institution

(latin institutio, -onis)

Norme ou pratique socialement sanctionnée, qui a valeur officielle, légale ; organisme visant à les maintenir.

Sens général de l’institution

L’institution est d’abord une action : elle est l’action de créer un nouvel ordre de droit. L’institution suppose une rupture de la continuité : il y a un « avant » et un « après » de l’institution. Il est ainsi possible de connaître la personne de l’« instituteur », de dater l’institution elle-même. Solon (vers 640-vers 558 avant J.-C.), l’un des sept sages de la Grèce, a provoqué l’essor d’Athènes en instituant quatre classes censitaires de citoyens, permettant ainsi aux pauvres de participer aux réunions de l’ecclésia et de siéger au tribunal. Périclès (vers 495-429 avant J.-C.) est l’un des fondateurs de la démocratie athénienne. Les révolutionnaires français pensaient imiter ces figures illustres : l’institution de la république contre la monarchie se réfère à l’institution de la démocratie athénienne ainsi qu’à celle de la république romaine.

La logique de l’institution est donc volontariste : elle suppose un projet d’ensemble et une force capable de rendre ce projet réel.

La pensée moderne donne des fondements idéologiques à cette idée. Contre l’idée chrétienne selon laquelle tout pouvoir vient de Dieu, les philosophes des Lumières considèrent que le pouvoir appartient à chaque homme en particulier du fait de sa capacité à se gouverner soi-même. Le pouvoir politique est donc une délégation de l’autonomie de l’individu. Il ne saurait y avoir un ordre des choses immuable et antérieur à toute décision humaine : la justification et l’organisation du pouvoir fondées sur la tradition, l’autorité, le lignage sont désormais irrecevables. Il convient dès lors de fonder le pouvoir sur une décision libre et rationnelle. L’institution met en œuvre la volonté et la raison : elle suppose la capacité humaine à changer l’ordre des choses, à fonder à neuf un mode d’organisation ; elle suppose de plus la raison capable d’embrasser la logique du tout, de concevoir le fondement du droit, par opposition au fait.

Institution et institutions

Employé au pluriel, le terme désigne l’ensemble des règles, régies par le droit, établies en vue de la satisfaction d’intérêts collectifs. Par extension, il désigne également les organismes visant à les maintenir. À cet égard, la Constitution joue un rôle de premier plan dans les institutions. Elle est le texte fondateur et fondamental qui établit la forme du gouvernement, règle les rapports entre gouvernants et gouvernés et détermine l’organisation des pouvoirs publics.

La France a connu plusieurs Constitutions depuis la Révolution. Certaines n’ont eu qu’une existence théorique, comme la Constitution de 1793, et d’autres, une existence très brève, telle la Constitution de 1848, abrogée dès 1852. D’autres textes, au contraire, ont eu une longévité remarquable : les lois constitutionnelles de 1875 ont ainsi été en vigueur jusqu’en 1940.

La Constitution de 1958 se distingue également par sa durée. À la différence des lois constitutionnelles de 1875, elle a fait l’objet d’un nombre important de révisions. Celles-ci s’accélèrent depuis les années 1990. La Constitution a été révisée dix fois entre 1992 et 2000, alors qu’elle ne l’avait été que cinq fois depuis 1958. Certains voient là le signe évident de l’inadaptation du texte ; d’autres y voient au contraire le signe de sa vitalité. La construction de l’Europe politique a, en effet, suscité des nouvelles institutions : la question est d’articuler aujourd’hui les différents niveaux de droits et de pouvoirs.