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Le spectre du dopage
Le 21 août, les VIIes Championnats du monde s'ouvrent à Séville dans une ambiance délétère. Jamais, en effet, l'athlétisme n'a connu une telle série noire en matière de dopage et les pessimistes prévoient une cascade de contrôles positifs et de scandales lors de ces Mondiaux andalous.
En quinze jours, trois athlètes de statures internationales ont été pris dans un filet antidopage dont les mailles se resserrent chaque saison un peu plus : Javier Sotomayor d'abord, convaincu d'usage de cocaïne, doit rendre la médaille d'or du saut en hauteur décrochée au jeux Panaméricains ; le semi-retraité Linford Christie, ensuite, est annoncé positif à la nandrolone, un stéroïde anabolisant de l'ancienne génération. Enfin, à trois jours de l'ouverture des Mondiaux, c'est la consternation : Merlene Ottey, 39 ans, considérée par ses pairs comme une athlète modèle à la carrière exemplaire annonce qu'elle ne se rendra pas à Séville en raison d'un contrôle positif à la nandrolone.
Ces cas, certes voyants, ne sont que la partie émergée d'un immense iceberg. Dans les six premiers mois de 1999, la Fédération internationale a procédé à plus de 1 500 contrôles. Avant Séville, 200 athlètes faisaient l'objet d'une suspension.
Les sprinters rois
Mais qu'importe l'éthique et la santé des athlètes, le show doit continuer !
À la veille de la cérémonie d'ouverture de ce qui est devenu l'une des plus grandes compétitions sportives, le président de l'IAAF, l'Italien Primo Nebiolo - décédé quelques mois plus tard - tape en touche en estimant qu'il n'est « pas le président du pipi ». Les derniers Mondiaux du siècle, il le veut, ne seront pas gâchés par les scandales.
C'est dans une curieuse ambiance de suspicion et de sourires forcés que démarrent les épreuves. Les sprinters, rois du premier week-end, donnent la mesure. Maurice Greene, recordman du monde du 100 m depuis le mois de juin avec 9″ 79, remporte la première de ses trois médailles en frôlant son record du monde (9″ 80). Il doublera sur 200 m et s'imposera enfin avec le relais 4 × 100 m.
Reine annoncée des Championnats du monde, l'Américaine Marion Jones est arrivée à Séville avec une ambition folle : remporter quatre médailles d'or et s'offrir une répétition des jeux Olympiques de Sydney, dont elle veut ramener cinq titres. Mais la chaleur et la fatigue auront raison de son incroyable pari. Après avoir remporté l'or sur 100 m et le bronze à la longueur, elle s'effondre en demi-finale du 200 m, foudroyée par une crampe. Son corps, c'est rassurant, n'est pas une machine.
Les records de Johnson
Le corps de Michael Johnson a également souffert durant les mois précédant les Mondiaux. Mais l'Américain, déjà détenteur du record du monde du 200 m, a préparé son exploit.
En finale du 400 m, il s'empare, comme prévu, de l'un des plus vieux records de l'athlétisme. En 43″ 18, il efface le temps établi en 1988 par son compatriote Butch Reynolds et devient quelques jours plus tard, avec le relais 4 × 400 m, l'athlète le plus titré de l'histoire des Championnats du monde. Avec neuf médailles d'or dans sa collection, il devance Carl Lewis, huit fois couronné.
El Guerrouj, roi des « milers »
En matière de records du monde, Hicham El Guerrouj commence à s'y connaître. Un an après s'être adjugé celui du 1 500 m, le Marocain s'est offert le meilleur temps du mile (3′ 43″ 13), en juillet à Rome. Il réédite en septembre à Berlin, où il bat le record du monde du 2 000 m (4′ 44″ 79), effaçant définitivement le nom de Nouredine Morceli des tablettes mondiales. Invaincu en trois saisons sur 1 500 m, champion du monde à Séville, El Guerrouj s'affirme comme la star des années à venir. Son duel annoncé avec le Kenyan Noah Ngeny, nouveau recordman du monde du 1 000 m (2′ 11″ 96), mais aussi avec l'Éthiopien Haile Gebreselassie sur 5 000 m, devrait être un grand moment de la saison olympique... et des suivantes.
Grands favoris également des jeux de Sydney, Wilson Kipketer et Gabriela Szabo n'ont pas perdu leur temps en 1999. Champions du monde, respectivement du 800 et du 5 000 m, le Danois et la Roumaine sont restés invaincus sur leurs distances fétiches lors des meetings de la Golden League et ont décroché le « jackpot » d'un million de dollars offert par les organisateurs.