Météo : le Printemps
Avril 1986 restera dans les mémoires : ce mois n'avait jamais été plus hivernal depuis... 1879. Les températures ont été inférieures, voire très inférieures aux normales sur l'ensemble du territoire. Ainsi de nombreux records de froid ont-ils été enregistrés pendant la première quinzaine : – 4,1 °C à Lorient, – 3,3 °C à Deauville et – 7,9 °C à Château-Chinon le 12. Les précipitations, quant à elles, imputables à la permanence d'un temps perturbé, sont globalement excédentaires. Toutefois, les réserves en eau du sol restent faibles en Languedoc-Roussillon, Côte d'Azur et Beauce ainsi que dans les départements de Loire et du Puy-de-Dôme ; le rapport R/RU de la réserve en eau disponible à la réserve utile n'est que de 70 p. 100 dans ces régions. Les chutes de neige ont été fréquentes et abondantes sur les massifs montagneux : sur les Pyrénées le 6, dans le sud-ouest du Massif central le 8, sur les Alpes les 8 et 9 et entre le 19 et le 28. Entre le 11 et le 13 avril, il a également neigé en Picardie, dans le Nivernais et le Berry et même dans le Midi toulousain. L'insolation est anormalement faible et de nombreux records de déficience ont été battus : 86 heures à Lyon et 99 heures à Mâcon, au lieu de 104 et 113 heures, records de 1983.
L'abondance des pluies a provoqué la crue de nombreux cours d'eau dont la Saône, le Doubs, le Rhône, la Seine, la Meuse, la Dordogne et la Durance ; ces crues n'ont heureusement revêtu aucun caractère exceptionnel. Avalanches, glissements et écroulements de terrain, effondrement de chaussées, rupture de câbles électriques due à la neige (65 000 abonnés du Midi toulousain ont été privés d'électricité à la fin de la première décade), interruptions locales et temporaires du trafic routier et ferroviaire, ont été les autres conséquences des intempéries d'avril.
Printemps tardif canicule quand même !
Le printemps ne s'est réellement manifesté qu'en mai : le mois a été caractérisé par des températures moyennes voisines des normales sur la façade atlantique et supérieure dans les autres régions. Des températures inhabituelles ont été relevées : 32,3 °C à Mont-de-Marsan le 17, 31,3 °C à Cazaux le 19 pour les températures maximales, 15,3 °C à Saint-Dizier et 16,1 °C à Millau pour les températures minimales.
Les précipitations ont été déficitaires dans le Sud-Ouest, le Sud-Est et la Corse, normales sur le reste du pays. Le nombre élevé de jours de pluie et la fréquence des orages s'expliquent par les caractères de la circulation atmosphérique au-dessus de l'Europe occidentale. À la fin du mois de mai, le rapport R/RU est inférieur à 30 p. 100 dans le Languedoc-Roussillon ; ce déficit en eau du sol, qui explique le démarrage précoce de l'irrigation des cultures, crée déjà des conditions favorables aux feux de forêts. L'insolation n'a été supérieure à la moyenne que dans le Nord et dans les régions littorales de l'Atlantique et de la Méditerranée. En somme, un mois de mai doux et modérément pluvieux.
L'événement climatique du mois de juin 1986 fut sans conteste le vigoureux contraste entre la fraîcheur de la première quinzaine et les très fortes chaleurs de la seconde moitié du mois. Des températures minimales exceptionnellement basses ont été mesurées le 1er et le 2 et du 5 au 9 : 6,5 °C à Hyères le 1er ; 3,5 °C à Mont-Saint-Vincent le 5 ; 1,1 °C à Romorantin le 7..., alors que des températures maximales particulièrement élevées ont été relevées du 25 au 30 : 35,8 °C au Mans, 35,9 °C à Bourges, 34,4 °C à Paris le 28. Alors que la canicule sévissait tant en France que sur l'Europe occidentale, le sud de l'URSS (Géorgie, Arménie, Azerbaïdjan) a connu une vague de froid sans précédent.
La grêle dévaste le vignoble d'Anjou
Les pluies ont été excédentaires en Bretagne, Haute-Normandie et Corse et déficitaires dans le Centre-Est, le Sud-Ouest et le Sud-Est.
À partir du 15, l'insolation, les températures supérieures aux normales et l'advection d'air océanique tiède ont été à l'origine de plusieurs épisodes pluvio-orageux, du 12 au 18, du 19 au 23 et du 29 au 30 juin. Le 21 juin, les orages et les tornades de grêle, très localisés, qui se sont abattus sur le Maine-et-Loire ont dévasté les cultures et ravagé en partie les vignobles d'Anjou. Au terme de la 3e décade de juin le déficit en eau du sol est important (R/RU ≤ 40 p. 100) dans les régions Languedoc-Roussillon, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Corse, Centre, Pays de Loire, Poitou-Charentes et Midi-Pyrénées (à l'exception des Pyrénées atlantiques et centrales). Juin 1986, en raison de ses caractères climatiques contrastés, a assuré une brutale transition entre le printemps froid et pluvieux et l'été qui s'annonce chaud et sec.
Philippe Chamard