évangile
(latin ecclésiastique evangelium, du grec euaggelion, bonne nouvelle)
Ensemble des livres où sont consignés la vie et le message de Jésus ; chacun de ces livres (avec une majuscule).
Œuvres composites intégrées au Nouveau Testament (seconde partie de la Bible chrétienne), les Évangiles canoniques selon Matthieu, Marc, Luc et Jean ont été rédigés en grec, vraisemblablement entre 70 et 100 après J.-C. Ils ont eu la vocation de transmettre, aux diverses communautés adhérant à la nouvelle confession, l'enseignement religieux et moral du christianisme.
La rédaction de la « Bonne Nouvelle »
Le sens des Évangiles
Tiré du grec euaggelion (« bonne nouvelle »), le terme évangile désigne, dans le Nouveau Testament, soit la Bonne Nouvelle que Jésus lui-même annonce, soit la Bonne Nouvelle qui le concerne : il se rapporte aussi bien au salut dans toutes ses dimensions et pour tous les hommes, qui se manifeste en Jésus-Christ, qu'à la prédication chrétienne qui en témoigne. L'Évangile a d'abord été l'objet d'une prédication orale dans les premières communautés chrétiennes, qui ont conservé et transmis des paroles de Jésus et des récits le concernant. Ces traditions, orales et écrites, réunies dans des textes d'un genre littéraire nouveau, racontaient la vie de Jésus sous la forme d'un drame qui le conduisait à la mort et affirmaient qu'il était ressuscité. C'est seulement au cours du iie s. après J.-C.qu'on a donné le nom d'Évangiles à ces textes.
Écrits du point de vue de la foi chrétienne, les Évangiles transmettent la mémoire de la vie et de la passion-résurrection de Jésus, et rendent témoignage de la manière dont Dieu agit à travers lui. Ils cherchent à susciter la foi, par conséquent leur point de vue n'est pas celui de l'histoire objective. Cependant, ils portent la marque des conditions historiques dans lesquelles ils ont été conçus : chaque Évangile a vu le jour au sein d'une communauté et a été écrit pour elle, en tenant compte de ses besoins. Ainsi, chacun d'eux interprète la vie et la figure de Jésus à la lumière de l'époque et du lieu de sa rédaction.
Les évangélistes
Matthieu, Marc, Luc et Jean sont les noms que la tradition chrétienne attribue aux évangélistes, les auteurs des Évangiles. Marc et Luc, cités par le livre des Actes des Apôtres, sont considérés comme des personnages de l'Église primitive ; Matthieu et Jean semblent être les disciples de Jésus qui portaient ces mêmes noms.
Les Évangiles sont en fait des œuvres collectives qui ont connu plusieurs étapes d'élaboration. Actuellement, la recherche s'intéresse davantage aux groupes ayant réalisé la rédaction finale des Évangiles qu'à leurs auteurs présumés.
Les différents Évangiles
Les Évangiles synoptiques : Matthieu, Marc et Luc
Appelés « synoptiques » parce qu'ils semblent constituer un ensemble, les trois premiers Évangiles – de Matthieu, de Marc et de Luc – suivent un ordre chronologique et un cadre géographique semblables : après la préparation du ministère de Jésus, ils présentent ses activités en Galilée, son voyage à Jérusalem, puis sa passion et sa résurrection. À l'intérieur de ce cadre général, l'agencement et le regroupement des récits particuliers sont souvent proches. Dans les ouvrages, appelés « synopses », où ils ont été réunis, ils sont disposés en trois colonnes parallèles, ce qui permet de les comparer.
Toutefois, le contenu des trois Évangiles synoptiques n'est pas entièrement superposable : certains passages se trouvent seulement dans Matthieu et dans Luc, et chacun de leurs textes possède des éléments personnels. Selon toute vraisemblance, l'explication en est que l'Évangile selon Marc, écrit le premier, a été connu de Matthieu et de Luc, qui l'ont utilisé pour leur propre rédaction. Matthieu et Luc ont par ailleurs puisé à une source commune appelée la source Q (de l'allemand Quelle, « source »), mais chacun s'appuyait également sur des documents qui lui étaient propres.
L'Évangile de Jean
L'Évangile de Jean propose un cadre géographique et chronologique différent des trois autres : Jésus vit et enseigne en Judée comme en Galilée, et son ministère dure non pas une année mais trois. Par ailleurs, cet Évangile développe des thèmes originaux et l'interprétation de la figure de Jésus – la christologie – y est très élaborée. L'Évangile de Jean provient d'un cercle indépendant de celui des trois autres.
Le canon et les apocryphes
Les quatre Évangiles de Matthieu, Marc, Luc et Jean ne sont pas de simples compilations de sources et de documents divers. Chacun élabore une œuvre théologique en proposant une manière de comprendre et d'interpréter la figure de Jésus-Christ, et de vivre en conformité avec elle. Les Évangiles ont d'abord été l'objet de lectures à haute voix pour un usage liturgique et catéchétique. Autrement dit, ils ont été utilisés dans leurs lieux de production en vue de la formation à la foi. Regroupés plus tard, ils sont entrés dans un canon établi du iie au ive s.
En les admettant comme écrits de référence, les communautés chrétiennes n'ont pas seulement canonisé la diversité, mais elles en ont posé en même temps les limites.
En effet, d'autres Évangiles ont été écrits – principalement entre les ier et ve s. – sans entrer dans le corpus du Nouveau Testament. Les plus importants sont l'Évangile selon les Hébreux (écrit en araméen vers 90), l'Évangile selon les Égyptiens (de tendance gnostique, composé vers 150) et le Protévangile de Jacques (écrit en grec vers le milieu du iie s.). Appelés apocryphes (c'est-à-dire cachés et non retenus), ceux-ci ont exercé, pendant une période relativement longue, une grande influence sur l'imaginaire chrétien.
Les procédés narratifs
Les quatre Évangiles de Matthieu, Marc, Luc et Jean, dont chacun représente une œuvre originale, possèdent en commun une trame narrative construite autour du récit de la passion de Jésus et des événements qui la précèdent. Dans cette trame s'intègrent plusieurs genres littéraires distincts.
Les récits de miracle, qui suivent le schéma commun aux textes issus des mondes juif et païen contemporains, permettent à chaque Évangile de présenter à sa manière propre la lutte de Jésus contre les forces du Mal.
Les récits de controverses, qui montrent Jésus aux prises avec des opposants, portent sur des questions relatives aux pratiques rituelles et religieuses, ainsi qu’à la propre mission du Christ. Jean y ajoute des récits de rencontre, construits autour de dialogues, dans lesquels il introduit par des procédés narratifs l'ironie et le malentendu.
Les paraboles sont pour la plupart des histoires fictives, racontées par Jésus lui-même pour illustrer son enseignement religieux et moral. À travers les événements et les scènes de la vie quotidienne, elles projettent un regard neuf sur la réalité qui permet de saisir le mystère du règne de Dieu parmi les hommes. Les Évangiles de Matthieu et de Luc sont particulièrement riches en paraboles, dont une quarantaine ont été recensées dans l'ensemble du Nouveau Testament. Par ailleurs, l'enseignement de Jésus est restitué dans les discours par les Évangiles de Matthieu et de Jean.