Wilfried Martens
Homme politique belge (Sleidinge 1936-Lokeren 2013).
1. Du jeune flamingant au leader du parti social-chrétien flamand
Étudiant en droit à l'université de Louvain, il milite au sein de l'Association des étudiants flamands (VVS) et de l'Association des étudiants catholiques flamands (KVHV) qu'il préside, pour l'émancipation de la langue et de la culture flamandes. Avocat au barreau de Gand, il adhère en 1963 au parti social-chrétien flamand (CVP), devient président des CVP-Jongeren (1968-1972), avant d'accéder à la présidence du CVP (1972), poste qu'il conservera jusqu'en 1979. (Le CVP sera rebaptisé Chrétiens-démocrates et flamands [CD&V] en 2001).
Entré à la Chambre des représentants en 1974, Wilfried Martens, qui se montre soucieux d'intégrer une Flandre autonome et dynamique dans de nouvelles structures de la Belgique, est l'un des principaux partisans du pacte d'Egmont-Stuyvenberg scellé en 1978. Très controversé, cet accord qui prévoit la création de trois régions semblables, l'octroi de droits similaires aux Flamands de Bruxelles et aux francophones de la périphérie bruxelloise, ne verra jamais d'application : devant les frictions qu'il suscite en Flandre, le Premier ministre alors en fonctions, Leo Tindemans, torpille le compromis.
2. Premier ministre de 1979 à 1992 : les neuf gouvernements Martens
Le nombre de gouvernements dirigés par Wilfried Martens témoigne de l'instabilité politique de l'époque, pendant laquelle les coalitions durent en moyenne six mois. Le leader démocrate-chrétien dirigera neuf gouvernements, dont quatre gouvernements successifs du 3 avril 1979 à février 1981 et cinq gouvernements successifs du 17 décembre 1981 à mars 1992.
Démissionnaire en mars 1981 (après une pause avec le gouvernement de Mark Eyskens [6 avril-21 septembre 1981]), Martens redevient Premier ministre d’un gouvernement composé des sociaux-chrétiens et des libéraux (gouvernement Martens V, 17 décembre 1981-14 octobre 1985) qui obtient les « pouvoirs spéciaux » pour faire face à la crise économique. Sur fond de déclin industriel – dépérissement des mines flamandes et de la sidérurgie wallone – le gouvernement met en œuvre un vaste plan de rigueur passant par la dévaluation de la monnaie et la suspension de l'indexation automatique des salaires. De 1983 à 1985, le gouvernement doit affronter plusieurs défis : les attentats des Cellules Communistes Combattantes (CCC), les « tueurs du Brabant » ; la « responsabilité morale » du drame du Heysel qui secoue la Belgique en mars 1985 divise le gouvernement qui ne résiste pas à la rupture de la confiance entre les partenaires.
Reconduit dans ses fonctions en octobre 1985, Martens démissionne en 1987 à la suite de l'échec de son parti aux élections législatives anticipées du 13 décembre. Après cinq mois de crise politique, Martens accepte de reprendre ses fonctions et constitue en mai 1988 un gouvernement de centre gauche ; en 1988-1989, le Premier ministre impulse la vaste réforme institutionnnelle qui marque la naissance de l'État fédéral ainsi que les importants transferts de compétences aux régions et communautés. Devant le refus du roi Baudouin de signer la loi qui dépénalise partiellement l'avortement (1990), le Premier ministre jour un rôle essentiel en plaçant le souverain en incapacité temporaire de régner, permettant ainsi au cabinet de ratifier seul le texte.
En octobre 1991, après la remarquable percée des indépendantistes flamands du Vlaams Blok, Wilfried Martens démissionne. Il expédie les affaires courantes jusqu'en mars 1992 avant de cèder sa place à Jean-Luc Dehaene.
Cofondateur en 1976 du parti populaire européen (PPP) qu'il préside de 1990 à 2013, il est député au Parlement européen (1994-2004).
Pour en savoir plus, voir l'article Belgique : vie politique depuis 1951.