Journal de l'année Édition 1994 1994Éd. 1994

Population

Le taux annuel de croissance de la population mondiale a été évalué à 1,6 % en 1993. Il l'était à 1,7 % depuis 1980 au moins, 1,8 % dans les années 1970 et 2,0 % vers 1960. Le ralentissement peut paraître lent et le signe ténu. Il tient d'ailleurs à un arrondi : les taux mondiaux de natalité et de mortalité restent évalués à 26 et 9 p. 1 000, ce qui donne 17 p. 1 000 pour leur différence, soit 1,7 % de croissance naturelle. Mais ces taux eux-mêmes valaient 28 et 11 p. 1 000 en 1980. La décroissance, parallèle et lente, est conforme au processus de la transition démographique, dans lequel sont entrés beaucoup de pays.

Planète

À 2,0 % par an une grandeur double en 35 ans, à 1,6 % elle double en 44 ans. En 1993, la planète compte 5,5 milliards d'habitants. Avec une croissance de 1,6 % par an, elle atteindrait 11 milliards en 2037. En 2025, on en serait à 9 150 millions, alors que les projections centrales des Nations unies en prévoient à cette date 8 425, ce qui représente une croissance moyenne, sur la période, de 1,3 % par an. Partie de 1,6 % en 1994, la croissance annuelle pourrait donc n'être que de 1,0 % en 2025. À noter que 1,6 % de 5,5 milliards représentent aujourd'hui environ 90 millions de personnes en plus chaque année (143 millions de naissances et 53 millions de décès), tandis que 1,0 % de 9 milliards en représenteraient toujours autant en 2025...

Par continent, l'Asie et l'Amérique latine apparaissent globalement dans une situation proche de la moyenne mondiale, tandis que s'en écartent d'un côté l'Afrique, très en retard, où la population continue à croître très rapidement, de l'autre l'Europe où la modernité – faible natalité, faible mortalité mais vieillissement – fait que la population stagne. Les taux de mortalité des pays en cours de transition, c'est-à-dire ceux où la mortalité a déjà baissé et où la fécondité commence à le faire, sont souvent inférieurs à 10 p. 1 000, la médiocrité de la santé publique y étant compensée par la jeunesse de la population.

Les cas de l'Amérique du Nord, États-Unis et Canada, et de la Russie sont dignes d'être comparés. D'un côté, une croissance encore forte (+ 0,8 % par an), bien que la fécondité et l'espérance de vie soient proches de celles de l'Europe : cette croissance est due à la relative jeunesse de la population, induite par une immigration continue. De l'autre, une situation peu glorieuse, de faible fécondité, vieillissement, santé publique déplorable et émigration.

Pays les plus peuplés : en Asie, Chine, 1 178 millions d'habitants (taux de natalité 18, de mortalité 7 p. 1 000 hab.) et Inde 897 millions (31-10). En Amérique latine, Brésil 152 millions (23-7) et Mexique 90 millions (29-6). En Afrique, Nigeria 95 millions (45-14) et Égypte 58 millions (31-8). En Europe, Allemagne, 81 millions (10-11) et Royaume-Uni, 58 millions (14-11).

Les États-Unis ont 258 millions d'habitants, un taux de natalité de 16 p. 1 000, un taux de mortalité de 9 p. 1 000. En Russie, les chiffres correspondants sont 149 millions, 12 et 11.

Le « déferlement » migratoire que craignaient les pays d'Europe, en provenance des pays où la croissance démographique était la plus forte, n'a pas eu lieu. Un afflux est en revanche venu d'Europe, où les secousses postcommunistes, y compris yougoslaves, ont déterminé un afflux de migrants et de réfugiés surtout dirigé vers l'Allemagne. Manifestement – on peut dire la même chose de l'immigration en Israël – la situation démographique n'est pour rien dans ces migrations.

Bardée de protections, la France ne reçoit qu'une faible part de ces migrants. On estime à 100 000 par an le nombre d'immigrants de toutes provenances, ce qui est plus que dans les années 1980, mais beaucoup moins qu'en Allemagne. Le solde migratoire, estimé à 90 000, n'est cependant plus négligeable face au solde naturel revenu à 220 000. Si l'espérance de vie continue d'évoluer favorablement, les nombres de naissances et de mariages s'affaissent à nouveau.

Alors que ce type d'évolution avait pu longtemps être mise au compte de la modernisation de la société (progrès de l'espérance de vie, accès des femmes à l'autonomie économique et juridique), il faut y voir aujourd'hui la conséquence de l'aggravation des perspectives économiques : le chômage touche maintenant toutes les catégories de la population, y compris les jeunes diplômés. La situation de précarité et d'incertitude dans laquelle sont plongés les jeunes est contraire aux projets d'avenir que sont la mise en ménage, le mariage, la constitution et l'agrandissement de la famille.