D'où le vaste plan d'assainissement de la sidérurgie française décidé en 1978 et mis en application début 1979, alors qu'une véritable révolte sociale éclatait dans le bassin de Longwy, en Lorraine. Ce plan comportait plusieurs volets :
– conversion de la dette, qui coûtait alors 3 milliards de F par an à la sidérurgie, soit 13 % de son chiffre d'affaires en prêts participatifs à long terme ;
– transfert de l'actionnariat privé vers l'actionnariat d'État ;
– nomination de gestionnaires musclés à la tête du Sacilor (Jacques Mayoux) et d'Usinor (Claude Etchegaray) ;
– priorité aux produits à forte valeur ajoutée ;
– réduction des effectifs : 20 000 salariés licenciés sur 138 000.

Quatre ans après l'instauration de ce plan, trois ans après la mise en place d'un plan complémentaire aciers spéciaux, et un an après la nationalisation en bonne et due forme des grands groupes sidérurgiques, on ne voit malheureusement pas en quoi la situation de la sidérurgie française a changé : les capacités restent excédentaires, les bilans déficitaires et les perspectives bouchées.

Mécanique

En pleine métamorphose

Symbole industriel par excellence, la construction mécanique pourrait l'être également de la crise qui affecte l'économie française depuis près de dix ans. Crise peu banale, marquée par une croissance ralentie plutôt que par une véritable dépression, le chômage devenant un solde entre un taux faible d'expansion de la production et des gains importants de productivité.

Le secteur de la mécanique résume assez bien cette contradiction. L'indice de production a progressé de moitié depuis 1970, et même de 17 % depuis 1973, dernière année d'euphorie. Par contre, les effectifs, en augmentation jusqu'à l'été 1974, ont reflué ensuite de 17 %. Avec quelque 50 000 travailleurs en moins, les entreprises du secteur ont accru le volume de leur production de 50 %.

Cette tendance générale recouvre des situations à la fois plus confuses et plus contrastées qu'auparavant. L'évolution technologique rend poreuses les frontières statistiques entre la mécanique, la construction électrique, l'électronique et l'informatique. Une machine est aujourd'hui un petit monstre conçu par un pool de matières grises et le vocabulaire substitue d'ailleurs le mot système à celui de machine. Où ranger cette machine nouvelle qu'est un robot ? Est-il correct, à l'ère du TGV et de la conduite automatique, d'additionner des kilos de matériel ferroviaire ?

Le contraste frappe les marchés et les entreprises. Tandis que la demande intérieure de biens d'équipement s'amenuisait, la clientèle des pays en voie de développement, notamment des pays exportateurs de matières premières et énergétiques, s'élargissait. Les entreprises dont les produits bénéficiaient déjà d'une bonne notoriété à l'étranger ont ainsi été favorisées, mais celles qui résistaient déjà mal sur le marché intérieur ont sombré davantage, de même que celles dont les débouchés naturels ont fortement chuté (le matériel de manutention destiné au bâtiment).

À l'inverse, le marché intérieur s'est largement ouvert aux machines de bureau (le chiffre d'affaires a été multiplié par 2,3 de 1976 à 1982), grâce aux innovations en ce domaine rendues possibles par la micro-informatique.

De la machine-outil à commande numérique à la machine de traitement de textes, la construction mécanique vit à présent sa révolution industrielle dans les conditions difficiles d'une stagnation généralisée. Malgré la présence du mécanicien du dimanche qui sommeille en chaque Français, il n'est pas encore prouvé que cette course au progrès sera gagnée.

Automobile

De bons atouts dans une période sombre

Jamais le paysage automobile français n'aura été aussi contrasté qu'en cette fin d'année 1982 : selon l'angle choisi, on peut être comblé, ou très inquiet.

Comblé, parce que le marché n'a jamais été aussi vigoureux, le cap des deux millions de voitures vendues ayant été franchi pour la première fois. Inquiet, car les constructeurs français n'ont pas bénéficié de l'essor de leur marché national : 1982 restera l'année des importateurs, qui ont pulvérisé tous les records avec une pénétration qui a même dépassé les 40 % au cours de l'été peur se stabiliser à 30,7 % sur l'ensemble de 1982.

Conflits sociaux

Les difficultés de livraison de l'industrie française en raison des conflits sociaux, d'abord chez Renault, ensuite chez Talbot à Poissy et Citroën à Aulnay et Levallois, en région parisienne, ont contribué à faciliter la tâche des étrangers, déjà aidés par les évolutions monétaires entre la France et l'Allemagne et disposant de modèles compétitifs et attractifs.