Giovanni Battista Tiepolo ou Giambattista Tiepolo
Peintre et graveur italien (Venise 1696-Madrid 1770).
Son fils aîné, Giandomenico (Venise 1727-Venise 1804), a été très tôt son collaborateur, notamment lors des grands chantiers de Würzburg et de Madrid. Il travailla aussi à la villa Valmarana de Vicence : c'est là qu'il eut l'occasion de révéler des dons originaux, se traduisant par une grande liberté narrative et une subtile veine satirique. Son attention à la réalité de son temps en fit un excellent peintre de scènes de genre, champêtres ou mondaines, et de personnages de carnaval (l'Arracheur de dents, le Menuet, Louvre).
Giambattista Tiepolo
Fresquiste virtuose, dominant le xviiie s. italien par son génie décoratif, le Vénitien Giambattista Tiepolo allie aux somptueux effets de luminosité et de théâtralité des exubérances formelles qui sont une apothéose de l'âge baroque. Comme un livre d'images précieuses, sa peinture exalte les splendeurs d'un monde aristocratique.
La grande œuvre vénitienne
Dernier des six fils d'un capitaine de navire marchand, qui le laisse orphelin à un an, Giambattista Tiepolo fréquente le milieu des peintres vénitiens d'esprit baroque, tels Giovanni Battista Piazzetta et les frères de son épouse, Cecilia Guardi : Giovanni Antonio (1699-1760), Francesco (1712-1793) et Nicolò (1715-1786).
Très tôt, Tiepolo met en place une plastique personnelle, qui se caractérise par la force expressive de la composition et la netteté des personnages (Martyre de saint Barthélemy, vers 1720, musée Correr, Venise ; Tentation de saint Antoine, vers 1725, pinacothèque de Brera, Milan). La fresque va être son domaine de prédilection, grâce auquel il prolongera la tradition décorative de Véronèse. Pour les scènes bibliques de l'archevêché d'Udine (1727-1728), il donne libre cours à un art caractérisé avant tout par la hardiesse de la construction et par la luminosité solaire des fonds de ciel, largement ouverts derrière les personnages, comme si la lumière naturelle elle-même était la vraie protagoniste du tableau. De cette époque date aussi une série de dix immenses toiles, inspirées de l'histoire romaine ; destinées à l'origine à un palais vénitien, elles sont aujourd'hui réparties entre plusieurs musées.
Dès lors, la renommée de Tiepolo est faite et les commandes se succèdent, non seulement à Venise mais aussi à Milan ou à Bergame. C'est toutefois dans sa patrie qu'il exécute ses chefs-d'œuvre : fresques de la Gloire de saint Dominique pour l'église des Gesuati (1737-1739) ; fresques pour la Scuola Grande dei Carmini (1740-1744), avec, au centre, une Vierge du Carmel dont le vêtement blanc se détache sur un ciel de lumière ; fresques d'Antoine et Cléopâtre pour le palais Labia (1746-1747), qui lui donnent l'occasion à la fois d'inaugurer sa collaboration avec un autre peintre, Girolamo Mengozzi-Colonna (1688-1766), spécialiste des décors d'architectures, et d'opérer une extraordinaire transposition artistique en représentant ses personnages en habits du xviiie s.
Le reste de la carrière vénitienne de Tiepolo se passera à célébrer les fastes de l'époque, qui éclatent à la villa Valmarana de Vicence (1757), au palais Rezzonico de Venise (1758), au palais Canossa de Vérone (1761) et à la villa Pisani de Stra (1761-1762).
La carrière étrangère
Tiepolo fait aussi carrière à l'étranger. Entre 1750 et 1753, il séjourne en Allemagne, pour décorer la Résidence des princes-évêques de Würzburg. Il peint le plafond de la grande entrée (les Quatre Parties du monde), celui du salon d'honneur (Vie de Frédéric Barberousse) et celui qui surplombe l'escalier d'honneur, où il donne toute la mesure de sa virtuosité en transfigurant le thème de l'Olympe dans une éclatante composition mi-païenne, mi-sacrée.
Appelé en Espagne en 1761, Tiepolo va travailler pendant cinq ans pour le palais royal de Madrid, dont il décore trois plafonds (Apothéose d'Énée, Allégorie de la monarchie espagnole, Apothéose de l'Espagne). Il apparaît alors comme marqué par une inquiétude intime qui éteint la brillante fantaisie de ses compositions antérieures. La tendance à la dramatisation dont il fait preuve peut aussi s'expliquer par le contexte propre à la capitale espagnole, placée sous l'influence du néoclassicisme de l'Allemand Mengs. Dans le même esprit, Tiepolo réalise les tableaux d'autel de l'église du couvent d'Aranjuez (1767-1769), où, aux figures solitaires de saints, situés dans des paysages vides et réalistes, s'ajoute une Fuite en Égypte (musée national d'Art ancien, Lisbonne), empreinte d'un mysticisme profond.
Le voyage en Espagne est celui d'où Tiepolo ne reviendra pas. De ce dernier, on conserve aussi des portraits, intimistes ou officiels, des dessins (1 500 environ) et des eaux-fortes (10 Scherzi, 24 Caprici), reflétant toute la diversité de ses intérêts.