Théorie des quatre mouvements et des destinées générales
Ouvrage philosophique de Charles Fourier (1808).
Publiée à Lyon sans nom d'auteur, la Théorie des quatre mouvements et des destinées générales de Charles Fourier est, de son propre aveu, une « énigme ».
Cette théorie universelle, dont la plupart des éléments étaient pour leur auteur des questions résolues, est exposée d'une manière déroutante, sous forme d'aperçus ou de prospectus annonçant des développements à venir, selon la demande des lecteurs. Or, cette publication fut un échec complet et il fallut attendre 1822 et le Traité de l'association domestique-agricole pour avoir un exposé plus systématique de sa pensée.
Sa théorie est une critique de la philosophie des Lumières et de sa rationalité dont l'aboutissement, l'égalitarisme révolutionnaire, aurait fait décliner la société civilisée vers l'état barbare. Voulant reconstruire une science susceptible d'orienter vers le bien social, Fourier découvre l'attraction passionnelle : les passions, loin qu'elles puissent être réformées ou réprimées comme le prétendaient les philosophes du xviiie s., ne tendent que vers la concorde, s'ordonnant en séries selon un mode analogue à celui des séries géométriques.
Les lois de l'attraction passionnée sont en tous points conformes à celles de l'attraction matérielle – la gravitation – découvertes par Leibniz et Newton, et il existe une unité de système pour le monde matériel et spirituel, une analogie des quatre mouvements – matériel, organique, animal et social – qui composent le mouvement universel.
La tâche que propose Fourier consiste à élucider ces lois à partir du monde social, car il est le type des trois autres. L'industrie a désormais atteint un niveau de développement suffisant pour que l'humanité se préoccupe de réaliser ses désirs, qu'elle passe de l'incohérence sociale que manifestent en particulier le statut subalterne des femmes dans le mariage et la concurrence commerciale à la combinaison sociale par l'association.
Celle-ci est un ralliement à l'ordre général de l'univers, à l'unité selon laquelle le passionnel et le matériel doivent se distribuer. Dans l'association, les passions s'accordent d'autant mieux qu'elles sont plus vives et plus nombreuses et l'accord, au-delà des désirs particuliers, se réalise dans l'unitéisme, passion universalisante, souche, principe et but de toutes les autres passions, qui est « une passion véhémente, une vertu fougueuse ».
Les aspects les plus extravagants – sa cosmogonie – ou les plus novateurs – la libération des femmes – de la théorie de Fourier seront soigneusement occultés par ses disciples qui ne retiendront de son œuvre que sa critique sociale et l'idée de fonder une communauté sociétaire, le Phalanstère.