à 1 574 800 au recensement de 1914.
Le port n'était autre que l'embouchure d'une petite rivière, le Riachuelo, où accostaient les voiliers au pied du talus alluvial. À partir de 1882, on creuse des bassins à flot dans le Río de la Plata, puis, à la fin du siècle, des quais de chargement des céréales sous élévateurs, en amont, près des terminus ferroviaires. Des postes pour hydrocarbures et pour les navires frigorifiques sont ensuite aménagés, en aval, vers Avellaneda et La Plata. La fonction portuaire, essentielle pour l'Argentine, entraîne le développement d'activités industrielles : transformation des produits du sol pampéen ; puis (surtout après la crise de 1930) fabrication de biens ou d'équipements jusqu'alors importés (les industries textiles et mécaniques s'ajoutent aux agro-alimentaires : exportation de céréales et de viande). La vague d'industrialisation provoque la prodigieuse expansion urbaine du « Grand Buenos Aires ». C'est aujourd'hui un grand foyer industriel, diversifié, allant de l'électronique à l'automobile (sans oublier la sidérurgie sur l'eau), plus important que tous les autres centres argentins réunis.
De plus, la capitale centralise l'ensemble des fonctions de direction et d'animation économiques et les organes de commandement politiques et administratifs d'un pays où tout dépend d'elle. Son poids culturel n'est pas moindre (université, instituts, bibliothèques, opéra, plus de vingt musées...). La croissance démographique, interne (y compris par l'hémorragie qui affecte les régions périphériques du pays) et externe (l'immigration paraguayenne, bolivienne et uruguayenne relayant depuis les années 1950 le courant européen), fait que l'agglomération réunit, sur 3 800 km2, plus du tiers de la population du pays. Elle a pu sécréter ainsi une véritable économie urbaine, en marge de l'immense espace argentin.
Cette prodigieuse expansion, nuisible au développement du pays, pose à la métropole elle-même de graves problèmes. La ville a grandi sur les terrains plats de la Pampa, entrecoupés par des ruisseaux malsains dont le drainage fut malaisé. Conformément aux usages coloniaux, elle a reçu un plan quadrillé. Mais il est difficile de tracer la limite du paysage urbain, les espaces bâtis étant discontinus : le manque d'unité de la métropole donne l'impression que son expansion a été mal dirigée. En fait, celle-ci s'est faite, et se poursuit, au long des routes et des voies ferrées à coup de lotissements sommairement viabilisés, de terrains individuels à bâtir, au gré des spéculations des propriétaires fonciers et des promoteurs, et en fonction des réglementations disparates des 25 municipalités de la province de Buenos Aires, qui entourent la capitale fédérale originelle (199,5 km2). Ces villes autonomes (certaines comme Avellaneda ou Quilmes, les grandes concentrations ouvrières du Sud, regroupant des centaines de milliers d'habitants) s'étalent ainsi en nappes quadrillées de rues perpendiculaires, bordées de maisons basses et ternes, englobant dans les secteurs plus bas, inondables, de vastes bidonvilles, les villas miserias. Par contre, toute la rive amont, au nord de la capitale, est le domaine des classes riches, d'Olivos à San Fernando ou Tigre jusqu'au delta du Paraná.
Ces banlieues élégantes font suite aux quartiers nord de Buenos Aires, sur le talus alluvial qui domine l'immense parc de Palermo, où résident, dans des immeubles cossus, cadres supérieurs et propriétaires fonciers qui gagnent l'estancia en fin de semaine. On atteint ainsi, par les avenues Libertador ou Santa Fé, le vieux centre héritier du noyau espagnol originel, autour de la Plaza de Mayo et de la Casa Rosada, siège de la présidence. C'est aujourd'hui le quartier des banques, des ministères et des affaires, entièrement réservé aux piétons, qui se pressent dans ses rues étroites. Il est séparé du reste de la ville, vers l'intérieur, par une sorte de glacis automobile, la large avenue 9 de Julio. Au-delà, s'enfuient vers l'horizon de longues rues étroites, bordées de maisonnettes grises. Pour tenter de redonner quelque fluidité à une circulation automobile souvent paralysée, on multiplie les pénétrantes autoroutières qui sabrent largement dans ce tissu urbain anarchique. La plus spectaculaire dessert l'aérogare d'Ezeiza, coupant la ville de part en part pour atteindre le centre et le port.
Cette ville immense, dépourvue de pittoresque, n'en a pas moins grande allure, celle d'une grande métropole internationale, la plus imposante et la plus dynamique (avec São Paulo) de l'hémisphère Sud.