L'année du Proche-Orient

Les difficiles négociations entre Israël et l'OLP

Le bannissement des 415 Palestiniens islamistes par Israël, le 17 décembre 1992, a bloqué pendant quatre mois le processus de paix initié par le secrétaire d'État américain, James Baker. Au cours de sa tournée au Proche-Orient, en février, le nouveau secrétaire d'État, Warren Christopher, a pu se rendre compte à quel point cette expulsion, décidée par Yitzhak Rabin, avait compliqué sa tâche. L'accord séparé avec la Syrie, dont il semble avoir un temps rêvé, apparaît hors de portée.

En fin de compte, les médiations américaine et égyptienne portent leurs fruits, et les négociations bilatérales peuvent reprendre le 27 avril, à Washington. Entre-temps, les Palestiniens ont obtenu que Fayçal Husseini, dont nul n'ignore les liens avec l'OLP et qui est résident de Jérusalem, devienne officiellement le chef de la délégation palestinienne. Trois groupes de travail sont formés, l'un sur le concept d'« autogouvernement », le deuxième sur le contrôle de la terre, et le troisième sur les droits de l'homme. Les Américains tentent de faire adopter une déclaration commune par les délégués israéliens et palestiniens. Cependant, l'OLP rejette le projet rédigé par le département d'État, jugé trop proche des thèses israéliennes, notamment parce qu'il ne mentionne pas le statut de Jérusalem-Est. En cours de négociation, invoquant des « mesures d'économie », les Palestiniens réduisent l'effectif de leur délégation, en réalité pour manifester leur mauvaise humeur. Le 13 mai, les négociateurs se séparent sur un constat d'échec qui contraste avec l'espoir qui s'était manifesté à l'ouverture.

Malgré l'absence de progrès lors de cette session, les négociateurs se retrouvent à Washington, le 15 juin. Un groupe de travail mixte israélo-palestinien s'attache à rédiger une « déclaration conjointe de principes », mais sans grand succès. La délégation israélienne dénonce les « exigences irréalistes » des Palestiniens. Le nouveau document de travail proposé par les Américains concentre sur lui les critiques croisées des deux parties. Pas davantage de progrès dans les négociations bilatérales entre Israël et la Syrie ou le Liban. Comme la précédente, cette session s'achève sans progrès notable. Critiqués par toutes les parties, les Américains, par la voix de Warren Christopher, menacent d'abandonner leur rôle de médiateur. Le processus de paix paraît s'enfoncer dans l'impasse.

Le calendrier prévu par la « déclaration de principes » :
– 13 octobre 1993 : entrée en vigueur de la déclaration.
– Dès l'entrée en vigueur de la déclaration :
transfert aux Palestiniens des compétences en matière d'éducation et de culture, de santé, d'affaires sociales, de taxation directe et de tourisme ;
mise en place d'un comité d'arbitrage, d'un comité de liaison conjoint israélo-palestinien et d'un comité israélo-palestinien de coopération économique ;
ouverture d'une négociation pour la conclusion, avant le 13 décembre 1993, d'un accord sur le retrait échelonné – au plus tard le 13 avril 1994 – des forces militaires israéliennes de la bande de Gaza et de la région de Jéricho ;
mise en chantier du processus électoral qui doit conduire, avant le 13 juillet 1994, à la désignation d'un Conseil, l'autorité intérimaire palestinienne de l'autonomie ;
« Dès que possible et au plus tard au début de la troisième année de la période intérimaire » : démarrage des négociations sur le statut définitif et les questions en suspens ;
après la mise en place du Conseil : dissolution de l'administration civile et retrait du gouvernement militaire israélien.

L'exacerbation des conflits internes aux deux parties

En Israël, des voix se font entendre à l'intérieur même du gouvernement d'Yitzhak Rabin pour engager le dialogue direct avec l'OLP. Les dissensions sont perceptibles aussi dans le camp palestinien. À la mi-juillet, Haïdar Abdel Chafi, le chef de la délégation palestinienne aux négociations bilatérales depuis la conférence de Madrid, critique publiquement le mode de direction de Yasser Arafat et demande une direction collégiale pour l'OLP. Début août, la crise éclate entre la délégation palestinienne et la direction de l'OLP. Trois des membres les plus importants de la délégation, Fayçal Husseini, Saëb Erakat et Hanane Achraoui se rendent à Tunis pour présenter leur démission. Ils reprochent à Arafat et à son entourage de les court-circuiter dans les négociations et de consentir à Israël et aux Américains des concessions qu'eux-mêmes ont refusé de faire. En fin de compte, les trois délégués rangent leur démission, rentrent dans le rang et sont formellement associés à la direction de l'OLP. Le vice-ministre des Affaires étrangères d'Israël, Yossi Beilin, note : « Si nous n'avons plus d'interlocuteurs chez les Palestiniens », l'occasion est peut-être venue de « briser le tabou » et de négocier directement avec l'OLP. La crise politique se poursuit au sein de la centrale palestinienne sur fond de crise financière. Le poète Mahmoud Darwich et le représentant de l'OLP au Liban, Chafic el-Hout, démissionnent du comité exécutif.

Coup de théâtre

C'est alors que, le 26 août, Shimon Pères, le ministre israélien des Affaires étrangères, annonce qu'Israël est prêt à rendre sans délai Gaza et Jéricho « dans le cadre de l'autodétermination ». Dans les jours qui suivent, on apprend que ce projet fait l'objet d'un accord négocié depuis huit mois dans le plus grand secret, en Norvège, par deux équipes restreintes conduites, côté israélien, par Ouri Savir, directeur général du ministère des Affaires étrangères, et, côté palestinien, par Abou Ala'a, conseiller économique de Yasser Arafat. À l'insu des négociateurs officiels, dans l'impasse à Washington, des négociateurs mettaient parallèlement au point à Oslo une déclaration de principes sur l'autonomie palestinienne. Dès le 30 août, Rabin fait approuver par son gouvernement l'accord « Jéricho-Gaza d'abord » qui plonge dans la stupeur le monde entier, à commencer par les Palestiniens et les Israéliens. Les partenaires arabes des Palestiniens, surtout les Syriens et les Jordaniens, sont franchement furieux. L'administration américaine, tenue dans l'ignorance des détails de la négociation d'Oslo, réagit fraîchement. Très rapidement, cependant, le président Clinton se ressaisit et propose d'accueillir à la Maison-Blanche les protagonistes pour la signature officielle de l'accord. Négocié directement entre Israël et les dirigeants de l'OLP, cet accord ne mentionne pourtant pas la centrale palestinienne. Opposé à l'accord, le chef de la délégation palestinienne, Haïdar Abdel Chafi, annonce qu'il ne signera pas ce texte. Au sein du gouvernement israélien, les partisans de l'ouverture d'un dialogue direct avec l'organisation d'Arafat sont désormais majoritaires, mais le Premier ministre n'en est pas. Shimon Pères, cependant, laisse entendre qu'à certaines conditions, Israël pourrait reconnaître l'OLP. Quelques jours plus tard, après d'intenses négociations sous l'égide du ministre norvégien des Affaires étrangères, Johan Jörgen Holst, Israël et l'OLP parviennent à se mettre d'accord sur une reconnaissance mutuelle, qui prend la forme d'un échange de lettres entre Yasser Arafat et Yitzhak Rabin. C'est le deuxième coup de théâtre en quelques jours. Le monde entier est sous le choc.

Israël

Dans un sondage réalisé le 29 août, 53 % des Israéliens déclarent être favorables au programme d'autonomie « Gaza et Jéricho d'abord », et 45 % hostiles. 29 % des sympathisants du parti travailliste sont opposés au projet, alors que 30 % des sympathisants du Likoud et 40 % des sympathisants du parti Tzometh (droite du Likoud) lui sont favorables.

Un accord qui ne fait pas l'unanimité

En Israël, les adversaires de l'accord, essentiellement la droite du Likoud et les colons, ne parviennent pas à mobiliser une population qui, d'après les sondages, exprime son soutien et ses craintes.