Un nouveau gisement de 40 millions de t de phosphates (25 ans de production au rythme actuel) a été découvert. Depuis le début de l'année, les Industries chimiques du Sénégal traitent un tiers des phosphates extraits. Ce complexe industriel a coûté 1,5 milliard de F, apportés, suivant un montage qui se veut exemplaire, par le Sénégal et la France pour un quart chacun et, pour l'autre moitié, par des partenaires du tiers-monde : Inde, Cameroun, Côte-d'Ivoire et Nigeria. La pêche et le tourisme continuent à se développer. Enfin, puisqu'il a plu, les récoltes seront bonnes.

Chômage

Dans le domaine social, le grand problème et la grande préoccupation des autorités — aiguillonnées, s'il en était besoin, par une grève des étudiants de mars à mai — c'est l'emploi.

À moyen terme, il s'agit, selon Thierno Bâ, secrétaire d'État à l'Emploi, de mettre en œuvre « une gestion économique de l'emploi à la place d'une gestion sociale du chômage ». Se méfiant des procédures administratives, le gouvernement entend s'appuyer sur le secteur privé — ce qui n'est pas gagné — et intervenir surtout par la formation professionnelle, par des aides directes et indirectes et en favorisant la « sénégalisation ».

Dans une année de maturation, la tactique du Sénégal a porté des fruits. Au lieu de s'opposer de front au FMI comme d'autres pays, Dakar se montre bon élève. Le ministre des Finances, Mamadou Touré, est bien placé pour cela : c'est un ancien haut fonctionnaire de cette organisation.

Philippe Gaillard

Tchad

Ils sont partis, mais...

Après un face-à-face de près de 14 mois au Tchad, la France et la Libye concluent un accord de désengagement de leurs troupes (plus de 3 000 Français et environ 5 000 Libyens). Cet accord-surprise intervient à la suite de longues négociations officielles et secrètes dirigées personnellement, côté français, par le président Mitterrand. Celui-ci rencontre en novembre, en Crète, le chef de l'État libyen, qui semble avoir omis de rappeler du Tchad au moins un millier de ses soldats.

L'intervention militaire française qui doit prendre fin est la troisième depuis l'indépendance du Tchad, un des pays les plus pauvres du monde, cycliquement frappé par la sécheresse et la famine et déchiré, depuis près de vingt ans, par la guerre civile. Elle oppose, aujourd'hui, les deux chefs du Nord : le président Hissène Habré, au pouvoir à N'Djamena, et le dirigeant du GUNT (Gouvernement d'union nationale de transition), Goukouni Oueddeï, soutenu par la Libye.

Réticences de N'Djamena

L'accord franco-libyen est annoncé simultanément à Paris et à Tripoli le 17 septembre, le président tchadien — à la demande duquel la France était intervenue dans le cadre de l'opération Manta (août 1983) — ayant été mis au courant peu avant la diffusion du communiqué commun.

D'emblée, la mise en place du système de surveillance, par des observateurs africains, se heurte au refus des autorités de N'Djamena d'accepter la présence de Béninois, pressentis par Tripoli, aux côtés des Sénégalais, sélectionnés par la France.

Le président Habré, obligé d'accepter le fait accompli de l'accord franco-libyen, est resté sceptique quant à la volonté réelle du colonel Kadhafi de se retirer véritablement du Tchad, malgré la confiance affichée par les autorités françaises. D'autant que les Libyens ont bien l'intention de continuer à occuper la bande frontalière d'Aouzou, où ils ont hissé leur drapeau dès 1973.

Paris a continué à observer de près les mouvements libyens, par des écoutes électroniques ou des survols aériens au-delà du 16e parallèle, devenu, depuis le 27 février 1984, la ligne rouge de démarcation des forces antagonistes, à la suite de la destruction d'un Jaguar français par la DCA du GUNT. Le pilote de cet appareil fut d'ailleurs la seule victime française, tuée au combat, de l'opération Manta.

Un pays doublement divisé

Autre événement : les scissions intervenues au sein de l'opposition armée. C'est la rupture en août entre Goukouni Oueddeï et Acheikh Ibn Oumar, secrétaire général du CDR (Conseil démocratique de la révolution), une des principales composantes politico-militaires du GUNT.