Mark Feld, dit Marc Bolan
Chanteur et auteur-compositeur de glam-rock britannique (Londres 1947-Londres 1977).
Eddie Cochran et Arthur Rimbaud sont les maîtres à penser du jeune Mark Feld. À quatorze ans, grâce à son physique et son magnétisme extraordinaires, il travaille comme mannequin et décroche des petits rôles dans des téléfilms. En 1965, il enregistre son premier single, The Wizard, sous le nom de Toby Tyler. En quelques disques, Marc Bolan (son nom d'artiste serait une contraction de Bob Dylan) définit sa marque de fabrique : un folk sensuel sur un tempo rhythm and blues, des textes ésotériques mêlant sorcellerie, sexualité et jargon rock and roll, une douce voix obsédante qui multiplie les hoquettements et les miaulements de félin. Icône du mouvement mod pour sa beauté et son élégance, Bolan croise et fascine de nombreuses stars en devenir, de Jimi Hendrix à David Jones, le futur David Bowie.
L'insuccès de ses premiers titres pousse Bolan à rejoindre en 1967 la formation psychédélique John's Children. Mais à la fin de la même année il décide de monter son propre groupe, le duo acoustique Tyrannosaurus Rex, avec le percussionniste Steve Peregrine Took. Un jeune producteur, Tony Visconti, les signe sur la force de maquettes qui ont déjà séduit le célèbre D.J. de la BBC John Peel. En mai 1968, Debora, suivi du premier album de Tyrannosaurus Rex (My People Were Fair And Had Sky In Their Hair But Now They're Content To Wear Stars On Their Brows), fait une apparition dans les charts britanniques. Deux ans plus tard, une décevante tournée américaine décourage Took, qui cède sa place au multi-instrumentiste Mickey Finn.
L'idole dandy. En août 1970, Bolan enregistre un single culte avec son ami David Bowie, Oh Baby, sous le nom de Dib Cochran & the Earwigs. À l'automne, Bolan accepte enfin de simplifier le nom de son groupe en T. Rex. Les effets ne se font pas attendre : l'excellent single Ride A White Swan grimpe aux sommets du hit-parade. En recrutant un bassiste, Steve Curry, et un batteur, Bill Legend, T. Rex tourne définitivement le dos au folk acoustique pour devenir le prototype du groupe de glam rock (→ glitter). Le règne du Bolan boogie peut commencer. Pendant trois ans, grâce à une succession vertigineuse de singles aussi accrocheurs qu'efficaces, Marc Bolan devient l'idole des jeunes Anglais.
Mais, à partir de 1974, T. Rex, dont l'impact a toujours été faible aux États-Unis, voit sa popularité décliner. Alors que la tempête punk gronde sur l'Angleterre, Bolan est pourtant un des rares représentants de l'ancienne garde à être épargné par les insurgés de 1976. Cela lui suffit pour trouver le courage de repartir en tournée. Les Damned assurent la première partie de ce come-back très prometteur. En avril 1977, Dandy In The Underworld amorce les retrouvailles de T. Rex avec le succès. Le 16 septembre, alors que Bolan rentre d'une soirée avec sa compagne, la chanteuse Gloria Jones (la créatrice de Tainted Love), sa voiture s'écrase contre un arbre. Il meurt sur le coup.
On trouve tout dans le rock essentiel de Marc Bolan. Son boogie convulsif incorporait le beat d'un Bo Diddley, l'innocence fruste du rhythm and blues anglais des sixties et la sublime décadence d'un funk précurseur. Sex-symbol androgyne par excellence, Marc Bolan captait littéralement ses auditeurs avec ses délicats jappements d'animal en rut, son intrigante prose de poète électrique et halluciné. Une grâce qui survit par le biais des albums savoureux que les nouvelles générations ne cessent de découvrir. À en juger par le nombre d'enregistrements inédits qui font surface chaque année, gageons que le mythe Bolan — amplement justifié — n'est pas près de s'évanouir.