Météo : le Printemps
À l'exception de la deuxième quinzaine d'avril, ensoleillée et estivale, le printemps 1987 fut largement dominé par des types de temps quasi hivernaux.
Du 21 mars au 2 avril, la France connaît un épisode relativement doux suivi par un épisode froid. Les pluies assez abondantes et les vents souvent violents (124 km/h à Carteret, 156 km/h à Barfleur, 119 km/h à Lille le 27 mars) sont en accord avec l'alternance de flux d'ouest et de flux de nord perturbés qui caractérise la circulation atmosphérique au cours de cette période. Malgré le froid des deux premiers jours, le mois d'avril est plus chaud que la normale. Des records sont même battus entre le 15 et le 30 : 21 °C à Lorient le 16, 24,6 °C au Touquet le 24, 27,3 °C à Carcassonne, le 27, 19,9 °C à Lann Bihoué le 29, pour les températures maximales élevées, ou encore 22,1 °C à Apt-Saint-Christol le 19, 15,1 °C à Saint-Étienne, 14,6 °C à Ambérieu, 13 °C à Lyon-Bron le 29 avril, pour les températures minimales élevées. Les seules régions à ne pas bénéficier de cette chaleur anormale sont le Sud-Est et la Corse, où une nébulosité importante se maintient tout au long de la dernière décade.
La quasi-totalité des pluies a été enregistrée pendant la première quinzaine. Souvent faibles et discontinues, ces précipitations, inférieures aux normales, sont imputables à un flux perturbé de SO (du 2 au 9) puis à un flux humide et frais de NO à N (du 10 au 13) déterminés par le champ de pression évoluant sur l'Europe de l'Ouest. Des pluies abondantes et intenses ont été observées, cependant, en Ardèche : 122 mm à Pont-de-Mont-vert, 118 mm à Pied-de-Bosne le 3 ; en Haute-Loire : 122 mm à Fay-sur-Lignon entre 12 heures TU (Temps universel) le 2 et 6 heures TU le 4 ; et en Isère : 33 mm à Saint-Martin-d'Hères le 9. L'enneigement est bon sur l'ensemble des massifs, comme l'indiquent les quelques relevés suivants : Les Arcs 75-230, Mégève 10-150, La Plagne 150-320, Serre-Chevalier 40-150, Superbagnères 20-110 le 15 avril. À la fin du mois, le bilan hydrique des sols est satisfaisant sur la majeure partie du territoire à l'exception toutefois de l'Alsace méridionale, du littoral et des plaines du Languedoc, du Roussillon et de la Provence.
En France, neige de mai
En Chine, feux de forêts
En mai, c'est le temps qui fait ce qui lui plaît. Les températures sont très inférieures aux moyennes, notamment dans le Nord, le Nord-Est et le Centre-Est. En attestent les quelques records suivants : 6,2 °C à Lyon-Bron, 5,2 °C à Vichy le 24, 8,2 °C à Mâcon le 5 pour les maximales basses ; 0,5 °C à Auch le 8, 4,1 °C à Hyères le 15, 0,9 °C à Lyon-Satolas le 23 pour les minimales basses. Aux épisodes froids qui se sont succédé au cours du mois (du 2 au 6, du 11 au 23 et du 27 au 31) se sont ajoutées des intempéries typiquement hivernales et en particulier d'abondantes chutes de neige sur les massifs du Centre-Est et de l'Est à partir de 600 m d'altitude. En Auvergne, cette offensive tardive de l'hiver (50 cm de neige dans le Forez et le Livradois) a fortement perturbé la circulation routière et la distribution d'électricité (3 500 abonnés ont été privés de courant le 4 mai). Les pluies sous forme d'averses localement fortes (17 mm en une heure à Tours le 18, 20 mm à Dammartin en 6 heures le 26) ont été excédentaires dans le Nord-Est, normales dans le Nord et le Centre-Est et déficitaires sur le reste du pays. Le caractère des précipitations, la forte nébulosité, la médiocre insolation et surtout le froid qui ont marqué le mois de mai sont imputables à une série de perturbations circulant dans un flux de nord (nord-ouest à nord-est). Au 31 mai, le bilan hydrique des sols est très déficitaire (R/RU inférieur à 40 p. 100) dans le Sud-Est, dans le Midi-Pyrénées, en Aquitaine, en Orléanais et en Berry, dans les Pays de Loire et en Charentes. Il est à noter que, du 6 au 25 mai, de gigantesques feux de forêts, dus à la sécheresse et à des vents violents, ont ravagé la province chinoise de Heilongjiang et la partie du territoire soviétique située à l'ouest de l'Argoun. En Chine, le bilan est extrêmement lourd : 200 morts, 50 000 sans-abri (la ville de Xilinji est totalement détruite) et 600 000 hectares de forêt réduits en cendres.
Juin sans soleil : orages et grêle
Juin est un mois frais et exceptionnellement pluvieux. Le soleil ne fait que de rares apparitions et, pour certaines stations comme celles de Paris-Montsouris, de Saint-Martin-d'Hères, de Dijon ou de Phalsbourg, jamais l'insolation n'a été aussi faible. Il est vrai que, du 2 au solstice d'été, les épisodes pluvieux et pluvio-orageux n'ont pas cessé de se succéder sur la majeure partie du pays, à l'exception de la Corse et de la Provence. Les pluies orageuses, parfois accompagnées de vents violents, les chutes de grêle et même les chutes de neige observées le 16 juin sur le mont Lozère, sur les monts d'Aubrac et sur la Margeride, au-delà de 1 300 m d'altitude, témoignent de la fréquence des perturbations (d'ouest du 2 au 6, de sud-ouest du 10 au 14 et de nord-ouest du 15 au 20 juin) et du conflit qui, du 7 au 9 juin, a opposé une masse d'air chaud et humide venue d'Espagne à une masse d'air froid et instable issue des îles Britanniques. Ces phénomènes atmosphériques expliquent les records de pluie mesurés à Rennes (78 mm pendant la première décade) ou à Château-Chinon (106 mm pendant la deuxième décade).
Au terme de ce printemps maussade, les réserves en eau des sols sont normales ou excédentaires sur l'ensemble de la France, sauf dans les Hautes-Pyrénées et en Ariège. La persistance de températures inférieures aux normales dans la moitié nord du pays se traduit par un net retard de croissance et de développement du maïs, du tournesol et du soja.
Philippe C. Chamard