« L'effet de surprise ne peut par définition jouer qu'une seule fois » avait prévenu le capitaine des tricolores, Raphaël Ibanez, à quelques heures de la finale. « Les Australiens ont joué cette finale comme ils jouent les matchs de haut niveau depuis longtemps. Nous, nous avons manqué de lucidité. Nous étions comme des gamins à qui l'on dit “demain, vous allez jouer la finale de la Coupe du monde” », confirmait l'entraîneur Jean-Claude Skrela. « On a peut-être joué notre finale contre les Blacks, malgré les mises en garde. »
Malgré leur défaite, prévisible, en finale, les Bleus ont été fêtés en France et même par leurs « meilleurs ennemis » britanniques, ravis de voir lavé l'honneur du rugby de l'hémisphère Nord.
Une question de physique
Mais l'hommage et le titre de vice-champion du monde n'ont pas satisfait des entraîneurs conscients de l'existence d'un fossé encore profond. « Nous avons besoin de matchs comme ceux-là pour nous améliorer », jugeait Jean-Claude Skrela, qui milite pour que l'Europe adopte un calendrier élitiste comparable à celui des grandes équipes des antipodes.
C'est en effet sur un professionnalisme exacerbé que l'Australie, l'Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande ont bâti l'essentiel de leurs succès. Alors que les Européens ont du mal à mettre en place les structures adéquates, s'enferrant dans des compétitions européennes peu sélectives, les équipes du Sud vivent depuis près de cinq ans au rythme infernal du Super 12 – sorte de championnat supranational. Et la préparation physique est à l'avenant, puisque les rugbymen du Sud complètent leurs séances intensives de musculation par la prise de créatine, un produit très contesté en France.
L'opposition entre les « deux rugbys » s'est avérée avant tout une affaire de puissance physique et de capacité à enchaîner les matchs. Une leçon que les « nordistes » devront méditer avant la prochaine édition de la Coupe du monde, qui aura lieu en 2003 en Australie.