Le PACS à l'épreuve
Les députés ne sont pas près d'oublier les débats sur le pacte civil de solidarité (PACS) qui ont animé l'Assemblée nationale, par épisodes successifs, entre le 9 octobre et le 9 décembre 1998. Plusieurs séances de nuit se sont prolongées jusqu'au petit matin, droite contre gauche : la première considérant le PACS comme un « mariage bis », en concurrence avec l'institution du mariage, ou comme une première étape vers l'adoption d'enfants par les couples homosexuels ; la gauche, au contraire, défendant la « grande réforme de société », au service de l'évolution des mœurs. On a tout entendu sur le sujet, tant et si bien que l'on en a presque oublié le contenu du texte... Au fait, le PACS, qu'est-ce que c'est ?
Le PACS est une proposition de loi, élaborée par deux députés de la majorité : Jean-Pierre Michel, élu du Mouvement des citoyens (MDC) en Haute-Saône, et Patrick Bloche (PS, Paris). C'est un contrat qui vise à permettre à des couples, hétérosexuels ou homosexuels, qui ne veulent pas ou ne peuvent pas se marier, d'organiser leur vie commune. Deux personnes-amis, parents éloignés – qui ont un projet de vie en commun peuvent aussi signer un tel pacte. Toutefois le PACS ne peut être conclu entre ascendants ni descendants en ligne directe, ni entre beaux-parents et enfants ; ni entre collatéraux jusqu'au troisième degré (cousins, neveux, oncles). Deux frères, deux sœurs, un frère et une sœur ne peuvent pas signer un PACS ; en revanche, les avantages du dispositif leur sont ouverts – à l'exception des mesures relatives au droit de succession – à condition qu'ils vivent sous le même toit.
Une idée dans l'air du temps
L'idée du PACS est née des revendications des associations homosexuelles au début des années 90. Les militants ont alerté les pouvoirs publics sur le vide juridique qui entoure la notion de couple homosexuel, vide qui est devenu d'autant plus préoccupant avec le développement de l'épidémie du sida. Dans l'état actuel du droit, le partenaire survivant d'un couple homosexuel est considéré comme un « étranger » au regard du droit des successions et du logement. Ainsi, lorsque le contrat de bail est au nom de la seule personne décédée, le partenaire survivant ne peut pas bénéficier du transfert de bail, et doit quitter les lieux. Les concubins hétérosexuels, eux, bénéficient du transfert de bail à condition de vivre ensemble depuis au moins un an. L'extension de ce droit aux couples homosexuels est bloquée, jusqu'à présent, par la jurisprudence de la Cour de cassation qui limite la définition du concubinage au seul couple hétérosexuel.
Les avatars anciens du PACS
Depuis le début des années 90, les projets visant à renforcer les droits des couples non mariés ont défilé, mais n'ont jamais vu le jour : le contrat d'union civile et sociale du MDC, le contrat d'union sociale (CUS) du PS ; plus récemment, le pacte d'intérêt commun (PIC) du professeur de droit Jean Hauser, rédigé sous le gouvernement Juppé. De nouvelles pistes ont été lancées avec le retour de la gauche au pouvoir, en 1997.
La sociologue Irène Théry a proposé, schématiquement, d'étendre la notion de concubinage – et les droits qui y sont attachés – au couple homosexuel. Les députés du PS et du MDC ont réactivé leurs propositions, tandis que les communistes ont déposé un texte à leur tour. C'est la voie parlementaire que le gouvernement de Lionel Jospin a fini par choisir, en chargeant MM. Michel et Bloche, au printemps 1998, de rédiger la synthèse des propositions du PS, du MDC et du PC. Ainsi est né, pour résumer, le pacte civil de solidarité.
À mi-chemin du mariage et du concubinage
Signé au greffe du tribunal d'instance, le PACS confère des droits et devoirs intermédiaires entre le concubinage et le mariage. En l'état actuel du texte, deux personnes « pacsées » se doivent une assistance « mutuelle » et « matérielle ». Pas de divorce, pas de pension alimentaire en cas de rupture du pacte : soit les deux partenaires décident d'y mettre fin d'un commun accord, soit la rupture émane d'une seule personne : celle-ci est alors liée par les devoirs du PACS pendant un délai de trois mois, au-delà duquel le PACS ne produit plus aucun effet. Les partenaires doivent être « pacsés » depuis un certain temps avant de pouvoir profiter de certains avantages du dispositif. Le législateur a voulu favoriser les unions stables. Ainsi, l'imposition commune s'applique automatiquement à compter du troisième anniversaire de l'enregistrement du PACS (l'imposition commune n'a pas toujours pour effet de diminuer le montant des impôts, notamment lorsque le couple dispose de faibles revenus). Deux personnes « pacsées » depuis plus de deux ans bénéficient d'un abattement de 300 000 francs sur les droits de succession et de donation (contre 10 000 francs pour un couple de concubins). Au-delà, les partenaires acquittent des droits de mutation plus avantageux que pour les concubins. En revanche, les avantages successoraux sont applicables sans délai lorsque l'un des deux partenaires est atteint d'une maladie grave, par exemple le sida.