République de Djibouti
en arabe Djumhūriyya Djibūtī, anciennement Côte française des Somalis puis Territoire français des Afars et des Issas
État d'Afrique orientale, Djibouti est baigné par l'océan Indien à l'est et limité par la Somalie au sud, par l'Éthiopie au sud et à l'ouest, par l'Érythrée au nord.
- Superficie : 23 000 km2
- Nombre d'habitants : 1 120 849 (2022)
- Nom des habitants : Djiboutiens
- Capitale : Djibouti
- Langues : arabe et français
- Monnaie : franc de Djibouti
- Chef de l'État : Ismaïl Omar Guelleh
- Chef du gouvernement : Abdoulkader Kamil Mohamed
- Nature de l'État : république à régime présidentiel
- Constitution :
- Adoption : 4 septembre 1992
- Entrée en vigueur : 15 septembre 1992
- Révision : avril 2010
STATISTIQUES : DÉMOGRAPHIE
- Population : 1 120 849 hab. (2022)
- Densité : 39 hab./km2
- Part de la population urbaine (2023) : 79 %
- Structure de la population par âge (2023) :
● moins de 15 ans : 30 %
● 15-65 ans : 65 %
● plus de 65 ans : 5 % - Taux de natalité (2023) : 22 ‰
- Taux de mortalité (2023) : 9 ‰
- Taux de mortalité infantile (2023) : 37 ‰
- Espérance de vie (2023) :
● hommes : 60 ans
● femmes : 66 ans
La population, musulmane, se compose à parts presque égales de deux peuples, parfois rivaux, Issas et Afars. Plus de la moitié de la population se concentre à Djibouti, la capitale.
STATISTIQUES : ÉCONOMIE
- GÉNÉRALITÉS
- PNB (2022) : 3 milliards de dollars
- PNB/hab. (2022) : 3 310 dollars
- PNB/hab. PPA (2022) : 6 010 dollars internationaux
- IDH (2021) : 0,509
- Taux de croissance annuelle du PIB (2022) : 3,1 %
- Taux annuel d'inflation (2022) : 5,2 %
- Structure de la population active (2021) :
● agriculture : 1,2 %
● mines et industries : 6,1 %
● services : 92,7 % - Structure du PIB (2022) :
● agriculture : 1,8 %
● mines et industries : 15,3 %
● services : 82,9 % - Taux de chômage (2022) : 27,9 %
- Tourisme
- Recettes touristiques (2018) : 57 millions de dollars
- Commerce extérieur
- Exportations de biens (2022) : 4 600 millions de dollars
- Importations de biens (2022) : 4 327 millions de dollars
- Défense
- Forces armées (2020) : 13 000 individus
- Dépenses militaires (2008) : 4,1 % du PIB
- Niveau de vie
- Incidence de la tuberculose pour 100 000 personnes (2022) : 240
- Part en % des richesses détenues par les 10 % les plus élevés (2021) : 63,8 %
- Part en % des richesses détenues par les 50 % les moins élevés (2021) : 4,2 %
- Dépenses publiques d'éducation : n.d.
Djibouti ambitionne de devenir un important carrefour commercial (nouveau complexe portuaire) et financier en collaboration notamment avec Dubai et en attirant des capitaux étrangers. Son économie est très liée à celle de l'Éthiopie, qui bénéficie, grâce à son port, d'un débouché sur la mer. Le pays a ainsi signé, avec cette dernière et le Soudan du Sud, un accord de coopération. Il a lancé d'ambitieux et coûteux travaux d'infrastructures (routes, chemin de fer, oléoduc) avec notamment l'appui financier de la Chine qui y dispose depuis 2017 d'une base militaire, comme les États-Unis et la France. La croissance économique est soutenue depuis dix ans (près de 8 % en 2019 avant la crise sanitaire et économique due à la pandémie de Covid–19), mais ne profite pas à la population, et le pays s'est fortement endetté pour financer son développement. La reprise est estimée à5 % en 2023.
GÉOGRAPHIE
Territoire aride, la région offre surtout un intérêt stratégique par sa situation à l'entrée de la mer Rouge. La population, juxtaposant deux ethnies dominantes (Afars, Issas), islamisées, vit surtout de l'élevage ovin dans l'intérieur. Mais plus de la moitié des habitants se concentrent à Djibouti.
1. Le milieu naturel
La République de Djibouti est située à l'entrée de la mer Rouge (détroit de Baab al-Mandab), à la jonction de deux grandes zones de fractures de l'écorce terrestre : la Rift Valley d'Afrique orientale et la grande fracture le long de laquelle se séparent les plaques africaine et arabique en donnant naissance à la mer Rouge. C'est donc une zone d'instabilité tectonique où les phénomènes volcaniques sont fréquents. La tectonique cassante a dénivelé des blocs, culminant à près de 2 000 m d'altitude, alors que le lac Assal est le point le plus bas de l'Afrique (au-dessous du zéro marin). Le climat est semi-aride. Les pluies surviennent à n'importe quel moment de l'année et sont très irrégulières (29 mm en 1966 à Djibouti, 557 en 1967 ; moyenne : autour de 150 mm par an). Les températures permettent de distinguer une saison chaude, de mai à septembre (35 °C environ) et une saison plus fraîche (25 °C environ) d'octobre à avril. La brise de mer qui s'installe en milieu d'après-midi entraîne une diminution des températures de 8 °C en quelques minutes et une remontée de l'humidité relative. La végétation clairsemée est constituée d'arbustes ou buissons épineux xérophyles (acacias, euphorbes, etc.). Elle permet tout juste de nourrir les troupeaux (chameaux, bovins, ovins, caprins) des pasteurs nomades.
Les conditions naturelles sont donc peu favorables aux productions rurales, dominées par l'élevage, les cultures se limitant à un peu de maraîchage. La sécheresse des années 1980 a accéléré le déclin du nomadisme traditionnel en provoquant un important afflux de pasteurs vers la capitale, renforcé par l'arrivée de réfugiés éthiopiens et somaliens.
2. Une capitale-État
Par sa position géographique et stratégique, la ville de Djibouti, qui regroupe plus des quatre cinquièmes de la population, a une économie fondée sur les échanges et sur le développement d'activités de services. C'est avant tout un port, récemment agrandi (Moraleh), avec une population cosmopolite et des activités commerciales omniprésentes, bien que le chemin de fer d'Addis-Abeba ne dispose plus du monopole de fait de l'approvisionnement de l'Éthiopie. Djibouti, par nature, est très sensible à la conjoncture régionale. Les guerres civiles extérieures (Somalie, Éthiopie) et internes (depuis 1994) ont eu des répercussions sur l'économie, et la France a dû intervenir pour soutenir un revenu national très supérieur aux pays voisins. Le pays accueille une base militaire française dont les effectifs ont été récemment ramenés de 3 200 à 2 600 soldats. Les transferts financiers correspondants compensent en partie le déficit structurel de la balance commerciale (le pays importe la quasi-totalité de ses biens de consommation). Malgré ses liens étroits avec la France, Djibouti ne fait pas partie de la zone franc, sa monnaie – le franc djiboutien – étant rattachée au dollar. La religion musulmane (rite sunnite) ne suffit pas à assurer l'unité du pays, que menacent régulièrement les antagonismes entre les deux principaux groupes humains, les Afars (présents principalement dans le Nord et l'Ouest) et les Issas (population somalie vivant dans le Sud), aujourd'hui majoritaires.
HISTOIRE
La période coloniale
En 1862 le drapeau français est hissé sur Obock, mais c'est seulement en 1884 que Léonce Lagarde occupe le poste et passe des conventions avec les chefs afars et somalis. En 1888 est créé Djibouti. Lagarde noue des relations amicales avec l'empereur Ménélik, fait préciser la frontière avec l'Abyssinie et commencer le chemin de fer franco-éthiopien (1897-1917). En 1896, la colonie prend le nom de Côte française des Somalis. En 1940, elle évite l'occupation italienne, mais est bloquée par les Anglais jusqu'au ralliement à la France libre, en décembre 1942.
Territoire d'outre-mer à partir de 1946, la Côte française des Somalis est pourvue, en 1957, d'un conseil de ministres de 8 membres, présidé par le gouverneur et élu par l'Assemblée territoriale, composée de 32 membres élus ; elle est en outre représentée à Paris par un député et un sénateur. Mais déjà la Côte française des Somalis et surtout son port, Djibouti, suscitent les revendications simultanées de l'Éthiopie et de la Somalie. À l'intérieur, deux ethnies rivales s'opposent : les Afars et les Somalis issas. La majorité de ces derniers, concentrés surtout à Djibouti, voudrait le rattachement à la Somalie britannique, indépendante depuis 1960, les premiers souhaitant leur maintien au sein de la République française. En août 1966, au cours d'un voyage à Djibouti, le général de Gaulle fait entendre que le pays pourra choisir démocratiquement son destin. Mais de graves émeutes éclatent en septembre.
Le 19 mars 1967, un référendum donne une nette majorité aux partisans du maintien au sein de la République française avec un statut renouvelé de gouvernement et d'administration. Ali Aref est élu vice-président du Conseil de gouvernement (5 avril 1967). Sur demande de l'Assemblée territoriale, le territoire prend le nom de Territoire français des Afars et des Issas (juillet 1967). En application du nouveau statut, les élections législatives de novembre 1968 envoient à la Chambre des députés du Territoire une majorité conduite par Ali Aref, leader des Afars ; celui-ci est élu à la tête du gouvernement.
L'indépendance
Un Front de libération de la Côte des Somalis est créé à Mogadiscio par les Issas : par des opérations diverses, il attire l'attention de l'opinion internationale sur l'indispensable indépendance du Territoire. Conduits par Hassan Gouled Aptidon, les plus modérés des membres du Front se regroupent dans l'Union populaire africaine (Somalis), qui, en 1972, fusionne avec la Ligue pour l'avenir et l'ordre (Afars) pour former la Ligue populaire africaine pour l'indépendance (LPAI). Les difficultés économiques comme les tensions sociales sont nombreuses dans le Territoire. La fermeture du canal de Suez est très préjudiciable à Djibouti, qui, depuis 1967, a perdu plus de 75 % de son trafic ; cette situation contribue à accentuer le sous-équipement et le sous-emploi général.
En 1975, l'Union nationale pour l'indépendance, parti qui soutient Ali Aref, amorce le processus pour l'indépendance, dont le principe est reconnu par le gouvernement français le 18 mai 1977. Après référendum, le Territoire français des Afars et des Issas accède à l'indépendance, le 27 juin, sous le nom de République de Djibouti : H. Gouled Aptidon devient président du Conseil de gouvernement, puis président de la République ; le 12 juillet, Ahmed Dini est désigné comme Premier ministre : il démissionnera dès le 17 décembre 1977 au profit d'Abdallah Mohamed Kamil, lui-même remplacé, dès octobre 1978, par Barkat Gourat Hamadou. Le 3 septembre 1977, la République a été admise dans la Ligue arabe. En mars 1979, H. Gouled Aptidon crée le Rassemblement populaire pour le progrès, qui se substitue à la LPAI et qui sera institué parti unique en octobre 1981. Il est réélu à la présidence de la République en juin 1981 et en avril 1987.
Guérilla et parodie de démocratisation
H. Gouled Aptidon tarde à faire droit à la contestation qui s'exprime clairement à partir de 1990 : attentat du 27 septembre 1990, tentative de coup d'État de janvier 1991 et, surtout, déclenchement au printemps 1991 de la guérilla afar menée par le Front révolutionnaire pour l'unité et la démocratie (FRUD). La France, tout en appuyant militairement le pouvoir, fait pression sur lui pour que soit initié un processus démocratique. Un multipartisme limité est reconnu par la Constitution de 1992, mais les élections pluralistes qui s'ensuivent (législatives de décembre 1992 et de décembre 1997, réélection de H. Gouled Aptidon en mai 1993) sont peu représentatives du fait de boycotts, d'abstentions et d'irrégularités. En avril 1999, Ismaïl Omar Guelleh, candidat du parti au pouvoir à Djibouti depuis plus de vingt ans et dauphin du président sortant, remporte l'élection présidentielle avec une large majorité des voix.
L'accord signé avec la principale faction du FRUD le 26 décembre 1994 ne réussit pas à ramener totalement le calme ni la réconciliation : la guérilla, récurrente, reprend avec plus de vigueur à partir de septembre 1997, malgré les efforts de conciliation de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) qui regroupe les pays d'Afrique orientale. En février 2000, le gouvernement et la faction « dure » de la rébellion signent un accord de cessez-le-feu, suivi, le 12 mai 2001, d'un accord de paix global qui prévoit le désarmement du FRUD et son intégration dans la vie civile. À la suite de l'instauration du multipartisme en 2002, les premières élections multipartites depuis 1977 sont organisées en janvier 2003. Mais l'opposition, réunie au sein de la coalition Union pour l'alternance démocratique (UAD) emmenée par Ahmed Dini, dénonce des fraudes, faute d'avoir pu obtenir un seul siège.
Après les attentats du 11 septembre 2001, Djibouti accueille, en 2002, une base américaine : entre 1 500 et 1 800 hommes destinés à intervenir contre d'éventuels groupes terroristes dans une région qui s'étend de l'Afrique orientale à la péninsule arabique, ainsi que la plus importante base militaire française à l'étranger. Ces bases contribuent à l'économie du pays qui repose essentiellement sur le trafic portuaire, notamment à destination du géant éthiopien enclavé.
Par ailleurs, la lutte contre la piraterie au large des côtes somaliennes a placé Djibouti au cœur du dispositif naval mis en place par UE et l’OTAN, ainsi que par plusieurs marines nationales. Ce rôle stratégique pourrait expliquer la relative passivité de la communauté internationale face aux atteintes aux libertés, régulièrement dénoncées par les organisations de défense des droits de l’homme.
Unique candidat à l'élection présidentielle de 2005, le président sortant Ismaïl Omar Guelleh est facilement réélu. L'opposition, dénonçant le mode de scrutin législatif – scrutin de liste à un tour, qui favorise fortement la majorité – boycotte les élections législatives de février 2008. En février 2011, les autorités répriment dans le sang une manifestation de plusieurs milliers de personnes – la plus importante depuis l'indépendance – réclamant un changement pacifique et démocratique du régime et le départ d'Ismaïl Omar Guelleh. Ce dernier, grâce à une révision constitutionnelle adoptée en avril 2010 lui permettant de briguer un troisième mandat consécutif, est réélu en avril 2011 (avec 80,6 % des voix) face à Mohamed Warsama Ragueh (19,4 %), ex-président du Conseil constitutionnel.
C’est dans un climat politique très tendu que se déroulent les élections législatives du 22 février 2013. Pour la première fois depuis près de dix ans, les partis politiques de l’opposition, réunis au sein de l’Union pour le salut national (USN), décident de participer au scrutin. Mais de nombreux opposants sont l’objet d’intimidations : de retour d’exil le 13 janvier, Daher Amhed Farah, président du Mouvement pour le Renouveau démocratique et le Développement (MRD) principal parti d’opposition, et porte-parole de l’USN, est ainsi arrêté à quatre reprises avant d’être condamné à la prison ferme pour « appel à la rébellion ». La victoire écrasante de l’Union pour la majorité présidentielle, avec officiellement 85 % des voix et 55 sièges sur 65, est vivement contestée par l’opposition, qui, réduite à 10 sièges, dénonce les fraudes et boycotte la première réunion de l’assemblée. D’importantes manifestations sont violemment réprimées par le pouvoir. Pour tenter de mettre fin à la crise politique, le gouvernement et l’opposition signent le 30 décembre 2014 un « accord-cadre sur le dialogue politique ». Par ailleurs, accueillant déjà de nombreux réfugiés venus principalement de Somalie, d’Éthiopie ou Érythrée, Djibouti est, depuis 2015, confronté à un afflux massif de Yéménites fuyant la guerre. En avril 2016, c’est sans surprise que le président Guelleh est réélu pour un quatrième mandat.