anglais

Geoffrey Chaucer
Geoffrey Chaucer

Langue indo-européenne du groupe germanique, parlée principalement en Grande-Bretagne et en Amérique du Nord.

Lorsque diverses tribus venues d'Allemagne du Nord et du Jylland (Angles, Saxons, Jutes) commencèrent, en 449 après J.-C. selon la tradition, à envahir l'île appelée Britannia (Bretagne), elles parlaient des dialectes appartenant au germanique occidental. Peu à peu, ces dialectes remplacèrent les langues celtiques et le latin qui y étaient parlés auparavant. En effet, ces nouveaux conquérants ne faisaient que profiter du retrait des troupes romaines (407 après J.-C.).

L'anglais jusqu'au xvie s.

Le vieil anglais (ou anglo-saxon) embrasse la période 450-1150, mais on ne possède guère de documents écrits antérieurs au viiie s. En se limitant à l'essentiel – car il existe plusieurs dialectes différents (northumbrien, mercien, kentien et saxon occidental) –, on peut le caractériser par un ensemble de traits spécifiques, puisque, de nos jours, un anglophone ne peut comprendre un texte rédigé en vieil anglais. Certaines particularités concernent les sons, les graphies ; d'autres affectent les mots et leur structure, les agencements de mots, le vocabulaire aussi. Ainsi, le nom se décline, et l'ordre des éléments dans la phrase comporte une assez grande liberté : puisque les vocables fléchis portent en eux-mêmes l'indice de leur fonction, on peut, sans confusion, les permuter. Quant au vocabulaire, il inclut principalement un fonds germanique, mais il apparaît déjà influencé par le latin (contacts antérieurs avec les Romains, influence des missions romaines au viie s.) et par le scandinave, en particulier pour le vocabulaire militaire et juridique (invasions des Vikings au ixe s.). Le stock de mots paraît, à première vue, assez restreint, mais les écrivains en exploitent pleinement les ressources, grâce à la composition, à la dérivation, aux métaphores.

Le poids global que fit peser la conquête normande (1066) sur le sort de la langue anglaise est considérable. Non que le français ait totalement supplanté la langue indigène. Cette dernière n'a pas davantage subi de métamorphose brutale et immédiate, mais certaines répercussions ne font aucun doute. Elles ont atteint surtout le vocabulaire, car, dans ses structures proprement grammaticales, l'anglais demeure une langue germanique. Le rythme des emprunts s'amplifia à partir de 1200, et atteignit au xive s. des proportions considérables. Toutes sortes de termes pénétrèrent alors dans le lexique. Le français, langue des conquérants, des classes qui détenaient le monopole politique et culturel, imposa par ce biais sa domination. Toutefois, des couches fort importantes de la population continuèrent à parler leur idiome habituel : les paysans, très nombreux, et une partie des citadins.

Le moyen anglais (1150-1500) marqua l'amenuisement progressif des systèmes flexionnels.

L'anglais moderne

En fin de compte, l'anglais moderne (après 1500) fonctionna avec une morphologie très allégée, et un jeu réduit de désinences d'application très générale : -s au pluriel pour une majorité de noms ; 's au génitif ; -ed pour noter le prétérit et le participe passé d'un grand nombre de verbes. Comme certaines distinctions grammaticales demeuraient nécessaires, d'autres procédés prirent la relève, notamment un ordre plus strict des mots dans la phrase. En anglais moderne, la succession « sujet–verbe–objet » fut de règle dans les constructions assertives ; les inversions, encore possibles certes, impliquèrent des conditions d'emploi bien précises (contraste, emphase). La réduction de l'anglais au statut de langue de moindre prestige ne prit fin qu'au xive s. Pendant ce temps émergea pour des raisons politiques, économiques et démographiques un dialecte qui allait faire figure de norme, de standard english, celui de la région londonienne. La langue parlée dans le nord de l'Angleterre et en Écosse resta assez différente.

La Renaissance constitue, dans l'histoire de l'anglais, une phase importante, celle de l'épanouissement. Dans le domaine phonique et grammatical, la langue acquit ses caractères essentiels. Quant aux ressources lexicales, elles ne cessèrent pas de s'étendre. Au xviiie s., on chercha surtout à codifier les usages, à édicter des règles. La bourgeoisie fortunée, qui remporta en 1688 une victoire durable, se trouvait en mesure d'imposer un ton, en même temps que des valeurs morales. Néanmoins, les tentatives de création d'un organisme semblable à l'Académie française échouèrent. Aux xixe et xxe s., alors même qu'elle devenait une grande puissance économique, la Grande-Bretagne étendait son empire. Tout ce passé se reflète dans le vocabulaire de la langue contemporaine, qui a subi, tant en ce qui concerne la prononciation que les règles de grammaire et les différents usages, des pressions tendant à en faire un code uniforme.

Toutefois, il faut aussi tenir compte de tendances opposées, en raison de l'éclatement géographique de l'anglais, depuis la fondation des États-Unis jusqu'à la formation progressive de l'Empire britannique et du Commonwealth. Parmi les idiomes qui ont, dans ces circonstances, acquis une spécificité indéniable, on peut citer l'anglais australien et, bien entendu, l'anglais américain, qui s'est lui-même diversifié tout en infiltrant l'anglais britannique de nombreux américanismes. On peut encore citer les multiples variantes de pidgins.

En Grande-Bretagne, c'est le public school english qui a longtemps possédé le plus d'ascendant, et servi de modèle, de référence. Le prestige de ce type d'anglais est toutefois mis en question. Ainsi, en s'ouvrant aux communautés, la BBC offre une gamme d'accents différents.

La prépondérance de l'anglais

L'anglais est, après le chinois, la langue la plus répandue dans le monde : il est la langue maternelle d'environ 320 millions de locuteurs. Son aire d'extension est constituée de l'ensemble des îles Britanniques, des États-Unis et du Canada, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, de l'Afrique du Sud, ainsi que des pays africains et asiatiques où il reste la langue de l'administration. Langue privilégiée des relations internationales et des marchés financiers, de l'information scientifique et de la révolution informatique relayée par Internet, l'anglais a acquis un primat que renforce sa place de première langue vivante étrangère pour une majorité d'élèves internationaux.

Si l'on compare la prépondérance de l'anglais à celle qu'eurent le latin à l'époque de l'Empire romain ou le français dans l'Europe des xviiie et xixe s., le fait nouveau est que la communication internationale, naguère limitée à des groupes restreints, soit devenue une nécessité et une pratique quotidiennes, au moins pour tous les Occidentaux et pour beaucoup d'autres. Le danger n'est pas dans la communication ; il est dans l'uniformisation du modèle culturel et dans la domination marchande de produits ou de brevets américains interdisant à d'autres d'être diffusés et, à terme, d'être simplement pensés. Il est aussi dans le recul des langues nationales au profit d'un idiome qui tend de plus en plus vers une forme simplifiée (basic-english).